La Ford V8 et autres motosaures
Les voitures anciennes. Qui est-ce qui ne les connaît pas ? On les a vues au cinéma, vedettes muettes de reconstitutions du début du 20e siècle. On les voit encore dans des collections privées et même dans des musées. Nombre de gens ignorent un détail qu’un passionné de ces véhicules nous a révélé : des voitures Ford étaient fabriquées en Roumanie pendant l’entre-deux-guerres et plusieurs d’entre elles sont en cours de restauration.
Ana-Maria Cononovici, 21.05.2019, 13:14
Les voitures anciennes. Qui est-ce qui ne les connaît pas ? On les a vues au cinéma, vedettes muettes de reconstitutions du début du 20e siècle. On les voit encore dans des collections privées et même dans des musées. Nombre de gens ignorent un détail qu’un passionné de ces véhicules nous a révélé : des voitures Ford étaient fabriquées en Roumanie pendant l’entre-deux-guerres et plusieurs d’entre elles sont en cours de restauration.
Vlad Capotescu, pendant 10 ans président de la filiale Retromobil Timiş et actuellement membre de la Commission de culture de l’association nationale, raconte l’histoire de la Ford : « Henry Ford a littéralement mis le monde sur 4 roues, pour ainsi dire. Avant l’apparition, en 1907, de la Ford T, 95% des gens du monde entier se déplaçaient toute la vie dans un rayon d’une centaine de km autour de leur localité d’origine. A compter de ce moment, les gens se sont mis à voyager, les relations économiques et commerciales se sont développées et le monde a commencé à bouger. La Ford T a donné un coup de pouce à l’économie américaine. En 1930, lorsqu’il a accordé une interview au Figaro, Henry Ford produisait 7.500 voitures par jour. La même année, quand ces automobiles ont fait leur entrée en Europe, on envisageait l’ouverture d’une entreprise, mais l’endroit n’était pas encore choisi. La construction de l’entreprise fut approuvée en 1934. C’était un projet extrêmement moderne pour l’époque, signé par l’architecte et professeur roumain Duiliu Marcu. Un terrain a été acheté à Bucarest, avenue Floreasca, et la société fut baptisée Ford România SAR. Selon les informations dont nous disposons, en 1935 commença l’assemblage du modèle V 8 1935. Une année plus tard fut assemblé le modèle 1936. Sur les plaques d’identification on pouvait lire : Ford România. »
C’est sur la structure des moteurs V8 qu’ont été construits les moteurs des premières voitures tout terrain fabriquées en Roumanie : IMS 57 et Aro M461. Retour au présent avec Vlad Capotescu : « Actuellement, la situation est un peu triste. Les voitures anciennes sont entre « L’extase et l’agonie », si vous voulez. L’agonie a commencé après 1990, lorsque, dans le chaos législatif qui a suivi la chute du communisme, la plupart des voitures anciennes, auxquelles les films de Sergiu Nicolaescu nous avaient habitués, ont quitté le pays. Jusqu’à l’adhésion de la Roumanie à l’UE, en 2007, il n’y a pas eu de loi qui protège les véhicules historiques. Devenue membre de l’UE, la Roumanie a dû adopter des mesures de protection des automobiles de collection, qui appartiennent au patrimoine universel de l’UNESCO. L’association Retromobil est devenue membre de la Fédération internationale des véhicules anciens et les collectionneurs roumains ont pu reconstituer leurs papiers pour les véhicules historiques qu’ils possédaient, ils pouvaient importer de telles voitures et, à présent, c’est « l’extase » : les autos anciennes retournent au pays. La Roumanie compte actuellement 2.500 véhicules d’époque, enregistrés comme tels. »
Si nous comparons notre situation à celle de la Slovénie, qui compte 2 millions d’habitants et 8.000 véhicules historiques, c’est peu. Vlad Capotescu précise : « Pour être enregistrée comme véhicule historique, la voiture doit être d’origine et en parfait état, c’est-à-dire que, du point de vue technique et visuel, elle soit comme neuve, comme si elle venait de sortir par la porte de l’entreprise productrice. C’est la condition imposée au niveau européen. Toute vieille bagnole n’est pas un véhicule historique. L’installation d’un système de signalisation – si elle n’en a pas eu un – est la seule modification admise et obligatoire à apporter à une telle voiture. Pour le reste, le véhicule doit être d’origine. »
12 ou 13 voitures Ford V8 sont actuellement enregistrées en Roumanie, mais elles sont en très mauvais état. Vlad Capotescu nous donne pourtant aussi une bonne nouvelle : « 3 ou 4 voitures anciennes sont en cours de restauration et nous espérons les voir rouler, les prochaines années. S’y ajoutent une dizaine d’autres automobiles Ford V8 qui ont été importées et qui sont quasiment identiques à celles que l’on fabriquait en Roumanie dans les années ’30. Celles-ci sont en bon état et elles ont été enregistrées comme des véhicules historiques. Pourtant, parmi les voitures Ford fabriquées en Roumanie, aucune n’est actuellement en état de fonctionnement. Il faut être passionné pour les remettre en état. Moi, en tant qu’économiste, je peux dire que ce n’est pas rentable. »
En effet, la restauration d’une telle voiture coûte le double du prix d’achat. Et pourtant, les voitures d’époque de Roumanie se préparent pour la fête. Vlad Capotescu : « Le 1er juin nous nous rappellerons le premier concours international automobile du Banat, vaste région du sud-ouest de la Roumanie, qui s’étend aussi au-delà des frontières du pays. Ce concours a eu lieu les 19 et 20 mai 1930. Ce fut le premier concours organisé sous les auspices de la Maison royale. Y ont participé, entre autres, le prince Ghica et le prince Nicolae. Le lendemain a eu lieu le premier concours d’élégance de Roumanie, 4 ans avant celui de Sinaia. 6 voitures ont participé au concours automobile et 6 autres au concours d’élégance. Nous souhaitons à présent réunir dans la région du Banat le plus grand nombre possible de voitures datant de l’entre-deux-guerres. 7 équipages roumains se sont inscrits jusqu’ici et nous attendons les confirmations de nos partenaires de Hongrie et de Serbie. Tout le Banat se donne rendez-vous à Timişoara. Le concours sera atypique, car il n’y aura pas de rallye proprement dit, mais plutôt des épreuves amusantes pour les chauffeurs : une course à obstacles en marche avant et en marche arrière, car ces voitures ne sont pas faciles à manœuvrer. L’année prochaine, quand nous fêterons les 90 ans depuis le premier concours, nous allons organiser, avec nos partenaires de Hongrie et de Serbie, un véritable rallye dans le triangle du Banat. »
Une fois de plus, le concours automobile de Timişoara a lieu avant celui de Sinaia. Le Club Retromobil Roumanie organise le samedi, 29 juin, la 9e édition du Concours d’élégance de Sinaia, avec, pour invitées, toujours les voitures d’époque. (Trad. : Dominique)