La poterie de Horezu inscrite au patrimoine immatériel de l’UNESCO
Ion Puican, 02.10.2021, 10:24
C’est à Horezu,
petite localité du département de Vâlcea (sud de la Roumanie), que la poterie
est plus qu’un métier, elle est un véritable art traditionnel qui se transmet
de génération en génération depuis des centaines d’années. La rue Olari (des
Potiers) est bordée de maisons-ateliers des maîtres artisans des lieux. Des
vérandas où s’entassent des objets en céramique, des palissades, des portes et
des fenêtres auxquels s’accrochent plats, cruches et autres tasses bariolées -
tout est imprégné de couleurs, de joie et de traditions roumaines.
Le maître potier
Mihai Bâscu accueille les passants dans son atelier, où il explique ce métier
tellement particulier : « En fait, quand on dit Horezu, on évoque
la seule localité de Roumanie à être deux fois représentée au patrimoine de l’UNESCO,
par la poterie de Hurez et par le Monastère Hurezi. Laa poterie de Hurez est
très connue dans le monde, grâce à sa présence sur la liste du patrimoine
mondial, certes, mais aussi pour sa décoration unique au monde et pour nos
outils singuliers – la corne de bœuf, la plume d’oie et la plume de geai des
chênes. Dans la décoration des objets, notre symbole général est « Le Coq
de Hurez », mais nous avons aussi plusieurs symboles disons secondaires, tels
l’arbre de la vie, le poisson, le serpent, la spirale de la vie, ainsi que des
motifs traditionnels de l’araignée, de l’épi de blé, de la roue du paon, de la
fleur, du trèfle, du tourbillon. La décoration que nous utilisons met ensemble
des motifs traditionnels et des symboles ».
La céramique de Horezu
affiche des couleurs, des formes et des dimensions des plus variées, comme
l’explique Mihai Bâscu : « Quand on dit poterie de Hurez, on dit
objets, notamment des plats, qui mesurent entre 8 et 40 centimètres. Comparé à
la « génération d’or » de mon père, moi-même, je peux me vanter
d’avoir fait « irruption » dans les années 2000, en produisant les
objets les plus grands de Horezu, des assiettes plates et creuses. On y ajoute
nos tasses, nos tasses à tzuica, nos assiettes « încolțurate » (angulaires)
et puis aussi quelques nouveautés, par exemple un aimant souvenir ou même un
lavabo en céramique ».
Le maître potier
Mihai Bâscu a expliqué son apprentissage de ce métier traditionnel : « Ce
métier, c’est un métier qui passe de père en fils. Moi, j’ai commencé à
l’apprendre quand j’étais enfant, en préparant l’argile pour mon père. A
l’époque, il n’ya avait pas d’outils électriques, donc je luis préparais les
vernis à la main. L’argile est locale, on la trouve à Dealul Ulmului (la
Colline de l’Orme), où je me rends chaque automne pour m’en approvisionner pour
toute l’année. Il faut creuser jusqu’à deux mètres de profondeur pour trouver
de la bonne argile, que je nettoie sur place. Je la transporte ensuite dans une
remorque propre jusque chez moi, où je la laisse dehors durant l’hiver ;
elle gèle et se dégèle, et ça la morcèle. Alors je la passe deux fois au
malaxeur, puis je la travaille à la main et la pâte d’argile est prête. Les
vernis sont tous naturels, à base de terres que je prépare moi-même. Le blanc,
la terracotta et le noir sont extraits de terres pures, tandis que le vert et
le bleu, je les obtiens en mélangeant de l’oxyde de cuivre et du caolin (de
l’argile blanche) pour le vert, ou du cobalt et de l’argile blanche pour le
bleu. Viennent ensuite les étapes du travail: d’abord, le modelage,
c’est-à-dire modeler l’objet – assiette, écuelle, tasse ou autre ; ensuite
la décoration, qui est l’étape la plus spectaculaire et la plus importante. On
l’applique sur l’objet encore frais, mais déjà durci. Après, on y creuse le
petit trou qui permet de l’accrocher au mur et, chose très importante, j’y
écris mon nom. Quand les objets sont parfaitement secs, ils sont cuits une première fois à 850°,
durant 8 heures. Après, il y a l’étape de l’émaillage et une deuxième cuisson à
1020°, et on obtient l’objet final ».
Le maître artisan
potier Mihai Bâscu est fier de son métier-art, dont les origines remontent au
XVIIe siècle, à l’époque du prince régnant de Valachie, Constantin Brâncoveanu
(1654-1714), grand protecteur de la culture et de l’art.
Mihai Bâscu : « J’ai oublié de vous
dire quelque chose de très important, que je tiens de mon père: chez nous, la
poterie existe depuis le règne de Constantin Brâncoveanu, car il était un
passionné de céramique et nous a laissé
même un style de décoration dit « brâncovenesc/brancovan. » (Trad. Ileana Taroi)