Avec ou sans le FMI?
Les experts du FMI, de la Commission européenne et de la Banque mondiale ont examiné la mise en application de l’accord de type préventif, qui s’achèvera cet automne, d’un montant de près de 2 milliards d’euros. Puisque les autorités roumaines n’ont pas encore retiré d’argent sur ce crédit, plusieurs voix au sein du gouvernement jugent inutile la prolongation de cet accord. La question pourrait être tranchée au mois d’avril, lorsque la délégation des bailleurs de fonds internationaux sera de retour à Bucarest.
Bogdan Matei, 13.02.2015, 14:01
Selon le premier ministre roumain, Victor Ponta, à cette même occasion on abordera aussi le sujet des différends majeurs qui opposent les deux parties, à savoir la majoration du prix du gaz et la restructuration des industries productrices d’énergie à base de charbon. Victor Ponta : « Il y a plusieurs choses que nos partenaires internationaux ont estimé réalisables. En 2014, le Produit intérieur brut est revenu au niveau d’avant la crise et ce moment de croissance continue de se consolider. Ce sont la consommation des ménages et le volume considérable des exportations qui ont soutenu la relance de l’économie. L’important c’est que toutes les mesures que nous continuerons d’adopter puissent nous permettre de nous maintenir sur cette voie. Le Code fiscal, un taux croissant d’absorption des fonds européens et la levée de toutes les barrières bureaucratiques nous aident en ce sens. Nous avons un accord avec les institutions internationales que nous souhaitons finaliser à bien. Nous n’avons pas signé hier la lettre d’intention, en raison de deux aspects qui nécessitent des négociations plus poussées. Ces aspects, il faut les repenser dans l’intérêt de ceux dont le vote nous a propulsés au gouvernail du pays. Le premier est lié au prix du gaz pour les consommateurs domestiques. Nous voulons tout d’abord avoir la certitude que la hausse de ce prix est vraiment nécessaire, alors qu’à l’échelle mondiale la tendance des tarifs de l’énergie est à la baisse. Ensuite, il faut voir si ce prix est supportable ; sinon, en novembre-décembre, les ménages et les Centrales de production d’énergie thermique pour la population risqueront de se retrouver dans l’impossibilité de régler leurs factures. Le second aspect porte sur le fait que, selon moi, la Roumanie a besoin de produire de l’électricité à base de charbon. Cette histoire de fermeture des mines et des centrales à charbon ne date pas d’hier. Je ne cesse de l’entendre depuis les années 96-97, je crois. Moi, je suis d’avis qu’il ne faut pas les fermer, qu’il faut produire de l’énergie aussi bien dans les centrales hydroélectriques et nucléaires ou à base de sources renouvelables, que dans les centrales à charbon, à condition, bien sûr, que ces dernières soient modernisées, plus efficaces et que l’on fasse les investissements environnementaux nécessaires ».
Parmi les opérateurs économiques figurant sur la liste noire des créditeurs on retrouve le Groupe Energétique Oltenia (sud), qui comporte aussi des exploitations de lignite et des centrales thermiques pouvant couvrir plus de 40% du besoin national en énergie électrique. En sa qualité de conseiller du premier ministre et d’ancien ministre dans les gouvernements de gauche antérieurs, Ionel Blănculescu insiste sur l’obligation qui incombe à l’Exécutif social-démocrate de protéger ses citoyens : « Il y a des arguments très clairs à l’appui. Le FMI se doit de comprendre que les 26.000 salariés qui, dans l’économie horizontale, soutiennent les quelque 40 à 50.000 salariés du secteur d’Etat, ne peuvent pas être licenciés du jour au lendemain, que l’on ne peut pas fermer ces unités d’un jour à l’autre et que la solution est celle suggérée par le premier ministre, à savoir un programme viable de modernisation et d’amélioration de leur efficacité, au travers d’une gestion plus performante. Pour ce qui est du tarif du gaz, notamment du gaz fourni aux consommateurs domestiques et aux centrales de production d’énergie thermique pour la population, je pense que trop de hâte nuit. La Roumanie ne devrait pas se presser de changer totalement la tendance, en majorant ce prix, alors qu’à l’échelle internationale il a énormément baissé. En fin de compte, la population mérite elle aussi de bénéficier de cette tendance décroissante du prix du gaz, du brut et du pétrole, aussi longtemps qu’elle durera ».
L’analyste économique Radu Soviani estime que la question de la prolongation de l’accord de la Roumanie avec le FMI ne sera pas tranchée avant deux mois: « A mon avis, l’absence d’une lettre émanant du FMI constatant l’accomplissement des engagements assumés par la Roumanie est source d’incertitude dans l’immédiat. Que signifie cette incertitude? D’une part, le fait que le FMI n’étant pas certain qu’il y ait des faits négatifs, l’accord n’est pas déclaré de facto comme étant suspendu, même s’il l’est, en pratique. D’autre part, cela signifie aussi que le cabinet de Bucarest n’est pas certain qu’il y ait des choses positives. Il ne reste plus qu’à patienter jusqu’en avril pour voir comment se matérialiseront ces inconnues ».
Le président du Conseil fiscal, Ionuţ Dumitru, affirme que les opinions exprimées par les experts du FMI au sujet des groupes énergétiques mettent au jour un problème plus ample, qui grève depuis longtemps le développement de économie roumaine. Il s’agit de l’inefficacité des entreprises publiques. Au nom de l’opposition libérale, l’ancien ministre de Finances Gheorghe Ialomiţianu se dit convaincu que l’absence d’une lettre d’intention prouve que « le gouvernement en place n’a rien fait de ce à quoi il s’était engagé. » (trad.Mariana Tudose )