Glace parfum amour
L’histoire de la crème glacée commence à l’époque de gloire de l’Empire romain lorsque ce délice n’était réservé qu’à une poignée de gens. Plus tard, au Moyen Age, durant ses voyages en Orient, Marco Polo a à son tour découvert la glace et l’a apportée ensuite en Europe. Dans les principautés roumaines, les premières mentions de la crème glacée datent de l’époque du prince régnant Constantin Brancovan, au 18e siècle. D’ailleurs sa cour princière possédait une glacière creusée dans la terre, indispensable pour préparer des sorbets et des crèmes glacées, mais aussi pour tenir au frais de l’eau, des fruits, des sirops et du vin pour les invités du prince régnant.
Ana-Maria Cononovici, 20.08.2017, 13:15
Mihaela Cuturescu a appris l’art de préparer la glace à Bologne pour ouvrir au centre de Bucarest une « gelateria » italienne, adaptée pourtant aux goûts locaux. Comment a commencé toute cette histoire? Ecoutons Mihaela Cuturescu : « Le point de départ de cette histoire a été un moment d’inspiration. Nous avons énormément aimé ce produit, on était vraiment amoureux de glace. Les choses changent sur le marché, selon les tendances. Il y a également des tendances sur le marché alimentaire, nous nous dirigeons vers des produits meilleurs, plus sains, fabriqués avec des ingrédients naturels. La différence majeure réside dans les ingrédients. La glace artisanale a toujours comme ingrédient principal le lait, auquel on ajoute différentes crèmes : de pistaches, de noisettes, de chocolat, de noix de cocos, de fruits de bois. Nous pouvons utiliser toute une série d’ingrédients, mais le plus important c’est le lait, auquel on peut ajouter la crème fraîche. Et c’est ce qui donne ce goût différent, cette texture à part. »
Et même si à première vue, la glace artisanale ressemble à ce que nombre de grand – mères roumaines préparaient il y a des dizaines d’années, c’est la technologie moderne qui rend ce produit encore plus crémeux et savoureux. Sachez pourtant que pour préparer de la glace artisanale, il faut suivre des cours. D’ailleurs en Italie, il y a même une Université spécialisée, raconte Mihaela Cuturescu : « C’est à Carpigiani que la glace a été portée à des niveaux supérieurs de raffinement. Il y a un musée de la glace et des cours sont également organisés. Les Italiens ont une tradition vieille de plusieurs centaines d’années pour ce qui est de la fabrication de la glace. D’ailleurs, la glace industrielle est assez rare en Italie. Lors des cours que j’ai faits, j’ai découvert que les goûts varient selon les différentes régions géographies d’Italie. Actuellement, nous ne cessons d’apprendre des choses nouvelles. Si à Bologne il y a environ 200 fabricants artisanaux de gelato, en Roumanie il y en a 200 à travers le pays. »
Qu’est-ce que Mihaela Cuturescu a appris de spécial en Italie ? « Il y a en Italie des cours s’adressant tant aux artisans débutants qu’aux artisans chevronnés, où l’on apprend à balancer les goûts du produit. C’est ça le secret du goût, l’équilibre. Ils ont des spécialistes qui font des glaces depuis des dizaines d’années et qui ont commencé à enseigner cet art aux autres. J’ai participé à la présentation de toute sorte d’innovations. Parmi elles, transformer la glace d’un dessert en une entrée digne d’un restaurant aux étoiles Michelin. Ils imaginent des glaces à base de fromage, de saumon, toute sorte de choses inédites. Il faut bien tester tout, puisque c’est là un autre secret du métier. Et tout commence par les ingrédients : une crème glacée à la pistache peut être déclinée en plusieurs variantes. Au moment où l’on choisit une crème de pistaches, il faut avoir déjà terminé un cours d’analyse sensorielle, afin de mieux comprendre ce qu’il faut goûter. Une crème de pistaches est très concentrée et pour la diluer il faut bien connaître les proportions. 10 grammes de plus ou de moins peuvent faire une énorme différence pour un kilo de glace. Les Italiens disent qu’une recette d’Italie ne peut pas être reproduite en Roumanie ou dans n’importe quel autre pays. Le lait est différent, le goût des gens est différent et il faut expérimenter : réduire la quantité d’un ingrédient de 5 grammes, ajouter 5 grammes d’un autre. Et si j’ajoutais un peu de basilic ou bien si je mettais un peu plus de sel au caramel? Voilà comment se déroule ce jeu ! »
Mihaela Cuturescu explique aussi quelles sont les tendances chez les Roumains en matière de goût : « En Roumanie, on joue avec les ingrédients standard dans tout ce qui tient à la fabrication de la glace. J’ai commencé l’année dernière par les crèmes, de noisettes et de pistaches. Personnellement, je préfère les glaces plus difficiles à fabriquer. Afin de satisfaire les préférences des Roumains, nous avons également essayé de préparer des sorbets aux fruits de bois, au citron, à la limette, ou bien des yaourts gelés au citron, au chocolat et à la vanille, soit des variétés qui abondent chez nous. Et nous fabriquons aussi des glaces qui reproduisent les produits industriels avec des ingrédients naturels. »
Mais afin de créer son propre marché et éduquer le goût des clients, les créateurs de glace artisanale doivent se guider d’après les goûts qui rappellent quelque chose de connu aux consommateurs, avant de les orienter vers des saveurs inédites : « Les Roumains préfèrent les goûts exquis, ils ne choisissent pas les saveurs classiques, telle que la vanille au chocolat, parce qu’ils ont déjà goûté à ce mélange dans les produits industriels. Ils préféreraient les noisettes, les pistaches, le chocolat. Le goût nouveau doit absolument partir d’une saveur connue. Nous avons déjà fait plusieurs essais et à présent nous cherchons à faire une glace au fromage bleu, dont j’ai goûté en Italie. Nous tâchons de la combiner avec du miel, car il faut toujours innover, même si ça peut paraître bizarre. »
Et puisque le beau temps est en train de s’installer en Roumanie, il ne nous reste qu’à essayer deux ou trois boules de gelato. De toute façon, il est carrément impossible d’en manger plus, car la crème glacée artisanale est très dense et rassasiante. (trad. : Alex Diaconescu)