Une bibliothèque de Roumanie, au classement des préférences internationales
Une bibliothèque plutôt méconnue en Roumanie figure désormais dans le classement des préférences des internautes naviguant sur le portail boredpanda.com, une des communautés en ligne les plus appréciées par les amateurs d’art, de photos et de design, qui dénombre plus de 1,6 millions d’abonnés sur Facebook. La Bibliothèque de l’Université technique « Gheorghe Asachi » de Iaşi est considérée comme une des plus belles au monde, aux côtés de compétitrices prestigieuses telles que la Bibliothèque du Collège Trinity de Dublin, la Bibliothèque royale portugaise de Rio de Janeiro, la Bibliothèque de l’Abbaye d’Admont, d’Autriche, de style baroque tardif, la Bibliothèque nationale de Prague, la Bibliothèque nationale de France ou la Bibliothèque du Congrès des Etats-Unis, à Washington. La Bibliothèque de l’Université technique est accueillie par le Palais de l’Université de Iaşi, construit en 1860 à l’initiative du prince Alexandru Ioan Cuza.
Ana-Maria Cononovici, 12.07.2015, 13:30
Neculai Eugen Seghedin, professeur des universités et vice -président de l’Université technique « Gh. Asachi » de Iaşi, dresse un bref historique de cet édifice : « Cette bibliothèque est partie composante d’un très beau monument architectural, à savoir le Palais de l’Université de Copou, dressé d’après les plans de l’architecte suisse Louis Blanc. C’est à lui que nous devons d’autres projets importants pour la Roumanie, dont le Palais du ministère de l’Agriculture de Bucarest et l’édifice de l’Université de médecine et de pharmacie Carol Davila, de la capitale. Démarrée en 1893, la construction du palais de l’Université de Copou s’est achevée en 1897. La pierre d’assise du bâtiment a été placée sous la Grande Aula du palais, par le prince héritier Ferdinand Ier. Le roi Carol et la reine Elisabeth ont participé à la cérémonie d’inauguration de ce palais, fruit de l’initiative de la famille royale et du ministère de la Culture. Ce fut en fait un effort concerté de la société roumaine de l’époque, car l’Université de Iasi, ce premier établissement d’enseignement supérieur du pays, méritait bien un édifice aussi majestueux. Les ébauches du palais avaient été réalisées par Petru Poni, qui s’était inspiré des architectures autrichienne, allemande et suisse typiques à ce genre d’édifice. Comme Louis Blanc ne les pas suivies à la lettre, le grand chimiste roumain Petru Poni allait consigner, dépité, dans ses mémoires, que le résultat final n’avait plus rien en commun avec ses esquisses. Dans sa vision, la bibliothèque devait comporter un corps central et une salle de lecture, les espaces destinés à l’entreposage devant être ajoutés sur les côtés et élargis au fur et à mesure de l’agrandissement du fonds de livres. Louis Blanc, lui, a opté pour une autre solution, celle d’une pièce servant à la fois de salle de lecture et d’entrepôt. C’est un espace très généreux et ample, qui invite à la lecture et à la méditation. Petru Poni s’est dit mécontent du fait que la bibliothèque ait été installée à l’étage, car les lecteurs risquaient d’être embarrassés par les réunions estudiantines fracassantes organisées au rez-de-chaussée. »
La forme actuelle de l’édifice qui abrite les universités « Al. I. Cuza » et « Gheorghe Asachi » est le résultat des travaux d’élargissement effectués au milieu des années 1930. La bibliothèque n’est pas le seul espace tout à fait à part de ce palais. Dans la même série on retrouve la Salle des pas perdus, qui abrite les fresques de Sabin Bălaşa, datant des années ’70 et l’Aula de l’Université « Gheorghe Asachi » de Iaşi. Tout comme l’ensemble du palais, la Grande salle a été construite en style éclectique, très en vogue à l’époque.
Voici les détails de notre interlocuteur, Neculai Eugen Seghedin, professeur des universités: « Comme je le disais au moment où ce classement avait été élaboré, le fait que notre bibliothèque s’y retrouve ne m’étonne pas. Et ce parce que Louis Blanc avait réalisé ce projet en puisant dans tout ce qu’il y avait de meilleur dans l’architecture européenne de ces temps-là. Autrement dit, cet espace a été conçu en parfaite harmonie avec le monde académique européen. La Roumanie résonnait alors avec l’Europe. Que cette bibliothèque ressemble à d’autres établissements européens prestigieux de ce type n’est donc pas le fruit du hasard. Nous sommes très heureux de posséder des valeurs spirituelles particulières, que nous tentons de préserver, de mettre en exergue, à la mesure de leurs prestige et importance dans le mental collectif. »
Même si la bibliothèque dispose aujourd’hui d’environ 1 million de volumes, elle est quasi-inconnue des habitants-mêmes de la ville de Iaşi, car le caractère technique du fonds de livres limite sensiblement l’intérêt des lecteurs.
Nous avons invité notre interlocuteur à nous décrire la bibliothèque: « C’est un espace très généreux. La bibliothèque est très haute. Son magnifique plafond à caissons est prévu d’un luminaire central. Les livres sont rangés sur les étagères, d’une part et d’autre de la salle et au balcon, où se trouve la salle de lecture spacieuse, prévue de larges baies vitrées qui donnent sur la rue. Les pièces de résistance de cette bibliothèque sont le plafond, la boiserie, en très bon état, et la rampe d’escalier en fer forgé. »
Le sondage en ligne, réalisé auprès de 400.000 lecteurs, a débouché sur 133 propositions, dont 25 ont été retenues et soumises au vote. Connue comme « la ville des tilleuls », Iaşi a désormais une nouvelle raison de fierté. (trad. Mariana Tudose)