Un match de basket pas comme les autres
Ce fut une compétition assez serrée d’ailleurs, durant laquelle les sportifs plus expérimentés dans l’utilisation des chaises roulantes ont bénéficié d’un avantage évident. Hormis le caractère sportif de l’évènement, le match a également été une excellente occasion d’attirer l’attention sur les différentes formes de discrimination auxquelles se confrontent les personnes à handicap.
Ana-Maria Cononovici, 16.11.2014, 14:40
Adrian Szelmenczi, le coordinateur du projet explique comment cette idée lui est venue. « Il suffit de faire une courte randonnée à travers Bucarest pour observer que l’accès des personnes à handicap à la vie publique est fortement limité. Il s’agit de choses simples, telles les bordures qui n’ont pas été rabaissées et qui posent problème à toute personne en fauteuil roulant qui souhaite traverser la rue par exemple. Monter dans un bus ou un tram, c’est tout aussi difficile. Je sais qu’au métro, la situation est meilleure, mais côté transport public de surface, les choses vont vraiment très mal. Puis j’ai vu des voitures garées sur les trottoirs, qui posent problème aux utilisateurs de chaises roulantes. Les autorités publiques de Bucarest ne font pas suffisamment de choses pour rendre cette ville plus accessible. Les personnes touchées par cette situation ne sont pas uniquement celles à handicap, mais nous tous, mères avec enfants en poussette, personnes âgées, enfants. Le match est un moyen d’attirer l’attention sur le fait que les personnes à handicap existent, même si on ne les voit pas, parce qu’elles sont condamnées à rester à la maison. »
Les équipes ont été formées de personnalités publiques qui ont appris sur place comment jouer du basket en fauteuil roulant selon les règles du jeu, aux côtés des sportifs de Motivation. Andrei Bratu, un jeune de 24 ans, étudiant à l’université de sociologie de Bucarest explique pourquoi il a choisi de participer à cette compétition : « Je me retrouve ici à l’invitation de l’ONG Active Watch et de la fondation Motivation, à sortir de la maison pour jouer un match démonstratif. Il est difficile de sortir de la maison puisque Bucarest n’est pas une ville très agréable de ce point de vue, main on fait ce qu’on peut. J’ai débuté au basket en 2012 dans une colonie de vacances à Bran. J’ai commencé à aimer ce sport que j’ai continué à pratiquer à Bucarest aussi. »
Andrei se rend à la fac avec sa voiture perso et a choisi une université dotée d’ascenseur. Utilisateur d’un fauteuil roulant dès son enfance » suite à une erreur médicale, Andrei est habitué aux attitudes plutôt étranges de gens à l’égard des personnes à handicap. Sa suggestion pour tous les bucarestois est de sortir de chez eux et de faire du sport.
Les sportifs de Motivation pratiquent le basket depuis pas mal de temps et ils participent même aux compétition nationales. Irina Zamfirescu d’Active Watch affirme que ce match sera suivi par une campagne censée convaincre les autorités que le temps est venu de redonner la ville à ses citoyens et que nous devons tous avoir plus de patience. « Nous voulons remettre à l’agenda public le problème de la discrimination des personnes handicapées. A l’heure actuelle ces personnes n’ont pas accès au plus basique des objets publiques : la ville et c’est d’ici que découle la discrimination au sujet de l’accès à l’éducation et du marché de l’emploi. C’est un signal d’alarme ».
Avant le match, les personnalités du monde des médias ayant choisi de participer à celui-ci en chaise roulante ont essayé de déchiffrer les secrets et les techniques de ce sport. Aux dires d’Alin Saftel, le coach de l’équipe Motivation Ilfov, ce fut un match assez serré :« J’ai essayé de leur transmettre plusieurs secrets sur l’utilisation de la chaise roulante. Je n’ai pas réussi à leur dire trop de choses. Ils se déplaçaient assez lentement. Au moment où ils ont finalement appris, le match s’est terminé »
Cristian China Brita est un bloggueur qui a choisi de participer à ce match. Ecoutons aussi ses impressions. « Ce fut une véritable leçon. Nous avons expérimenté ce que ces personnes vivent vraiment. Pour nous c’est une situation normale, le fait d’avoir des jambes fonctionnelles. Et pourtant, ils nous ont fait asseoir dans des fauteuils roulants et nous ont battu. La différence entre nous et eux a été extraordinaire. Nous avons été nuls et ils ont été merveilleux. Qui plus est, leur énergie et leur enthousiasme semblent recharger nos batteries. En les regardant, on apprend des choses nouvelles et nos petits problèmes quotidiens semblent être du n’importe quoi. On commence à apprécier davantage notre quotidien. »
Le rencontre a été captivante et amusante à la fois, commentée avec beaucoup d’humour par le fameux commentateur sportif Cristian Topescu. Tous les participants ont reçu à la fin un diplôme.
Active Watch, Motivation Romania et Light into Europe, les organisateurs de l’évènement ont atteint un de leurs buts : montrer au grand public que les personnes immobilisées en fauteuil roulant étaient des personnes capables de faire plein de choses. (trad. Alex Diaconescu)