Des héros et leurs anges gardiens
« Là, nous grimpions dans le mirabellier, là, nous avons élevé des dizaines de chiens, là, on nous a battus. » C’est l’histoire de plusieurs personnes qui ont passé leur enfance dans un orphelinat et qui sont actuellement trentenaires. Parmi elles, une jeune fille ayant l’allure d’un garçon, mais très ouverte dès qu’elle arrive à vous connaître. Ce sont les personnages d’un film documentaire : « Le petit robot en or » (réalisé en 2015 par Mihai Dragolea et Radu Mocanu). Un film sur la vie, sur la souffrance et sur la façon dont les anges qui veillent sur nous peuvent changer notre destinée.
Ana-Maria Cononovici, 04.02.2018, 13:41
« Là, nous grimpions dans le mirabellier, là, nous avons élevé des dizaines de chiens, là, on nous a battus. » C’est l’histoire de plusieurs personnes qui ont passé leur enfance dans un orphelinat et qui sont actuellement trentenaires. Parmi elles, une jeune fille ayant l’allure d’un garçon, mais très ouverte dès qu’elle arrive à vous connaître. Ce sont les personnages d’un film documentaire : « Le petit robot en or » (réalisé en 2015 par Mihai Dragolea et Radu Mocanu). Un film sur la vie, sur la souffrance et sur la façon dont les anges qui veillent sur nous peuvent changer notre destinée.
L’héroïne du documentaire, la boxeuse Stela Duţă, est celle qui a attiré aussi notre attention.« J’ai été élevée dans un orphelinat, dès ma naissance, et c’est là que j’ai appris à être dure. Le milieu dans lequel j’ai grandi m’a rendu apte pour ce sport. Je me suis battue à l’orphelinat, dans les clubs et les discothèques, car je devais me défendre. Je ne veux pas me faire remarquer et montrer que je pratique ce sport. Les gens qui me voient dans la rue pensent que je suis un garçon et je ne les détrompe pas ; c’est peut-être pourquoi on s’en prend à moi, surtout que je suis petite » – affirme Stela dans ce film où elle raconte le changement survenu dans sa vie.
Steluţa Duţă est née le 18 mars 1982, à Râmnicu Sărat, dans le comté de Buzău, dans l’Est du pays. Abandonnée à sa naissance, elle a été envoyée à l’orphelinat de Buzău, ensuite elle a été accueillie aux centres de placement de Buzău et de Stâlpu et à l’établissement de l’église de Câmpeni, qu’elle a dû quitter à l’âge de 18 ans, se retrouvant à la rue. Par peur d’être agressée, Steluţa a toujours coupé ses cheveux très courts et elle a adopté le comportement d’un garçon.
Même à présent, elle ne dit à personne qu’elle est une femme. En 2002, elle a rencontré Constantin Voicilaş, entraîneur de boxe au Club sportif de Buzău, qui est finalement devenu son père adoptif. Après quelques mois d’entraînement, elle est devenue vice-championne nationale. Parallèlement, elle a repris ses études et terminé le lycée sportif de Buzău et l’école d’entraîneurs. Constantin Voicilaş n’a pas réussi à réaliser les performances qu’il souhaitait en tant que boxeur, mais il espère que ses élèves le feront à sa place. En effet, depuis 43 ans, il a entraîné une cinquantaine de jeunes chaque année et les succès ne se sont pas fait attendre : « Mes meilleurs élèves, je les appelle « les trois mousquetaires », car ils sont trois : un champion du monde juniors – Dinu Bogdan – et deux championnes d’Europe séniors – Stela Duţă et Camelia Negrea. Ce sont mes étalons – et il y en aura d’autres. Nous avons toujours donné des sportifs d’une grande valeur et nous continuerons de le faire. »
Constantin Voicilaş nous raconte l’histoire de sa meilleure sportive, Stela Duţă : « Quand elle est venue pratiquer la boxe, elle se trouvait dans un centre de placement. Ce qui m’a interpellé dès le début, c’était sa volonté d’échapper à ce milieu et de faire quelque chose d’utile. Il faut dire qu’à l’époque on n’accordait pas beaucoup d’attention aux enfants provenant des centres de placement et on ne les respectait pas tellement. Lors des leçons d’initiation, j’ai vu qu’elle était gauchère. Et dès le premier jour de son arrivée, elle a voulu monter sur le ring. Alors, je me suis dit que j’allais peut-être faire de cette enfant une excellente boxeuse. Elle s’est surpassée chaque jour, chaque mois, chaque année. En Roumanie, elle n’a perdu que devant une autre sportive, toujours roumaine, celle dont je vous ai parlé et qui a été championne d’Europe. Depuis 16 ans, personne ne l’a vaincue en Roumanie et peut-être les prochaines 10 années personne ne pourra la vaincre, tant j’ai travaillé avec elle. Après deux entraînements dans la journée, le soir elle me demandait : « Veux-tu faire encore un peu de sparring avec moi ? » Cela se passait après le repas du soir, car je l’ai logée chez moi, je lui assurais les repas – à la salle et chez moi, car elle était un enfant de la rue. Je lui ai accordé toute mon attention. »
Quand Steluţa est en train de boxer, on peut manger tranquillement des graines de tournesol, dans le coin du ring – nous disait aussi Constantin Voicilaş. Elle sait très bien ce qu’elle doit faire et elle fait pleinement son devoir. Quant aux médailles qu’elle a obtenues, elles sont si nombreuses qu’il a de la peine à les énumérer : « Elle a été 15 fois championne nationale séniors. C’est du jamais vu. Trois fois championne de l’UE, trois fois championne d’Europe et trois fois vice-championne du monde. 6 années durant, seule une Indienne l’a vaincue, dans les 3 championnats du monde. »
Et puis, le 16 janvier, Steluţa Duţă a de nouveau triomphé, en Serbie, obtenant la victoire devant la triple championne Alina Turlubayeva (du Kazakhstan) dans la finale dames de la Coupe des nations. (Trad. Dominique)