La bibliothérapie
Bien que la lecture semble attirer de moins en moins de personnes, ces derniers temps, la bibliothérapie commence, elle, à susciter de l’intérêt. C’est une offre nouvelle sur le marché roumain du livre, même si l’idée n’est pas récente. Alexandra Rusu, éditrice et bibliothérapeute, explique. «La bibliothérapie n’est pas une idée qui nous appartient. C’est une pratique qui est apparue aux Etats-Unis, dans les années 1920, en tant que branche de la psychothérapie. La bibliothérapie consiste à recommander à une certaine personne la lecture de certains livres, en fonction de ses caractéristiques psychologiques. Et il y a des études qui prouvent que cela donne de bons résultats. Aux Etats-Unis, cette thérapie par les livres a été utilisée, il y a des années, pour aider les vétérans de la guerre du Vietnam, qui souffraient de stress post-traumatique – et il paraît qu’ils lisaient beaucoup Jane Austin. Ce furent-là les débuts de la bibliothérapie. Au fil du temps, la pratique s’est déplacée vers la psychothérapie, les éditeurs et surtout les libraires. A un moment donné, les libraires ont commencé à pratiquer la bibliothérapie, sous différentes formes, notamment par la recommandation personnalisée de certaines lectures. En fait, à mon avis, nous la pratiquons tous, et depuis longtemps, d’une façon ou d’une autre, lorsque nous recommandons un livre à quelqu’un dans un certain but, en connaissant bien la structure psychologique de la personne en question. »
Ana-Maria Cononovici, 03.12.2019, 13:17
Bien que la lecture semble attirer de moins en moins de personnes, ces derniers temps, la bibliothérapie commence, elle, à susciter de l’intérêt. C’est une offre nouvelle sur le marché roumain du livre, même si l’idée n’est pas récente. Alexandra Rusu, éditrice et bibliothérapeute, explique. «La bibliothérapie n’est pas une idée qui nous appartient. C’est une pratique qui est apparue aux Etats-Unis, dans les années 1920, en tant que branche de la psychothérapie. La bibliothérapie consiste à recommander à une certaine personne la lecture de certains livres, en fonction de ses caractéristiques psychologiques. Et il y a des études qui prouvent que cela donne de bons résultats. Aux Etats-Unis, cette thérapie par les livres a été utilisée, il y a des années, pour aider les vétérans de la guerre du Vietnam, qui souffraient de stress post-traumatique – et il paraît qu’ils lisaient beaucoup Jane Austin. Ce furent-là les débuts de la bibliothérapie. Au fil du temps, la pratique s’est déplacée vers la psychothérapie, les éditeurs et surtout les libraires. A un moment donné, les libraires ont commencé à pratiquer la bibliothérapie, sous différentes formes, notamment par la recommandation personnalisée de certaines lectures. En fait, à mon avis, nous la pratiquons tous, et depuis longtemps, d’une façon ou d’une autre, lorsque nous recommandons un livre à quelqu’un dans un certain but, en connaissant bien la structure psychologique de la personne en question. »
Si le concept est ancien, le projet lancé par notre interlocutrice est nouveau. « Tout a commencé par des rencontres – à présent en tête-à-tête – avec des personnes, comme dans une séance de psychothérapie, pourtant sans rapport avec celle-ci. Ce sont des séances de développement personnel. Moi, je suis psychologue, psychothérapeute et éditrice. Mes recommandations reposent sur mon expérience de lectrice professionnelle et je les fais à la suite d’un entretien libre avec une personne – homme ou femme – qui se propose d’atteindre certains objectifs, qui souhaite obtenir quelque chose de précis par ses lectures, à un certain moment de sa vie. Il faut dire que jusqu’ici, ce sont uniquement des femmes qui se sont présentées à ces rendez-vous bibliothérapeuthiques. »
Pourquoi et quand les gens choisissent-ils la bibliothérapie ? Alexandra Rusu. « Les raisons qui les amènent sont multiples. Pour la plupart, ce sont des femmes qui vivent une crise existentielle – soit une crise de milieu de vie, soit elles sont devenues mères pour la première fois ou pour la deuxième fois ou bien il leur arrive quelque chose qui marque une rupture avec le passé ou un passage vers autre chose. Et elles cherchent des réponses dans les livres. Des fois, leurs amis leur font des recommandations, mais elles semblent avoir besoin de lire des livres sur certains thèmes, qui les intéressent et qu’elles ont déjà formulés, d’une certaine façon. Je suis prête à aider éventuellement la personne à découvrir quel est le thème qui la préoccupe, pourtant, en venant chez moi, la plupart le savent déjà clairement. J’ai également eu en consultation des personnes, moins nombreuses, qui viennent parce qu’elles souhaitent orienter leur vie professionnelle vers un certain domaine et elles ont besoin de lire des ouvrages spécialisés. Maintenant, bien sûr, ce sont elles les experts et pas moi, mais elles ont besoin de livres qui ouvrent leur horizon. »
En général on pense que certains livres sont appropriés pour un certain âge et moins pour un autre. Alexandra Rusu ne croit pas à ces étiquettes. « J’ai récemment eu une discussion, à propos des enfants et des adolescents, de ces étiquettes qu’utilisent les maisons d’éditions et les librairies : livres pour enfants, livres jeunesse etc. Et je me souviens qu’en fait les livres de notre adolescence ont été pour la plupart des livres pour adultes, placés de nos jours très loin sur l’étagère réservée aux livres jeunesse. Je trouve que ces étiquettes sont un peu artificielles. Elles ont leur efficacité, elles sont utiles quand on est pressé ou quand on cherche quelque chose écrit d’après un certain modèle. Pourtant, quand notre quête est profonde, ces étiquettes ne servent pas à grand-chose, même pas pour choisir un livre pour un enfant. Beaucoup de livres pour enfants sont écrits pas des adultes pour les adultes, ils ont un double registre et leur humour s’adresse plutôt aux adultes qu’aux tous petits. Par contre, certains livres pour adultes contiennent beaucoup de poésie et les enfants goûtent beaucoup la poésie dadaïste, par exemple. Ces catégories sont donc interchangeables et il faut goûter à tout pour trouver quelque chose qui soit pertinent pour soi-même. »
Nous avons lancé à Alexandra Rusu un défi : nous conseiller un livre approprié pour nous tous. Et elle nous a proposé « La vie secrète des arbres » (Das geheime Leben der Bräume) de Peter Wohlleben. Pourquoi ? « Parce que c’est un livre très intéressant pour les Roumains d’environ 35 ans, pour les personnes de mon âge. C’est un livre très intéressant sur la vie secrète des arbres, sur les forêts, dans les conditions où nous sommes bombardés de tous les côtés par toutes sortes d’informations. C’est surprenant, mais en fait les forêts sont des communautés dont nous savons très peu de choses. Les arbres communiquent entre eux. Il y a toute une histoire sur les arbres qui bénéficient de plus de soleil et sur d’autres qui vivent dans l’ombre, sur la façon dont certains perdent leurs feuilles ou leurs branches, pour que les rayons bienfaisants et nourrissants du soleil puissent arriver jusqu’aux arbres qui sont en souffrance. Je vous recommande ce livre, je pense que nous pouvons beaucoup apprendre en le lisant. Ce n’est pas seulement un livre sur la biologie, c’est un ouvrage sur la communauté, sur le vivre ensemble. »
C’était donc une première rencontre avec la bibliothérapie et le premier livre qui nous aidera à mieux vivre est une allégorie de la survie humaine. (Trad. : Dominique)