Feel Your Food (Sentez votre nourriture)
Les élèves du lycée « Onisifor Ghibu » de Cluj-Napoca (centre-ouest) ont mis en œuvre un projet visant à rendre accessibles aux malvoyants les menus de 7 restaurants de la ville, dorénavant écrits aussi en Braille. Le projet FeelYourMenu (Sentez votre menu) est né du désir de ces jeunes de rendre meilleur le monde où nous vivons.
Ana-Maria Cononovici, 09.09.2018, 11:40
Le responsable du projet, Marius Mariş, nous raconte leur histoire : « L’idée nous est venue lorsque nous avons commencé à organiser la 8e édition de notre festival humanitaire, GhibStock, qui se tient dans la cour du lycée « Onisifor Ghibu ». A chaque nouvelle édition, nous, les jeunes, nous essayions d’identifier un besoin de la communauté. Et ce qui est le plus intéressant, c’est que la communauté de Cluj a commencé à s’impliquer. Chaque année nous organisons le plus grand festival roumain de musique dans la cour d’un lycée et le premier de ce genre organisé dans le pays. Il nous sert à soutenir une cause. Cette année, notre cause était « Feel Your City » – Sentez votre ville. Il s’agissait de rendre la ville de Cluj-Napoca plus accessible à ses habitants et aux touristes. Chaque année, c’est quelque chose de nouveau. L’année dernière nous avons mis en œuvre un projet au bénéfice des enfants du milieu rural, pour leur prouver leurs potentialités et les sortir de leur zone de confort. Une autre campagne visait à faire découvrir aux jeunes les traditions. Chaque année nous identifions un problème que nous essayons de résoudre. Des projets sont conçus et mis en œuvre par des jeunes. »
Cet événement, réalisé par des élèves et pour les élèves, est unique à Cluj-Napoca. Les fonds collectés sont utlisés pour répondre à une nécessité de la communauté. Cette fois-ci, il s’agissait de rendre la ville plus accessible.
Marius Mariş : « Cluj est une des 3 villes du pays où il existe des lycées et des universités pour malvoyants. De ce fait, la ville compte 2 mille personnes malvoyantes. Or, souvent l’accessibilité des sites publics est négligée. Certains pensent peut-être que ce n’est pas un problème. Nous avons posé des questions et nous avons constaté que c’était effectivement un problème et que ce problème n’était pas si difficile à résoudre. Un petit détail, comme l’introduction de menus en Braille, pouvait faire la différence. La mise en œuvre du projet a été due, pour la plupart, aux lycéens. Notre club s’appelle « Impact », c’est un club d’initiative communautaire, les élèves y proposent de projets pour la communauté, les mettent en œuvre et utilisent cette occasion comme une opportunité d’apprentissage. En mettant sur pied de tels projets, ils apprennent beaucoup de choses qui viennent compléter les connaissances qu’ils acquièrent à l’école. Et, en effet, quand on voit des enfants lancer de telles idées, remarquer des choses que les adultes ne voient pas, cela nous donne de l’espoir, car cela prouve leurs potentialités et le potentiel des générations à venir. »
De l’avis de Marius Mariş, le plus grand défi est de faire comprendre aux gens l’accessibilité : « Tout projet d’accessibilisation apporte une valeur ajoutée, en rapprochant les membres de la communauté, parce que souvent on a tendance à ignorer certaines catégories de personnes. Améliorer l’accessibilité, ce n’est pas uniquement créer des facilités pour les personnes touchées par des déficiences, c’est aussi créer une unité, une sorte de grande famille au sein de la ville. Toutes les personnes touchées par des déficiences qui ont participé à notre projet ont été ravies et elles attendent la suite avec impatience. »
Comment des jeunes ont-ils réussi à identifier un problème au sein de la communauté et se proposer à le résoudre? Marius Mariş explique : « Nous avons pu identifier le problème parce que nous avons posé des questions. Le plus important pour résoudre un problème, c’est de demander au bénéficiaire s’il a besoin de ce que l’on a l’intention de faire. Ma tante est malvoyante et elle m’a dit que c’était très difficile pour elle. Quand elle va au restaurant, le serveur n’a pas la patience de lui expliquer tout le menu et les ingrédients de chaque plat. Alors elle finit toujours par commander un plat qu’elle connaît, par exemple du poulet aux frites. En essayant de convaincre les restaurants à insérer le menu en Braille, nous donnons aux malvoyants la possibilité de choisir – chose tout à fait normale. Et ils éprouvent un sentiment de liberté. Ils nous l’ont d’ailleurs dit. Et c’est réjouissant pour nous. Ce n’est pas si compliqué, beaucoup de restaurants de Roumanie pourraient le faire, cela ne suppose pas une grande dépense. En introduisant les menus en Braille à Cluj, nous prouvons que c’est possible et ça peut inspirer les autres. »
Outre l’extension du projet des menus en Braille, acceptés jusqu’ici par 7 restaurants, les élèves de Cluj se proposent également d’accroître l’accessibilité des musées de la ville et d’organiser une colonie informelle destinée aux élèves du lycée pour malvoyants. (Trad. : Dominique)