La politique, après les élections…
Pays fondateur de l’UE, l’Allemagne est devenue ces derniers temps l’Etat à l’influence la plus importante quant il s’agit des politiques communautaires. Le poids démographique, l’économie solide au sein d’un continent frappé par la crise, la constance de la politique étrangère ont fait que la voix de Berlin pèse lourd dans la prise de décisions visant les dossiers à l’agenda européen. Il s’agit entre autres des leviers d’actions de l’union bancaire, du prolongement de l’aide à la Grèce, une fois fini l’actuel paquet d’assistance ou encore de la stratégie visant la sortie d’Irlande du programme de sauvetage.
Bogdan Matei, 04.10.2013, 13:29
Pays fondateur de l’UE, l’Allemagne est devenue ces derniers temps l’Etat à l’influence la plus importante quant il s’agit des politiques communautaires. Le poids démographique, l’économie solide au sein d’un continent frappé par la crise, la constance de la politique étrangère ont fait que la voix de Berlin pèse lourd dans la prise de décisions visant les dossiers à l’agenda européen. Il s’agit entre autres des leviers d’actions de l’union bancaire, du prolongement de l’aide à la Grèce, une fois fini l’actuel paquet d’assistance ou encore de la stratégie visant la sortie d’Irlande du programme de sauvetage.
Ceci étant, il était presque inévitable que les échos du scrutin en Allemagne transgressent pas les frontières de la République fédérale. Ce que les analystes qualifient d’usure inévitable au bout de 8 ans au pouvoir, ou encore l’ennui des citoyens face à la même figure dominante de la scène politique n’ont pas fonctionné. Tout au contraire, bien qu’impopulaires dans les pays du sud du continent, habitués à consommer plus qu’ils ne produisent, la prudence, la modération et la rigueur du gouvernement dirigé par Angela Merkel ont été validés par l’électorat allemand. Avec 42% des voix, les chrétiens-démocrates ont surclassé leurs principaux rivaux, la gauche sociale-démocrate, qui ont remporté seulement 26% des suffrages. La victoire de la coalition gouvernementale n’est toutefois pas totale, vu que le partenaire traditionnel au gouvernement de Mme Merkel, à savoir le Parti Libéral-Démocrate, n’a pas dépassé le seuil électoral de 5% et n’entrera donc pas au Parlement.
L’analyste politique roumain, Cristian Parvulescu: «Le résultat des élections n’est pas une surprise. Tout le monde s’y attendait, d’autant plus qu’une semaine avant les élections fédérales, des élections régionales avaient eu lieu dans le land de Bavière. Là aussi, l’alliée de l’Union Chrétienne-Démocrate, à savoir l’Union Chrétienne-Sociale, a enregistré un score historique, alors que le Parti démocratique libre a essuyé une défaite elle aussi historique, qui anticipaient ce qui allait se passer une semaine plus tard. Tous les observateurs allemands affirmaient à ce point là que la situation était bien claire. L’alliance pour laquelle Angela Merkel allait opter était la seule inconnue des élections en Allemagne ; et les deux options c’étaient les libéraux – démocrates et les sociaux-démocrates. Si les premiers n’accédaient pas au Parlement, comme ce fut d’ailleurs le cas, alors une grande coalition avec les sociaux-démocrates était prévisible ».
Le professeur Parvulescu prévoit que ce que l’on appelle la grande coalition entre les deux poids lourds de la scène politique allemande sera inévitablement asymétrique. Le leader social-démocrate, Peter Steinbruck, a présenté sa démission tout de suite après la défaite, ce qui a créé un vide d’autorité à l’intérieur de la formation. En tant que partenaires juniors, les sociaux-démocrates auront du mal à influencer d’une manière décisive le prochain cabinet, d’autant plus que le leader du gouvernement s’est déjà appropriée une partie de leurs thèmes de campagne.
Cristian Parvulescu: « La marge de manœuvre dont dispose Angela Merkel est assez grande. Et cela parce que faute d’un score favorable, les sociaux- démocrates arrivés au pouvoir se retrouvent extrêmement limités dans leurs actions futures et donc incapables d’influencer les politiques gouvernementales. Cela ne veut pas dire que l’austérité perdurera en Europe. N’oublions pas qu’Angela Merkel avait déjà annoncé une série de mesures que les Allemands démunis attendaient depuis pas mal de temps et qui se verront mettre en place même en l’absence d’une grande coalition au pouvoir. Prenons l’exemple du salaire minimum généralisé dont l’Allemagne a été paradoxalement dépourvue jusqu’à présent ».
Préférés par une dizaine d’électeurs et devenus la troisième force politique du pays, les Verts se sont dits prêts à rejoindre la coalition au pouvoir aux côtés des chrétiens- démocrates. Aux dires de Cristian Parvulescu, une alliance noire-verte (le noir étant la couleur des chrétiens- démocrates) reste pourtant peu probable : « Cette alliance avec les Grünen n’a pas grand chose à dire puisque Mme Merkel a déjà pris la décision de mettre fin aux centrales nucléaires après la catastrophe de Fukushima , d’il y a deux ans, qui a semé la panique parmi les Allemands ».
Par ailleurs, pour reprendre une formule consacrée depuis deux décennies déjà, la locomotive franco- allemande de l’UE se prépare maintenant pour un nouveau départ. Selon Philippe Ricard, journaliste au Monde, le prochain enjeu serait de voir comment se mettront d’accord la nouvelle coalition allemande ayant à sa tête un ancien chancelier conservateur réélu haut la main et l’administration socialiste de Paris dirigée par un chef d’Etat et un gouvernement en perte de popularité. Or, c’est justemement de la qualité du dialogue franco-allemand que dépendent aussi bien le bon fonctionnement de l’UE que son rôle sur la scène du monde. (trad.: Alexandra Pop, Ioana Stancescu)