Noël en Roumanie
Chez
les Roumains, Noël est une des plus importantes fêtes de l’année. Dans la
société moderne, cette fête de la joie partagée qu’est la Nativité a acquis des
dimensions commerciales ; pourtant, depuis des siècles, l’état d’esprit
des gens semble inchangé, notamment dans les vieilles communautés rurales. Là,
les traditions et les coutumes sont toujours présentes et respectées, affirme
Sabina Ispas, directrice de l’Institut d’ethnographie et de folklore
« Constantin Brailoiu », de Bucarest.
Monica Chiorpec, 24.12.2022, 12:22
Chez
les Roumains, Noël est une des plus importantes fêtes de l’année. Dans la
société moderne, cette fête de la joie partagée qu’est la Nativité a acquis des
dimensions commerciales ; pourtant, depuis des siècles, l’état d’esprit
des gens semble inchangé, notamment dans les vieilles communautés rurales. Là,
les traditions et les coutumes sont toujours présentes et respectées, affirme
Sabina Ispas, directrice de l’Institut d’ethnographie et de folklore
« Constantin Brailoiu », de Bucarest.
Sabina
Ispas : « Le 23 décembre, les gens préparent les jours
festifs compris entre Noël (le 25
décembre) et la Saint Jean (le 7 janvier). On les appelle les 12 jours festifs.
Le 23 et parfois aussi le 24 décembre, a lieu « colindatul
copiilor », les noëls des enfants, en ouverture des cérémonies et des
rituels liés à ces fêtes spéciales de l’hiver. Dans la société traditionnelle, un
moment plein de significations pourrait être celui des noëls chantés par le
groupe d’hommes, en fait, un rituel d’intégration de la communauté, de chaque
famille et de chaque membre d’une famille dans le temps sacré de l’événement
qu’est la naissance de notre Seigneur. Un répertoire spécialisé s’adressait
justement à ce rituel d’intégration et mentionnait la maison et ses habitants,
à commencer par le père de famille, son épouse, les enfants en âge de se
marier, les enfants en bas âge. Dans des situations exceptionnelles, il y avait
aussi des noëls pour les morts, si un décès avait eu lieu dans la maison en
question au cours de l’année en train de s’achever. Les chanteurs de noëls
recevaient des cadeaux, dont invariablement une couronne de pâte à pain, du vin
et un morceau de viande spécialement préparé pour eux ».
Le
Maramureş est probablement une des peu nombreuses régions de Roumanie où les
traditions de Noël n’ont pas été altérées par des influences citadines,
explique Delia Suiogan, ethnologue à l’Université du Nord, de Baia Mare : « Au Maramureş, Noël est une très belle fête, marquée de très beaux
rituels, liés aux préparatifs, aux trois grands jours de Noël et à la fin des
fêtes de la Nativité. Nous tenons absolument à le souligner, car chaque étape a
ses propres rituels, très bien préservés, qui, s’ils ne sont pas respectés à la
lettre, annulent l’effet d’un autre rituel. La Veille de Noël joue un rôle
presque plus important que la Fête de la Nativité elle-même. C’est la Veille
que les villages bourdonnent d’activités, les grands plats festifs mijotent
dans les cuisines, alors que les habitants respectent le jeûne, car, chose très
importante, cela signifie la purification et le sacrifice, pour être ensuite
bien et en bonne santé tout au long de l’année qui vient ».
Le
repas de Noël est l’élément central de la célébration de la Nativité dans
toutes les communautés de Roumanie. Avant de goûter les plats de fête, les
membres de la famille s’agenouillent
pour prier Dieu. À la fin du repas, ils se lèvent tous au même moment,
en signe de profonde communion spirituelle. Dans la soirée, des groupes de
jeunes hommes, munis de torches, arpentent le village en chantant des noëls.
Leurs
couvre-chefs sont décorés de petites branches de myrte et de fleurs de géranium,
raconte Delia Suiogan : « La Veille de Noël également, la maîtresse de
maison doit préparer la couronne de pain à mettre sur la table que vont
entourer les chanteurs de noëls et leurs amphitryons. La couronne sera posée sur
une serviette brodée, étalée sur du foin vert, spécialement coupé pour des
fêtes comme celle-ci. Ce même jour, les femmes de la maison préparent aussi les
petites couronnes de pain, pour récompenser l’effort artistique et les vœux des
chanteurs de noëls, des plus jeunes aux plus âgés. Le maître de maison, lui,
doit descendre des noix du grenier et apporter des pommes. La maison est
joliment décorée et la table ornée est ramenée au centre de la pièce. Dans
cette région, il y a un très beau rituel, qui fait qu’une chaîne rattache entre
eux les pieds de la table, pour conjurer une nouvelle année sans problèmes,
pour maintenir l’unité de la famille et pour protéger les animaux de la ferme
contre les voleurs et les maladies. Les premiers groupes, qui se mettent à
sillonner le village en chantant des noëls, rassemblent entre 5 et 8 enfants,
filles et garçons, en fonction des relations de famille ou d’amitié qui
existent entre eux, car ils vont chanter chez d’autres membres de leurs
familles ou chez des amis. La Veille de Noël, ces chanteurs peuvent commencer leur
itinéraire même en fin de matinée et ils sont très bien accueillis par les
hôtes ».
Dans
les villes, les semaines qui précèdent Noël se transforment en une course aux
achats. Le sapin, les décorations et les cadeaux pour les proches sont les
objectifs de ceux qui souhaitent passer des fêtes inoubliables, tandis que les
gourmands se sentent gâtés par les plats festifs spécifiques. Pourtant, la Fête
de Noël est le moment parfait de réparer les erreurs commises et de renouer les
relations interhumaines, en vue d’un nouveau commencement. (Trad. Ileana Ţăroi)