Le cahier de recettes du Delta du Danube
Le Delta du
Danube est le troisième grand delta d’Europe et le vingt-deuxième au monde. Sa
superficie augmente annuellement de 40 m² et
il abrite des écosystèmes naturels – aquatiques et terrestres – inscrits au
patrimoine de l’UNESCO. Plus récemment, le Delta du Danube a compté parmi les
11 zones protégées du monde choisies pour la Journée internationale de la
biodiversité 2019. Le thème de cette édition était : « Notre biodiversité,
notre nourriture, notre santé » et chaque participant a présenté la
recette d’un plat spécifique. Ce n’est donc pas étonnant que les recettes du
Delta du Danube soient devenues l’objet d’un projet de recherche, réalisé par
l’Association « Letea à l’UNESCO », en collaboration avec le Centre
pour les politiques durables Ecopolis et avec le concours de l’Administration
du fond culturel national (AFCN).
Ana-Maria Cononovici, 05.01.2021, 10:00
Le Delta du
Danube est le troisième grand delta d’Europe et le vingt-deuxième au monde. Sa
superficie augmente annuellement de 40 m² et
il abrite des écosystèmes naturels – aquatiques et terrestres – inscrits au
patrimoine de l’UNESCO. Plus récemment, le Delta du Danube a compté parmi les
11 zones protégées du monde choisies pour la Journée internationale de la
biodiversité 2019. Le thème de cette édition était : « Notre biodiversité,
notre nourriture, notre santé » et chaque participant a présenté la
recette d’un plat spécifique. Ce n’est donc pas étonnant que les recettes du
Delta du Danube soient devenues l’objet d’un projet de recherche, réalisé par
l’Association « Letea à l’UNESCO », en collaboration avec le Centre
pour les politiques durables Ecopolis et avec le concours de l’Administration
du fond culturel national (AFCN).
La coordinatrice du projet « Le cahier
de recettes du Delta », Loredana Pană, nous en parle : « Nous avons mis en œuvre le projet
cet été, dans l’une des communes les plus isolées du Delta :C.A.Rosetti. J’y suis allée
accompagnée du groupe Mixer, qui est constitué de deux artistes – Ana
Botezatu et Corina Bucea. Notre but était de réaliser une recherche sur le
terrain. Nous avons invité 10 femmes des 4 villages de la commune – Letea,
Periprava, Sfiștofca et Rosetti – et nous leur avons demandé de nous parler de
leur façon de faire la cuisine et de leurs recettes préférées. Nous avons voulu
savoir aussi quelle était l’origine des plats et comment elles avaient appris à
les préparer. Il est important de savoir que cette commune est caractérisée par
une grande diversité ethnique. Nous avons donc parlé à des membres de la
communauté des Ukrainiens, de la communauté des Russes lipovènes et de la
communauté des Roumains, en essayant de voir comment les recettes ont été
influencées par les différentes ethnies. Ce qui a confirmé l’existence d’une très
bonne communication entre ces groupes ethniques, et nous avons obtenu des
informations précieuses. Les résultats de notre recherche figurent sur la
plateforme du projet. »
Quels sont donc
les résultats de cette recherche minutieuse effectuée sur le terrain ? Loredana
Pană : « Il s’agit d’enregistrements
vidéo, de montages audio, de photos et d’extraits des entretiens que nous avons
eus avec ces femmes. Sur notre site est également à retrouver un cahier de 160
pages, que nous allons d’ailleurs faire imprimer, où nous avons inséré des
fragments de ces entretiens, des recettes, ainsi que des copies des cahiers de
recettes de nos interlocutrices, cahiers qui ont d’ailleurs constitué le point
de départ de notre dialogue. »
Sur le site se
retrouvent des photos de ces vieux cahiers de recettes écrites à la main, ainsi
que les recettes qu’ils contiennent : omelette économique à la levure,
pour obtenir une plus grande omelette en utilisant moins d’œufs, différents desserts
comme, par exemple, les bombons aux noix et les éclairs. Les recettes de plats spécifiques
de la région – à base de poisson, évidemment – ne manquent pas : pommes de
terre au four accompagnées d’œufs de poisson et de foie de maquereau ou bien
carpe grillée. L’idée de ce projet n’est pas nouvelle. Loredana Pană explique : « Cette idée est née d’un entretien
avec les artistes Ana Botezatu et Corina Bucea. Elles ont mis initialement en
œuvre ce projet dans la région de Cluj, en Transylvanie, et nous l’avons trouvé
excellent. Nous avons donc souhaité le continuer au Delta du Danube. Une
exposition était prévue à Bucarest et à Cluj, mais, malheureusement, dans les
conditions actuelles, ce n’était plus possible. Nous avons été obligées de tout
transférer en ligne, ce que je regrette beaucoup. Le bon côté de cette nouvelle
formule, c’est que les matériels seront ainsi archivés et le public aura libre
accès à tous les documents du projet. »
Nous avons
invité Loredana Pană à partager avec nous sa découverte du Delta : « Ce que j’ai toujours aimé et que
j’ai pu remarquer une fois de plus, c’est que le Delta a une certaine
fragilité. Le fait qu’il est la terre géographiquement la plus jeune du pays,
en train de se former, d’une année à l’autre, qu’il émerge, en fait, des eaux,
lui confère un charme à part. Et ce charme est à retrouver dans toutes les
traditions des gens des lieux – leur cuisine comprise. Par exemple, dans les
villages du Delta, les maisons sont toutes construites avec très peu de matériaux,
pour que, si le niveau des eaux monte, on puisse tout laisser et partir. Avec
la cuisine, c’est pareil. On prépare la nourriture avec très peu d’ingrédients.
La recette du bortsch de poisson, par exemple, a été enrichie, de nos jours, à
l’intention des touristes, mais, le bortsch tel que les grands-parents le
préparait ne contenait que du poisson, des pommes de terre et de l’oignon. C’était
les seuls légumes utilisés – peut-être aussi parce que, très probablement, ils
n’en avaient pas d’autres – et s’ils veulent préparer leur bortsch à
l’ancienne, c’est tout ce qu’ils mettent dedans. Entre temps, les choses ont
changé. En principe, les recettes des habitants du delta sont simples, sans
trop de légumes, peut-être parce qu’ils n’en avaient pas beaucoup. Les pêcheurs
préparaient leur bortsch sur place et ils pouvaient le faire, même s’ils
restaient au milieu des eaux pendant des semaines. Toutes les femmes avec
lesquelles j’ai parlé m’ont dit que le secret, c’était le poisson frais. »
Et Loredana Pană
m’a fait venir l’eau à la bouche avec une recette qu’elle préfère parmi toutes celles
découvertes au Delta : « J’ai beaucoup aimé le bortsch
rouge russe, de betterave et de choux. On peut le préparer avec ou sans viande.
La recette est à retrouver dans le cahier que nous avons publié. »
Nous y
découvrirons de vieux plats de pêcheurs, pour une vie plus savoureuse. (Trad. Dominique)