Ateliers de sculpture sur bois
A l’aide d’outils simples, les artisans taillaient jadis des morceaux de bois de chêne, de noyer, de tilleul, d’acacia, d’osier, pour en faire des meubles, des objets ménagers, qu’ils ornaient souvent d’un fin réseau de motifs décoratifs. Dans l’architecture traditionnelle, ces décorations étaient appliquées aussi aux principaux éléments des maisons ou des églises. Dans les villages roumains, les piliers des vérandas, les encadrements des portes et des fenêtres, jadis en bois, étaient ornés de motifs géométriques. De tels motifs couvraient également les meubles: tables, armoires, chaises, mais aussi coffres de dot ou étagères pour vaisselle. Très simples, les meubles des maisons paysannes étaient parfaitement adaptés à leurs fonctions. Les principaux motifs décoratifs traditionnels étaient la ligne droite, le point, la spirale, la dent, la rosette, la croix, le sapin. Ces motifs décoratifs couvraient également les manches des cuillères en bois, des fauches ou des râteaux à foin.
Ana-Maria Cononovici, 18.03.2018, 15:50
L’association culturelle Artessentia de Braşov se propose de raviver ce monde ancien des objets utilitaires en bois, ornés de motifs traditionnels, et de faire des métiers traditionnels un véritable art. Grâce à cette ONG, la rosette, la dent de loup et le zigzag dévoilent leurs secrets aux personnes passionnées de beauté. Le voyage dans l’univers des symboles protecteurs taillés dans les objets en bois commence par des ateliers d’initiation à cet art. Georgiana Gămălie, membre fondatrice de l’Association Artessentia, explique: « Ce que notre association culturelle propose se trouve à la frontière entre la tradition et l’art. Nous essayons de raviver des métiers anciens propres à notre zone ethnographique: le pays de la Bârsa. Puisque les forêts comptent parmi ses plus importantes ressources, la sculpture sur bois y a toujours été une occupation traditionnelle. C’est pourquoi nous avons lancé une série d’ateliers consacrés à cet art. Moi, j’ai appris ce métier de l’artisan Nicolae Purcărea quand j’étais encore au lycée et j’ai voulu le transmettre en organisant ces ateliers d’initiation. »
Un métier qui ne manque pas de surprendre quand on commence à le connaître un peu : « Ce n’est pas facile. Même les participants à nos ateliers sont surpris. Tailler le bois en écartant de petits morceaux pour créer des motifs décoratifs n’exige pourtant pas un très grand effort. Ce n’est pas une sculpture tridimensionnelle. On commence par travailler sur un petit morceau de bois de tilleul, qui est une essence tendre, parfaite pour se familiariser avec cet art. Jusqu’à ce que l’on apprenne comment s’y prendre, ça demande un certain effort. Nous enseignons aux participants les techniques de base, mais ils doivent exercer également à la maison s’ils veulent arriver à maîtriser cet art. La plupart sont contents de cette activité qui les aide à se détendre, qui est aussi une forme de socialisation, et leur permet de découvrir notre héritage culturel. Pour les familiariser avec cet univers, nous leur présentons des objets anciens en bois décorés de cette façon, ainsi que des albums et des livres.
Les participants aux ateliers d’initiation apprennent non seulement à tailler le bois, mais aussi à déchiffrer la signification des 3 éléments fondamentaux de cet art dont nous parle Georgiana Gămălie: « Les éléments fondamentaux sont la dent de loup, le zigzag et la rosette, dans sa forme simplifiée. Il suffit de deux ou trois heures d’atelier pour les connaître. Après avoir appris à déchiffrer les symboles, ils apprennent différentes façons de les tailler et leur signification. Ces motifs présents sur les objets d’une maison paysanne n’avaient pas uniquement un rôle décoratif, mais aussi un rôle anthropologique, de protection. La dent de loup renvoie directement à nos ancêtres, les Daces, sur l’étendard desquels figurait le loup – symbole protecteur. Le zigzag est une très belle métaphore de la vie assumée, faite de hauts et de bas. La rosette solaire apporte la force vivifiante du soleil, astre du jour. »
Les gens sont-ils nombreux à vouloir apprendre ce métier? Georgiana Gămălie : Ils ne doivent pas être très nombreux, ils doivent être passionnés. C’est le désir des gens d’y participer qui fait la beauté de ces ateliers. Nous sommes surpris de constater qu’ils ont des occupations sans aucun rapport avec cette activité ; parmi eux il y a des informaticiens, des enseignants, des médecins. Ce travail manuel si différent de ce qu’ils font d’habitude est un véritable défi et une surprise pour eux. Nous avons également organisé des ateliers destinés aux élèves, en acceptant seulement les enfants âgés de plus de 12 ans, car on y travaille avec un petit couteau très aigu avec lequel ils risquent de se blesser. Nous avons aussi reçu des demandes d’organiser de tels ateliers aux sièges de différentes sociétés qui souhaitaient offrir une activité récréative à leurs employés, pour la plupart des informaticiens qui travaillent assis pendant des heures devant les écrans de leurs ordinateurs. »
Voilà une détente active dont peuvent naître des objets d’art et même une vraie passion pour un métier oublié. (Aut. : Ana-Maria Cononovici ; Trad. : Dominique)