La Roumanie, étoile montante sur la carte de l’œnotourisme
Le vin que l’on tient dans son verre n’est pas juste bouche, nez et saveur, mais le concentré d’une histoire riche, écrites par des générations de vignerons.
Corina Cristea, 03.01.2025, 08:06
Sur les origines de la viticulture l’on a écrit des tomes entiers. Les traces les plus anciennes nous amènent dans le Caucase, en Mésopotamie, mais aussi en Egypte. C’est sur le territoire de la Géorgie actuelle cependant que la viticulture aurait fait ses premiers pas, 6000 ans avant J-C, selon un groupe d’experts originaires de 7 pays. Les scientifiques ont utilisé la datation au carbone 14 sur des fragments de céramique utilisée dans la confection du vin. Des fragments originaires d’Iran, de Grèce et de Sicile ont été découverts. D’autres traces, vieilles de 7000 ans ont été découvertes en Chine. Il semblerait que des vignes sauvages ont d’abord été utilisées pour produire le vin, avant que la culture de cette plante ne soit maîtrisée par l’homme. Le chai le plus ancien, découvert en Arménie, était utilisé selon les archéologues en 4.100 av J-C. Cătălin Păduraru, avec un doctorat décroché à l’Université des Sciences agricoles et médecine vétérinaire de Bucarest et qui préside Vinarium, soit le plus célèbre concours de vins qui a lieu en Europe centrale et de l’Est, explique que le vin que l’on tient dans son verre n’est pas juste bouche, nez et saveur, mais le concentré d’une histoire riche, écrites par des générations de vignerons. Cătălin Păduraru :
« La culture de la vigne a impacté grandement l’histoire de l’humanité, et notamment la migration des peuples. Vous savez, avec les céréales c’était facile. Les graines sont conservées facilement et l’on peut les prendre avec soi et les replanter lorsque l’on déménage vers d’autres contrées. L’on sème, l’on moissonne, et l’on s’en va plus loin. Au moment où les populations migratoires qui se déplaçaient vers l’Ouest ont dépassé le Caucase et ont survolé le territoire de la Roumanie et de la Moldavie actuelles, elles ont découvert les vignes. Elles ont appris à utiliser le raisin, à confectionner le vin et s’y sont établies. Parce que la culture de la vigne a un autre cycle que la culture des céréales. Il faut attendre de 4 à 5 ans pour profiter de ses fruits. Et cela a impacté sur le processus de migration ».
La culture des vignes bénéficie d’une longue tradition en Roumanie, et si la Roumanie est devenue aujourd’hui l’un des plus importants producteurs de vin, se plaçant 13e au monde et 6e en Europe, c’est aussi grâce à cette longue tradition. Si l’on regarde de plus près la carte viticole de la Roumanie, l’on y découvre les 8 régions où la culture de la vigne s’est transformée en art : les régions vallonnées de la Moldavie roumaine et celle de Transylvanie, les régions vallonnées de Munténie, d’Olténie, de Banat, de Crisana et de Maramures, enfin de la Dobroudja, mais aussi les terrasses danubiennes. Chacune de ces régions et chaque sol à ses propriétés, depuis l’altitude et jusqu’à l’exposition au soleil, ce qui favorise la diversité des cépage, expliquent les spécialistes. A nouveau Cătălin Păduraru qui réinterprète à sa sauce le vieux adage latin in vino veritas :
« Nous avons procédé à une expérience unique au monde : enregistrer l’empreinte sonore d’une voix dans le vin. Parce que si la matière anorganique, tel le silicium, extrait du sable, et qui sert à fabriquer les puces de mémoire, s’avère capable de conserver la mémoire, pourquoi penser qu’une matière organique, tel le vin, serait-elle dépourvue de cette qualité ? Pour ma part je suis persuadé que le vieux vin, qui a été témoin de tant d’événements, conserve en lui la mémoire de ces expériences. Il nous faut juste apprendre à la déchiffrer. Et je crois que l’adage latin « dans le vin, la vérité » fait justement référence à cette merveilleuse propriété de cette liqueur ».
A présent près de 80 propriétés viticoles, dont la plupart sont situées dans la partie sud du pays, se sont lancées dans l’œnotourisme en Roumanie. Un type de tourisme de plus en plus convoité selon notre hôte, Cătălin Păduraru :
« C’est à l’Institut du vin que nous avons conçu les plans de ce projet de tourisme viticole en tirant profit de la construction de l’autoroute A7, qui reliera la Moldavie, jusqu’à Iasi, peut-être la république de Moldova aussi, à Bucarest. Cette autoroute pourrait devenir l’autoroute du vin, car elle traverse les plus importantes régions viticoles du pays : depuis Dealul Mare et jusqu’à Vrancea. Un écotourisme viticole serait censé se développer à terme grâce à cet axe routier. Un tourisme de caravanes, car il est plus aisé pour les viticulteurs d’aménager des espaces de campement plutôt que d’ériger des dizaines d’hôtels et de chambres d’hôtes. Un tourisme très attractif aussi pour la clientèle étrangère, friande de ce type de tourisme, qui leur permettra de découvrir nos magnifiques régions viticoles ».
Le rêve de Cătălin Păduraru en passe de devenir réalité ? L’avenir nous le dira bien. (Trad Ionut Jugureanu)