La Roumanie, invité d’honneur de la Foire du livre d’Istanbul
En tant que pays invité de la Foire internationale du livre d’Istanbul, qui s’est tenue du 7 au 10 novembre sous le slogan « Nous vous devons quelques mots », la Roumanie y a été représentée par des noms sonores de la littérature contemporaine, dont Gabriela Adameşteanu, Matei Vişniec, Dan Lungu, Octavian Soviany, Carmen Muşat, Daniel Cristea-Enache, Florin Bican, Lucian Dan Teodorovici, Radu Vancu, Vasile Ernu et Alexandru Matei. Ils ont présenté leurs livres et répondu aux questions du public présent au stand roumain.
Corina Sabău, 21.11.2015, 13:15
En tant que pays invité de la Foire internationale du livre d’Istanbul, qui s’est tenue du 7 au 10 novembre sous le slogan « Nous vous devons quelques mots », la Roumanie y a été représentée par des noms sonores de la littérature contemporaine, dont Gabriela Adameşteanu, Matei Vişniec, Dan Lungu, Octavian Soviany, Carmen Muşat, Daniel Cristea-Enache, Florin Bican, Lucian Dan Teodorovici, Radu Vancu, Vasile Ernu et Alexandru Matei. Ils ont présenté leurs livres et répondu aux questions du public présent au stand roumain.
La Foire internationale du livre d’Istanbul a également comporté des débats et le lancement de la version turque des romans « Je suis une vieille coco! » de Dan Lungu (paru aux Editions Bence Kitap) et « Une fenêtre sombre » de Florin Irimia (publié chez Aylak Adam). A cela se sont ajoutés des rencontres entre professionnels de la culture des deux pays et des événements dédiés aux enfants, accueillis aussi bien par le stand national que par l’Institut culturel roumain d’Istanbul. Au Théâtre Üsküdar Tekel Stage et au Lycée français Sainte-Pulchérie d’Istanbul, les spectateurs ont assisté à la représentation de deux pièces de Matei Vişniec, en présence de l’auteur: « La machinerie Tchekhov » et « Le mot progrès dans la bouche de ma mère sonnait terriblement faux ».
Un des débats à avoir suscité le plus d’intérêt s’est intitulé « La littérature pour enfants, une chose sérieuse ». Il a eu pour invités Oana Ispir, du Club des Illustrateurs de livres, ainsi que les écrivains Florin Bican et Vasile Ernu. A la question de savoir pourquoi il avait choisi la littérature pour enfants, Vasile Ernu a répondu qu’il avait toujours été passionné de ce genre d’écriture et qu’à son avis c’est l’enfance qui représente le moment décisif de la rencontre avec le livre.
Vasile Ernu: « J’ai commencé à étudier ce phénomène parce que je voulais comprendre l’importance de la littérature pour enfants. Je dois avouer que les années ’90 m’ont terriblement irrité, car l’ouverture qu’elles nous proposaient s’est avérée être plutôt une fermeture. Dans la Roumanie de ces temps-là, cette littérature, qui se résumait à la traduction, me donnait l’impression d’une grande diversité, alors qu’il ne s’agissait en fait que de la fiction du type Disney. Je n’avais rien contre ces histoires, qui avaient bercé mon enfance aussi, mais elles ne représentent qu’une option parmi d’autres. Bref, en ce moment-là, la pire des choses m’a semblé être la disparition quasi totale des livres pour enfants écrits par des auteurs roumains. Je trouve que c’est très important de raconter nos propres histoires dans le langage enfantin, de communiquer aux petits nos opinions et tourments. »
La journaliste Carmen Muşat a également demandé aux participants s’il était possible d’établir une hiérarchie entre l’image et le texte et puis ce que l’image apporte au texte et vice-versa. Autrement dit à qui la primauté. L’écrivain et traducteur Florin Bican pense que la prééminence, il faut l’accorder au texte, tout en précisant que les choses ne peuvent en rester là. Afin d’encourager les échanges entre auteurs et illustrateurs de livres, il leur a proposé de collaborer à une « Anthologie d’histoires illustrées pour enfants », parue aux maisons d’édition Pro Editura et Imprimerie. Ce livre-manifeste témoigne de l’existence de ressources fraîches en matière d’écriture et d’illustration de livre pour les petits. Après le vide créé dans les années ’80 par la disparition des livres roumains pour enfants, cette anthologie prouve que l’on peut renouer avec une tradition apparemment perdue.
L’écrivain Florin Bican explique: « Sur proposition d’Oana Ispir, initiatrice du Club des illustrateurs, j’ai proposé aux écrivains d’essayer de rédiger des textes de ce genre, que les illustrateurs allaient enjoliver au gré de leur talent et de leur imagination. Ce fut une heureuse collaboration, qui a vraiment comblé les attentes des participants. Trois des écrivains présents à l’édition de cette année de la Foire du livre d’Istanbul se retrouvent en tant qu’auteurs d’histoires pour enfants. Il s’agit de Vasile Ernu, de Doina Ruşti et de moi-même. L’idée de ce recueil a été d’attirer l’attention sur le fait que la Roumanie a elle aussi des éditeurs et des illustrateurs de livres pour enfants».
Voici maintenant la réponse de Vasile Ernu à la question de savoir si cette littérature repose sur une approche particulière du destinataire: « Quand on se met à écrire pour les enfants, les choses se compliquent en quelque sorte. Avec le temps, j’ai appris que si mentir aux adultes est facile, mentir aux petits est impossible. Réussir à écrire un livre que les enfants trouvent captivant, ce n’est pas peu de chose. Les petits, il faut les surprendre et puis, au contraire des grandes personnes, ils n’ont pas l’esprit altéré par le mensonge ou l’hypocrisie. L’enfant perçoit le livre comme un tout. Il ne distingue pas entre texte et image, comme nous autres adultes. Voilà pourquoi le terme « illustrateur » ne me paraît pas approprié quand il s’agit des dessins pour ce type de livres. A mon avis, l’écrivain et le dessinateur sont tous les deux auteurs. »
Le programme de la Roumanie en sa qualité d’invité d’honneur de la Foire internationale du livre d’Istanbul a été organisé conjointement par le ministère de la Culture de Bucarest et l’Institut culturel roumain « Dimitrie Cantemir » de Turquie. (trad.: Mariana Tudose)