Repair café
De nos jours, il est bien plus confortable d’acheter un objet neuf que de réparer un vieux. Et pourtant, le respect envers les objets achetés et utilisés pendant un certain temps c’est aussi le respect envers leurs constructeurs et envers l’environnement. « Repair café » a commencé à Cluj, en tant que projet pilote censé tester la réaction du public à un autre type de recyclage. Et ce fut un succès durable.
Ana-Maria Cononovici, 06.11.2016, 13:10
Dan Sânpetreanu compte parmi les auteurs du projet « Repair café ». Passionné de mécanique, de la réutilisation des objets en tout genre, il pense que chacun d’entre nous peut lutter pour changer les mentalités au sujet de ce que nous jugeons comme déchets. C’est précisément la mission des ateliers « Repair café ».
Dan Sânpetreanu : « Nous avons réussi à réunir une multitude d’expériences et d’idées de Roumains mais aussi d’étrangers. Nous avons appris qu’il fallait réorienter les circuits économiques vers tout ce qui est local, du point de vue territorial et temporel, afin de pouvoir réutiliser les ressources dont nous disposons le plus possible. C’est pourquoi nous avons fondé cette association. Nous avons commencé à développer des projets concrets relatifs d’abord à la réutilisation des ressources. C’est un concept qui s’appelle 5R et qui commence par la réduction de la consommation au minimum nécessaire et se poursuit par la réutilisation de ce que l’on a acheté, par la réparation de ce qui s’est cassé et si l’objet est irréparable, par sa réutilisation sous une autre forme, avant de finir par le recyclage. »
Le projet Repair café fonctionne déjà depuis décembre 2015, mais ses initiateurs souhaitent le rendre permanent et l’utiliser en tant qu’exemple pour que les gens apprennent à faire le tri sélectif, qu’ils découvrent que les déchets ne sont pas uniquement des déchets, mais aussi des ressources de valeur que l’équipe de Repair Café peut refaire fonctionner, a avoué notre interlocuteur.
Dan Sânpetreanu : « J’ai vu des personnes qui semblaient mieux comprendre la valeur des objets qu’ils traitent de déchets, de détritus. Dans certaines situations les gens disaient : j’ai voulu jeter un couvercle en plastique que je n’utilisais plus, mais après la discussion avec toi, j’ai réfléchi si la poubelle était vraiment sa place et si on ne pouvait l’envoyer quelque part pour le réutiliser avant de le mettre à la poubelle ».
Ce sont les petites réparations qui apportent les grands changements ou encore Pas question de jeter ça ! c’est une des devises des mécanos de Cluj. Dan Sânpetreanu précisait que ce qui motive les participants à ce projet, c’est l’idée de diminuer la quantité de déchets. Au fait, pensent-ils, il n’y est pas question de déchets, mais d’une approche consumériste de la vie.
Dan Sânpetreanu : « Je trouve qu’il est grand temps d’arrêter d’envisager les ressources comme du matériel dont on peut se dispenser. C’est là une de nos carences culturelles, qui date d’une vingtaine d’années. Les premiers à franchir le seuil du Repair Café de Cluj, pour faire réparer leurs appareils, c’étaient des gens d’un certain âge, qui avaient connu la période de pénurie de matériel et d’appareils en tout genre. Conscients de la valeur de ces ressources, ils souhaitent les voir réparer. Les jeunes recommencent à s’y intéresser, mais il existe, entre les deux tranches d’âge, la catégorie des gens qui semblent acquis à la culture de consommation et dont le slogan est « pas de problème, on va en acheter un ou une autre ».
L’idée que les ateliers de réparation participatifs veulent faire passer c’est que le déchet est une bonne chose au mauvais endroit. Dan Sânpetreanu : « Les nouvelles générations constatent que les ressources sont limitées, que le réchauffement global pose problème, tout comme la pollution, les décharges. Et elles se mettent à la recherche de solutions à tout cela. Ces solutions ne sont pas parfaites. Nous n’avons pas de solution à l’échelle du pays tout entier, mais de petits projets convergeant vers le même but et qui essaient de créer une plate-forme, de donner une idée générale pour la société roumaine. Ce qui fait défaut, au niveau formel, c’est une catégorie très importante, à savoir les 4 autres R, qui rendent compte du chemin depuis l’achat jusqu’au recyclage. La question à laquelle il faut répondre c’est de savoir comment maximiser l’effet de ces produits dans la société, avant qu’ils n’arrivent au stade de recyclage, vu que ce dernier consomme lui une certaine quantité d’énergie, nécessaire à rendre utilisable tel ou tel objet. »
La leçon que nous apprend le Repair Café met en lumière le volet social de l’attitude consumériste. Certaines gens qui s’y connaissent en réparations n’ont plus grand-chose à faire, alors que ceux qui se retrouvent en situation de demandeurs d’emploi ou qui ne gagnent pas assez n’ont pas les moyens de s’acheter un objet neuf. Les conséquences, affirment les initiateurs du projet « Repair Café », ne sont pas du tout négligeables. (Trad. Mariana Tudose, Alex Diaconescu)