La première exposition d’envergure dédiée à Constantin Brancusi en Roumanie
Des créations célèbres de Brancusi sont à découvrir à Timișoara jusqu'à janvier 2024.
Eugen Cojocariu, 07.10.2023, 10:27
En cette fin d’année 2023 et jusqu’au début de 2024,
l’exposition-événement la plus importante consacrée à Constantin Brancusi en
Roumanie et en Europe de l’Est au cours des 50 dernières années est ouverte à
Timișoara (dans l’ouest de la Roumanie). Intitulée « Brancusi :
sources roumaines et perspectives universelles », elle est le moment phare
du programme « Timișoara – Capitale européenne de la Culture 2023 ».
Constantin Brancuși (1876-1957) était un sculpteur
roumain dont la contribution au renouvellement du langage et de la vision
plastique de la sculpture contemporaine universelle a été considérable. Il est
symboliquement considéré comme « le père de la sculpture moderne ».
Brancusi fait ses débuts en tant qu’artiste en Roumanie, puis à partir de 1903,
il poursuit sa carrière à Paris, ses œuvres de maturité – les plus valeureuses
d’ailleurs – étant réalisées en France.
Début septembre, à Bucarest, le siège de la Banque
Nationale de Roumanie, a accueilli une conférence de presse durant laquelle les
organisateurs de l’exposition-événement de Timişoara ont présenté tous les
détails de cet événement unique en Roumanie. Ovidiu Șandor, le président de la
Fondation Art Encounters et commissaire de l’exposition dédiée à Brancusi, explique
ce que cet événement représente pour le grand public roumain :
« Cette
exposition est importante pour plusieurs raisons. C’est la première exposition
dédiée à Brancusi en Roumanie ces 50 dernières années. A mon avis, ce retour de
Brancusi dans son pays d’origine est important, y compris dans le contexte de
ce qui se passe autour de nous. Dans des moments compliqués, tels ceux que nous
sommes en train de traverser, il est important revenir de aux points de
référence des Roumains, tels que Brancusi. C’est une exposition qui se tient
une fois par génération. C’est une occasion pour le public d’admirer tant les
œuvres que Brancusi a réalisées durant sa jeunesse, que ses créations de
maturité, qui l’ont rendu célèbre. C’est une présentation spéciale, conçue par
Doina Lemny, qui témoigne de toutes les influences roumaines que Brancusi
utilise à Paris, mais aussi du processus de transformation et de perfectionnement
grâce auquel les œuvres de Brancusi ont acquis une importance universelle. »
Mais quelles sont justement les chefs-d’œuvre que cette
exposition a réunis à Timisoara ? Ovidiu Șandor explique :
« …Même
si nous tous, nous croyons connaître Brancusi, parfois il est important de
regarder ses œuvres sur place. Il est important de s’immerger dans l’univers de
Brancusi, que l’exposition ouvre grâce la centaine d’œuvres qui témoignent de
ses préoccupations diverses : la sculpture, la photographie, le dessin.
Ces préoccupations sont présentées tant en relation avec la Roumanie et avec ce
que lie Brancusi à son pays natal, qu’avec la place de Brancusi dans l’art
universel. (…) Nous avons fait venir une collection importante de plus de 20
sculptures. Il s’agit, d’un côté, de plusieurs sculptures iconiques de
Brancusi, tels « Maïastra », « Oiseau en vol »,
« Mademoiselle Pogany », « Le Baiser ». Mais il y a aussi
des sculptures moins connues, tels « Borne-frontière », réalisée par
Brancusi en 1945, lorsque la Roumanie avait perdu la Bessarabie. Par ailleurs,
il y a aussi des parties moins connues de sa création, comme par exemple la
photographie et le dessin, qui est une composante importante de l’art de tout
sculpteur. Plus encore, il y a aussi des documents qui témoignent de la
modalité dont il est resté en context avec des personnes de son pays d’origine.
Par ailleurs, il y a aussi un film, réalisé par Brancusi lui-même, mais aussi
d’autres films réalisés par des artistes importants, dans lesquels Brancusi apparait
en personne. Par conséquent nous avons à faire à une présentation et pas forcément
à une rétrospective. C’est une exposition qui présente, d’une manière
synthétique, la complexité de ses œuvres et les préoccupations diverses qu’il a
eues en tant qu’artiste, le tout illustrant aussi l’homme qui était Constantin
Brancusi. A part l’exposition, nous préparons aussi un catalogue, une
publication sérieuse, coordonnée aussi par Doina Lemny, qui inclut 16
contributions nouvelles concernant Brancusi. Il est également important de
préciser qu’il s’agit de la première exposition sur Brancusi qui place l’artiste
dans le contexte roumain. »
Doina Lemny est la commissaire
de l’exposition et un des experts internationaux de l’art de Brancusi les plus
importants. Elle a déclaré que :
« Comme
je le dis à chaque fois, c’est un retour symbolique de Brancusi dans son pays
natal, pays qu’il n’a jamais quitté dans son esprit. Brancusi a toujours été
lié à son pays, mais il s’est développé en France. Si on essaye de le juger, en
se demandant pourquoi il a légué l’atelier à la France, c’est parce que c’était
l’endroit où, 50 ans durant, il a crée tous ses chefs-d’œuvre. Mais il a été
toujours conscient que ses œuvres de début étaient en Roumanie, c’est-à-dire celles
se trouvant actuellement au Musée de Craiova ou au Musée National d’Art de
Bucarest. »
Doina Lemny nous dit aussi d’où
proviennent les œuvres de l’exposition « Brancusi : sources
roumaines et perspectives universelles » que l’on peut voir ces mois-ci à
Timisoara :
« Nous
nous sommes limités à deux musées et à la Fondation de Vénice. Nous avons été
limités par l’espace de Musée de Timisoara, qui n’est pas très généreux. Il y a
seulement 11 salles d’exposition, ce qui est peu, et on ne peut pas y entasser
les sculptures, on ne peut pas les empiler pour les présenter toutes en même
temps, car on ne les voit plus, elles s’entretuent. Nous avons donc fait appel
à la générosité de deux grands musées, la Gallérie Tate, qui nous a prêté trois
des quatre œuvres dont elle dispose – et il faut saluer ce geste – et le Centre
Pompidou, qui possède, grâce à l’Atelier Brancusi, la plus grande collection d’œuvres
de Brancusi au monde. Nous n’avons pas fait appel aux musées américains pour
des raisons d’espace, comme je l’ai déjà dit, et évidemment pour des raisons de
coût. »
Mais que signifié l’artiste
Brancusi pour Doina Lemny, un des spécialistes dans l’art de Brancusi les plus
importants au monde :
« Brancusi
est un homme qu’il faut interroger constamment, car il garde toujours son
mystère. Plus j’avance, plus je me pose des questions supplémentaires sur cet
homme qui savait analyser et puis reproduire chaque instant de la vie. Il
reproduisait des formes, mais pas l’être. Il reproduisait une idée, et non pas
un personnage. Pour moi, Brancusi reste un mystère et peut-être que je n’ai jamais
réussi à pénétrer pleinement son mystère. Portant, il a lui-même dit : « Ne
posez pas de questions aux créateurs et il ne faut pas que l’on révèle ou que
l’on lève complètement le voile ». »
L’exposition
« Brancusi : sources roumaines et perspectives universelles » est
ouverte du 30 septembre 2023 au 28 janvier 2024, de 10h à 20h. Les informations
détaillées relatives au programme de visite, à l’achat des billets, aux visites
guidées et aux visites scolaires sont disponibles sur le site dédié à
l’exposition :https://brancusi-2023.info/.
Les organisateurs de l’événement invitent tous ceux qui souhaitent la visiter à
acheter leurs billets d’avance, en fonction des jours et des plages horaires
disponibles. Rappelons-le avant de terminer, cette exposition est le moment
phare du programme Timisoara, Capitale Européenne de la Culture 2023 et aussi
un de ses temps forts francophones. (Trad. Andra Juganaru)