La correspondance comme art et liant entre les générations
Le Musée national d’art contemporain de
Bucarest (MNAC) continue d’être près des gens. Cette fois-ci, un nouveau projet
a attiré notre attention. Baptisé « L’art par correspondance », il vise à
tisser des liens authentiques entre les seniors, les enfants et l’art contemporain,
d’abord à travers une série d’activités pilotes. Démarrées en janvier 2021,
elles font partie d’une démarche de longue haleine. En clair, il s’agit de
faciliter les échanges entre enfants et seniors par le biais de la
correspondance, de créer des liens émotionnels entre eux, mais aussi avec l’art
contemporain, à une époque où la solitude pèse lourd, surtout sur les
communautés isolées.
Ana-Maria Cononovici, 20.04.2021, 12:08
Le Musée national d’art contemporain de
Bucarest (MNAC) continue d’être près des gens. Cette fois-ci, un nouveau projet
a attiré notre attention. Baptisé « L’art par correspondance », il vise à
tisser des liens authentiques entre les seniors, les enfants et l’art contemporain,
d’abord à travers une série d’activités pilotes. Démarrées en janvier 2021,
elles font partie d’une démarche de longue haleine. En clair, il s’agit de
faciliter les échanges entre enfants et seniors par le biais de la
correspondance, de créer des liens émotionnels entre eux, mais aussi avec l’art
contemporain, à une époque où la solitude pèse lourd, surtout sur les
communautés isolées.
Mălina Ionescu, responsable du volet
éducation au sein du Musée national d’art contemporain de Bucarest, explique : « Ce
modèle de collaboration est largement utilisé à l’étranger, depuis un certain
temps. Notre programme « Community Art » s’adresse aux milieux scolaires en
général, mais nous essayons également d’atteindre les communautés scolaires qui
n’ont pas la possibilité de venir ici, à savoir les communautés défavorisées ou
celles qui n’habitent pas Bucarest. Comme nous connaissons les enfants de
Teach for Romania et les seniors de Seneca Anticafe,
nous avons pensé que le musée pourrait très bien jouer le rôle de liant entre
eux. Ce liant est donc la correspondance, car, malheureusement, pour le moment,
la visite du musée et le contact direct entre les deux groupes de bénéficiaires
sont impossibles dans le contexte de la crise sanitaire actuelle. »
Notons que Seneca Anticafe est une
librairie en ligne dont une partie des recettes sert à envoyer des colis
alimentaires aux personnes âgées ; Teach for Romania,c’est le
nom du programme qui aide les jeunes dont le talent et les aptitudes leur
permettront de devenir des enseignants inspirants, promoteurs d’une pédagogie
innovante.
Le projet se propose de créer des équipes
formées de seniors et de juniors qui, six mois durant, échangent leurs
réflexions par le biais des lettres. Les enfants ont appris des notions d’art
contemporain à partir desquelles ils ont écrit des lettres à thème, lors d’un
atelier virtuel, organisé sur Zoom.
Mălina Ionescu, notre interlocutrice, détaille
: « Jusqu’à présent, nous n’avons eu qu’un seul atelier, pendant lequel
les enfants ont présenté aux seniors l’ensemble du projet. Nous leur avons
proposé la correspondance comme moyen de créer des liens entre des personnes
appartenant à des tranches d’âge qui pourraient leur être très familières :
petits-enfants, pour les seniors et grands-parents, pour les enfants. Ils ont
donc endossé ces rôles et ont, bien sûr, interagi en tant qu’amis éloignés. Le
projet a commencé avec les enfants. Lors du premier atelier, nous leur avons
expliqué ce que signifie une correspondance, en général. N’oublions pas que la
notion de courrier n’est plus si familière de nos jours, vu que la
communication est presque entièrement numérique. Nous avons également parlé de
la façon dont une lettre peut devenir une forme d’art. Et là, on se réfère tant
à la lettre en soi qu’à l’expédition de la missive. Le projet n’en est qu’à ses
débuts. »
La phase pilote du projet rassemble 30 seniors
seuls de Giurgiu, inscrits dans le programme « Nos grands-parents »,
et 30 enfants de 12 à 13 ans, de deux écoles des villages de Herăști et
Izvoarele, du département de Giurgiu, incluses dans le programme « Teach
for Romania ».
L’enthousiasme initial mis à part, on
ignore comment cette correspondance va se dérouler, avoue Mălina Ionescu, qui ajoute
: « La première proposition était de considérer que la lettre est en
elle-même une forme d’art, au-delà, bien sûr, de son tout premier rôle, à
savoir celui de vecteur de communication. Communiquer par des lettres, c’est
quelque chose de nouveau pour les enfants. Notre approche légèrement différente
de ce qu’est la correspondance postale, à savoir la lettre, l’enveloppe et
l’envoi postal a représenté le premier pas vers la notion de mail-art. La
lettre peut devenir une forme d’expression artistique, lorsqu’on se rapporte au
signe graphique comme à une image, autrement dit si l’on s’intéresse non
seulement au contenu, mais aussi à la forme qui l’accompagne. Pour les enfants,
le papier à lettre et l’enveloppe sont devenus des feuilles à couvrir de
dessins, de peintures. Nous leur avons présenté plusieurs exemples de jeu avec
l’enveloppe et l’écriture. On leur a également fourni des crayons de couleur et
de l’encre de différents types pour qu’ils puissent aller au-delà d’une simple
lettre où tout ce qui compte, c’est le message transmis par les mots. »
Mălina Ionescu nous a parlé de la
prochaine étape du projet : « Nous espérons que les seniors seront très
réceptifs, qu’ils se laisseront prendre au jeu. Nous souhaitons qu’ils prennent
plaisir à échanger avec les juniors, qu’ils portent un regard différent sur la
correspondance postale et qu’ils comprennent que la lettre peut servir de forme
d’expression personnelle. Pour la prochaine étape, notre objectif c’est
d’organiser, lorsque ce sera possible, des rencontres entre seniors et juniors,
par le biais des visites du musée et des ateliers, qui permettront aux gens de
se rapprocher les uns des autres, mais aussi du musée. »
Dans les mois qui viennent, les enfants
pourront participer à un atelier Zoom pour fabriquer différents objets et
écrire des lettres, qui parviendront aux seniors au même moment où ils
recevront le colis alimentaire envoyé régulièrement par Seneca. L’échange de
lettres sera possible grâce aux bénévoles de Seneca et de Teach for Romania. (Trad. Mariana Tudose)