Défis et opportunités à l’ère numérique
Corina Cristea, 15.10.2021, 08:43
La
transition numérique occupe une place importante dans les préoccupations de
l’Union européenne, et les montants alloués sont cohérents, en phase avec les
objectifs. Pourquoi la transformation numérique est-elle aussi nécessaire ? La
réponse est simple : nos besoins changent avec l’évolution de la société, de
nouveaux outils de mise en réseau émergent, et qui plus est, il existe un lien
fort entre transformation numérique et compétitivité. Autant de raisons qui
font que Bruxelles a conçu l’Europe numérique, le premier programme
communautaire visant à accélérer la reprise et à stimuler la transformation
numérique de l’UE. Doté de 7,6 milliards d’euros, le programme couvre la
période 2021/2027 et finance des projets dans cinq domaines sensibles : les
superordinateurs, l’intelligence artificielle, la cybersécurité, les
compétences numériques avancées et la généralisation de l’utilisation des
technologies numériques dans l’économie et la société. La majeure partie de ce
budget sera allouée à des projets de calcul haute performance et d’intelligence
artificielle, tandis que d’autres appels d’offres seront lancés prochainement.
L’Europe numérique vient d’ailleurs s’ajouter à d’autres programmes censés soutenir
la transformation numérique, tel Horizon Europe, ciblé sur la recherche et le développement
technologique. De plus, les plans nationaux de relance et de résilience doivent
allouer au moins 20 % de leurs budgets à la transition numérique. Cette
dernière implique en effet un changement de paradigme dans tous les aspects de
la vie économique, l’automatisation des processus, une relation différente
entre l’homme et la machine. En Roumanie, cependant, du moins pour l’instant, l’on
parle davantage de numérisation, qui n’est que la première phase vers la
transformation numérique. Eliza Vas, experte à l’Institut européen de Roumanie,
explique :
« Malheureusement, dans de nombreux cas, nous parlons davantage de
numérisation. La transformation numérique peut être utilisée dans certains
domaines et concerne certaines institutions ou services publics, qui seront
véritablement transformés par la numérisation. Voyez-vous, nous sommes
malheureusement confrontés à une fragmentation des services publics numériques.
Encore une fois, il y a des domaines où la numérisation marche très bien, puis
le même type de service, fourni ailleurs, où le dossier en papier est encore
roi. »
Contrairement
à la numérisation, qui présuppose l’adaptation des usagers aux nouvelles
technologies, la transformation numérique implique des changements autrement
plus profonds. Eliza Vas :
« Nous avons tous vécu ce processus de numérisation rampante, que la
pandémie nous a en quelque sorte forcés d’accomplir dans le domaine de
l’éducation. Dans certains cas, ce processus a mené au développement de toute
une série de pratiques numériques, même si, quelquefois, l’expérience n’a pas
été poursuivie. Dans d’autres cas, malheureusement, ce processus de
numérisation a creusé les écarts entre les familles qui disposent de pas mal de
possibilités et les autres. Mais vu les risques qui nous guettent, les crises
qui peuvent survenir à tous moments, dans la société ou dans l’économie, il est
important d’utiliser ces outils, qui sont à notre disposition, mais il est tout
aussi important de s’assurer que les gens possèdent les compétences nécessaires
pour en faire un bon usage. Prenez cette statistique assez inquiétante pour la
Roumanie, qui montre que moins de 30% des Roumains détiennent des compétences
numériques de base. Quant aux jeunes, ce chiffre monte à 56%, mais cela sans
parler de compétences numériques plus avancées, que seuls 10% des Roumains sont
capables de faire valoir. Alors, vous comprenez combien il est important
d’investi, aussi bien dans les nouvelles technologies et les réseaux que dans
la formation et l’accessibilité. La transition numérique est aussi une question
de compétitivité. Des entreprises originaires d’autres parties du monde opèrent
dans l’UE, et il est important que les entreprises européennes soient soutenues
dans ce processus de transformation numérique, qu’elles puissent proposer des
solutions innovantes et demeurer compétitives sur le marché mondial. Voyez-vous,
les canaux de communication que nous utilisons actuellement sont dans leur
grande majorité créés par des producteurs non européens, ce qui représente une
vulnérabilité. Quant aux services numériques, on constate le ras-le-bol des gens
à faire la file devant les guichets lorsqu’il s’agit de résoudre le moindre
problème administratif. Il est certainement plus aisé d’envoyer un courriel
pour recevoir un formulaire plutôt que de faire la file devant trois guichets différents,
il est plus aisé d’utiliser un guichet automatique pour payer ses factures,
n’est-ce pas ? »
Alors,
la société se modernise, change, et de plus en plus d’outils numériques deviennent
accessibles, constate Eliza Vas. Mais il y a aussi des évolutions en termes de comportement,
les gens ont besoin d’avoir accès aux ressources, aux outils et aux usages
numériques, ils veulent que l’interaction avec les autorités puisse se dérouler
beaucoup plus efficacement qu’avant. (Trad.
Ionut Jugureanu)