Le Musée de la Danse moderne et contemporaine.
Une initiative unique en Roumanie qui se propose d’éveiller l’intérêt du public vis-à-vis de l’histoire de la danse roumaine contemporaine. Imaginé comme une installation vidéo à projections multiples, parsemé d’un matériel documentaire issu des archives et couvrant les années 1927- 1996, le musée prépare en fait le prochain lancement des Archives complètes de la Danse Roumaine. Lancé sous une dénomination assez prétentieuse- celle de musée- l’exposition inaugurée le 5 juin a attiré un public nombreux.
Luana Pleşea, 18.07.2015, 13:30
Une initiative unique en Roumanie qui se propose d’éveiller l’intérêt du public vis-à-vis de l’histoire de la danse roumaine contemporaine. Imaginé comme une installation vidéo à projections multiples, parsemé d’un matériel documentaire issu des archives et couvrant les années 1927- 1996, le musée prépare en fait le prochain lancement des Archives complètes de la Danse Roumaine. Lancé sous une dénomination assez prétentieuse- celle de musée- l’exposition inaugurée le 5 juin a attiré un public nombreux.
Le commissaire Igor Mocanu nous en parle: « Apparemment, le titre a bien répondu à son but, celui de contrarier et d’intriguer les visiteurs qui ont afflué vers nous, pour voir l’exposition. Pourtant, cette astuce ne nous appartient pas. Les expositions temporaires s’en servent souvent. Il suffit de penser un peu au Musée de la BD, un projet portant la signature du caricaturiste Alexandru Ciubotariu. Comme quoi, la culture roumaine a déjà assisté à la mise en place de plusieurs musées temporaires dont le but est notamment celui d’alerter le public sur l’absence d’une institution en chair et en os, pour ainsi dire, qui se consacre entièrement à certains arts. Du coup, l’exposition dont on parle aujourd’hui s’est proposé justement de parler de la nécessité de doter Bucarest d’un musée permanent consacré à la danse moderne. On ne saurait couvrir ce domaine à l’aide de seulement quelques livres et quelques matériels issus des archives du Centre national de la danse. »
Aux dires de Igor Mocanu, le projet du Musée de la Danse moderne et contemporaine ne se propose pas de dévoiler au public les principaux repères de la danse roumaine, par contre, il souhaite le surprendre par une série de documents inédits sur l’activité de plusieurs chorégraphes connus ou moins connus: « L’exposition comporte aussi plusieurs extraits des films de fiction qui parle de la danse ou qui ont à l’affiche des danseurs. C’est le cas de Lisette Verea, une excellente comédienne des années 1930 qui a eu une petite séquence de danse dans le film policier Le train fantôme de Jean Mihail. C’est une danse sur des rythmes rappelant les chorégraphies de Fred Astaire, une séquence très importante pour l’histoire de la danse contemporaine roumaine. Et quand je dis importante, je ne parle pas de la valeur esthétique, mais plutôt de l’importance d’une telle chorégraphie pour ces années là. Paul Ricoeur disait que les documents jouent un rôle véritatif, puisqu’ils sont tenus de dire la vérité sur certains aspects de notre vie. C’est pour cela qu’ils s’avèrent tellement importants. »
L’exposition installation du Musée de la danse moderne et contemporaine est partagée en trois parties. La première est celle contemporaine, de remise en scène et de reconstitution de spectacles anciens. C’est ici qu’est exposé le spectacle de Florin Flueras et Brynjar Bandlien, Le marteau sans maître, d’après la pièce homonyme de Stere Popescu présentée en 1965 à Paris où elle a provoqué de fortes controverses. Elle a carrément divisé le public en deux : d’un côté ceux qui applaudissaient frénétiquement et de l’autre ceux qui sifflaient le spectacle. Seulement quelques minutes ont été gardées du Marteau sans maître. Ce qui plus est, les deux chorégraphes ont repensé ces moments. S’y ajoutent les deux reconstitutions faites d’après les photos de Lizica Codreanu, prises par Brancusi dans son atelier parisien dans les années 1920. Il s’agit de la reconstitution de Vava Stefanescu, en 1994 et de celle de mars 2015 faite par les élèves du lycée de Chorégraphie Floria Capsali de Buacrest.
Ecoutons Igor Mocanu : « La deuxième partie de l’exposition contient quatre portraits de chorégraphes : Floria Capsali, Leria Nicky Cucu , Miriam Raducanu et Vera Proca Ciortea. La troisième partie de l’exposition est une mini salle de cinéma où sont projetés des documents sur Elena Penescu Liciu, Esther Magyar, avec le groupe Contemp des années 1990 et le groupe les Marginaux, de la même époque. Leria Nicky-Cucu est présente avec un film indépendant tourné dans son propre jardin en 1933 et intitulé Divertissement de danses, dans lequel elle apparaît, semble-t-il, aux côtés de ses étudiantes et collègues du studio de chorégraphie qu’elle conduisait. Le film passe en revue toutes les pratiques chorégraphiques de l’époque. Il y a aussi de l’improvisation, des danses de caractère, de société, même un échantillon de ballet classique qui finit avec une ronde traditionnelle roumaine. Floria Capsali a fait partie de l’équipe de sociologues de Dimitrie Gusti et s’occupait du côté chorégraphique de la culture traditionnelle roumaine. Le film projeté au Musée de la danse moderne et contemporaine constitue un document important pour l’histoire de la danse, même moderne et contemporaine, puisqu’il ne s’agit pas d’une danse traditionnelle, c’est une reconstitution esthétisée, dans un studio avec des décors, des costumes et une expressivité très construite. On découvre immédiatement le style de la chorégraphe. Le portrait de Miriam Raducanu est composé de quatre documents vidéo. Deux d’entre eux sont assez connus. Il s’agit de films qu’elle avait tournés dans les années 1970 pour la maison de films documentaires Sahia Film. Les deux films sont précédés de deux autres documents inédits que nous avons découverts aux Archives nationales du film. L’un d’entre eux est une sorte de soirée artistique au Musée Zambaccian de Bucarest, c’était le début de cette mode du vernissage interdisciplinaire. C’est un document extrêmement important puisqu’il marque une date tout aussi importante pour l’histoire de la danse et une forme de danse qui est très connue depuis très peu de temps : la danse de galerie d’art. »
Vera Proca Ciortea a été une chorégraphe tout aussi connue que les autres noms figurant dans l’exposition. Elle venait du domaine de la danse rythmique et s’est fait connaître après les années 1970 en tant qu’ethnologue, puisqu’elle a beaucoup écrit sur la danse traditionnelle en Roumanie et à l’étranger. Le genre créé par Vera Proca Ciortea a été défini par le critique Liana Tugearu comme la danse rythmique roumaine.