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Le long métrage « Touch me not » de la réalisatrice Adina Pintilie au Festival du film de Berlin

Tourné pendant 10 semaines entre 2015 et 2017, avec une distribution d’acteurs professionnels et de héros réels, a réuni sur le plateau des personnes provenant de toute l’Europe : mise en scène et scénario – Adina Pintile – Roumanie, acteurs : Laura Benson (Royaume-Uni/France), Tomas Lemarquis (Islande/France), Christian Bayerlein (Allemagne), Grit Uhlemann (Allemagne), Hanna Hofmann (Allemagne), Seani Love (Royaume-Uni/Australie), Irmena Chichikova (Bulgarie) et Dirk Lange (Allemagne).

Corina Sabău, 24.02.2018, 13:37

Produit par la compagnie roumaine Manekino Film, ce premier long métrage d’Adina Pintilie a été accueilli avec enthousiasme par le directeur de la Berlinale, Dieter Kosslick, qui s’est déclaré impressionné par ce film et honoré de le présenter à l’édition de cette année du Festival.

Adina Pintilie : « C’est un geste de confiance de la part des organisateurs, mais je ne sais pas s’il s’agit d’une exception qu’ils ont fait pour nous. De toute façon, nous avons ressenti leur affection, ils nous ont reçus à bras ouverts et nous en sommes très reconnaissants, parce que nous avons tous beaucoup travaillé pour réaliser ce film. Nous avons mis 7 ans pour l’achever. Nous avons démarré en 2011 et ça c’est bien passé au début, surtout sur le plan international, mais au moment où la question du financement s’est posé en Roumanie, nous nous sommes heurtés à de nombreux obstacle. Pendant deux ans, le film n’a pas pu bénéficier d’un financement en Roumanie. Je pense que c’est aussi grâce au succès que nous avons remporté à l’étranger que nous avons fini par recevoir un financement de Roumanie aussi et nous avons pu entamer la co-production internationale. Ce film a été un beau projet, mais en même temps difficile sous certains aspects. »

Situé à la frontière de la fiction, du film documentaire et de l’art visuel et expérimentant courageusement au niveau aussi bien du contenu que du langage cinématographique, le film « Touch me not » est une approche personnelle de l’intimité, du besoin humain de contact authentique. C’est une tentative de découvrir les différentes couches de l’intimité. L’intimité est pleine de dangers. Le revers de l’amour peut être la haine, l’agressivité, l’incompréhension, qui font partie toutes de la même réalité complexe.

Adina Pintilie : « A mon avis, la façon dont nous vivions l’intimité est conditionné par de nombreux aspects: l’éducation, la culture à laquelle nous appartenons, notre histoire personnelle. Pourtant, la réalité concrète de l’interaction avec les autres est beaucoup plus complexe et le projet est né justement de la curiosité qu’elle suscite. En me rendant compte qu’en fait je ne sais pas beaucoup de chose sur l’intimité et sur la nature humaine, j’ai entamé un processus de réapprentissage et de découverte des manières parfois surprenantes de vivre l’intimité. J’ai travaillé aussi bien avec des acteurs professionnels, qu’avec des personnes qui n’avaient jamais fait du cinéma, mais qui s’intéressaient précisément à ce domaine d’investigation. Le résultat en a été un mélange inédit, à leurs histoires personnelles s’ajoutant des éléments de fiction. Nous avons également eu recours à des expériences de psychodrame et à beaucoup d’autres moyens pour mettre en évidence les mécanismes que nous appliquons souvent dans nos relations avec les autres, sans nous en rendre compte. En fait, tous les personnages sont confrontés à cette contradiction entre le besoin d’intimité et la peur de s’engager dans une relation d’interdépendance qui risque de les rendre trop vulnérables. »

« Touch me not » n’est pas la première création cinématographique d’Adina Pintilie située à la frontière entre la fiction, le film documentaire et l’art visuel. Ses productions sont considérées comme un phénomène à part dans le cinéma roumain. Elles se distinguent par un style visuel profondément personnel, une expérimentation hardie du langage cinématographique et une exploration sans compromis de la psychologie humaine.

Quels sont les éléments qui priment quand Adina Pintilie construit son histoire? « J’entame mon projet dans un esprit d’ouverture et la forme émerge à mesure que le contenu prend contour. Cette fois-ci, il y a eu un scénario, qui a plutôt fourni une structure à ma quête. Au début il y a donc eu une histoire, pour laquelle j’ai fait un casting. Or, le casting s’est avéré plus adéquat pour un film documentaire que pour un film de fiction. Nous avons essayé de connaître la personne qui se trouvait devant nous, nous avons travaillé avec des souvenirs, avec des rêves, avec des morceaux de musique qui représentent beaucoup pour ces gens-là. C’est ainsi que, suite à ce casting, nous avons trouvé les gens avec lesquels nous pouvions ouvrir ce laboratoire de recherches sur l’intimité qu’était le film «Touch me not». Durant tout ce processus, nous avons utilisé la fiction comme une structure qui nous permettait d’intégrer des éléments provenant de la réalité. Et puisque l’intimité est une zone difficile pour beaucoup d’entre nous – y compris pour les participants au projet – le fait de travailler sur une structure basée sur la fiction a créé un espace de sécurité autour du projet. C’est-à-dire, personne parmi les membres de l’équipe ne pouvait savoir quels éléments utilisés dans le travail avec les acteurs représentaient une réalité personnelle et lesquels relevaient de la fiction. »

Le long métrage « Touch me not » est la première partie d’un futur projet d’art multiplateforme soutenu entre autres par le Centre Georges Pompidou de Paris, par le Musée national d’art contemporain de Bucarest, par le Musée d’art moderne de Varsovie et par le Centre d’Art Spinnerei de Leipzig. « En explorant, au-delà des tabous, le rôle essentiel que l’intimité joue dans le développement humain, Touch me not » se propose d’ouvrir de nouvelles perspectives, d’éduquer, de promouvoir la tolérance et la liberté d’expression, de créer un espace de réflexion et de retour sur soi, incitant le spectateur à réévaluer ses propres idées sur l’intimité » – explique Adina Pintilie.

Le plus récent moyen métrage d’Adina Pintilie, « Oxygène » a figuré en 2010 dans la compétition officielle du Festival international du film de Rotterdam et il a été nominalisé aux Prix du meilleur court métrage et « Jeunes espoirs » des Prix Gopo 2011. Co-production roumano-néerlandaise, le plus récent court métrage d’Adina Pintilie, « Journal #2 », a gagné en 2013 le Prix Zonta du meilleur film signé par une réalisatrice au Festival international du court métrage d’Oberhausen. Son court métrage antérieur, «La ballastière #186» a été sélectionnée en 2008 au Festival de Locarno, dans la catégorie « Courts métrages d’auteur ». (Trad. : Dominique)