La 27 e édition du Festival de théâtre de Piatra Neamţ
Après une pause de quatre ans, le Théâtre de la Jeunesse de Piatra Neamt a renoué avec la tradition de promouvoir et d’encourager les jeunes créateurs de théâtre – metteurs en scène, scénographes ou comédiens- à travers un festival qui leur soit consacré. Considéré comme le festival théâtral le plus ancien de Roumanie- sa première édition remontant à 1969- le festival Je plaide pour les jeunes! a remporté cette année une nouvelle victoire: le retour de la troupe de Piatra Neamt dans l’édifice monument qu’elle occupait traditionnellement et qui a fermé ses portes ces dernières années pour des travaux de rénovation.
Luana Pleşea, 14.11.2015, 13:36
Après une pause de quatre ans, le Théâtre de la Jeunesse de Piatra Neamt a renoué avec la tradition de promouvoir et d’encourager les jeunes créateurs de théâtre – metteurs en scène, scénographes ou comédiens- à travers un festival qui leur soit consacré. Considéré comme le festival théâtral le plus ancien de Roumanie- sa première édition remontant à 1969- le festival Je plaide pour les jeunes! a remporté cette année une nouvelle victoire: le retour de la troupe de Piatra Neamt dans l’édifice monument qu’elle occupait traditionnellement et qui a fermé ses portes ces dernières années pour des travaux de rénovation.
Le Théâtre de la Jeunesse reste une véritable pépinière de talents pour la scène artistique roumaine, selon le comédien Liviu Timus, directeur de cette institution chargée d’organiser le Festival homonyme. Et pour cause: c’est justement sur les planches de ce festival, qui en est arrivé à sa 27ème édition, que des noms célèbres du théâtre roumain se sont lancés à travers le temps. Et on pense à Florin Piersic Jr ou encore à la grande dame de la scène roumaine, Leopoldina Balanuta. L’édition de cette année du Festival s’est donné pour but de présenter au public une radiographie du phénomène théâtral roumain à travers une sélection des créations issues du théâtre indépendant et contemporain. A titre d’exemple: A toi le premier pas de Jean- Claude Carrière dans la mise en scène d’Andrei Munteanu, production du Théâtre d’Art de Bucarest, une institution indépendante créée en 2010.
Le personnage féminin est incarné par Raluca Aprodu, une jeune comédienne connue du grand public notamment pour ses rôles au cinéma. On lui a demandé l’opinion sur le choix du texte et son importance dans le cas des spectacles joués dans des espaces non conventionnels.
Raluca Aprodu: « L’espace ne devrait avoir aucune influence sur le texte. Son choix devrait renvoyer seulement au désir du comédien de rencontrer un personnage ou encore au souhait du metteur en scène d’approfondir tel ou tel texte. Un point c’est tout. Malheureusement, on ne peut pas ignorer l’endroit où l’on joue, ce qui fait souvent place aux compromis. Par exemple, le public préfère les comédies. De nos jours, on évite de plus en plus les spectacles sérieux dont on ne veut plus à la fin d’une longue journée de travail. Au moment où le spectateur doit opter pour une salle de spectacle, il privilégiera celles publiques. Donc, les théâtres d’Etat ont un avantage aux yeux des spectateurs et du coup, les institutions indépendantes doivent recourir à quelques astuces pour attirer le public vers elles. Il y avait un spectacle au Théâtre Godot intitulé Lisolette en mai. Ce ne fut qu’à partir du moment où l’on a remplacé ce titre par un autre, Happy End, que le public est venu en salle. Bien que le spectacle soit resté le même, il nous a fallu un nouveau titre pour faire entrer les spectateurs en salle et leur offrir ce qu’on voulait. A l’heure où l’on parle, le nombre de pièces indépendantes est à la hausse, tout comme le nombre de comédiens consacrés qui s’impliquent dans des productions indépendantes, ce qui ne fait qu’attirer de plus en plus de spectateurs ».
Pour encourager les jeunes, le Festival de théâtre de Piatra Neamţ comporte aussi une section de concours, pour laquelle cette année ont été sélectionnés 16 des 80 spectacles inscrits. Parmi les lauréats figure aussi Nicoleta Lefter, dans la catégorie « meilleure comédienne », dans le rôle de Nadja du spectacle Visa de clown de Saviana Stănescu, mis en scène par Alexandru Mihail, du Théâtre Odéon de Bucarest. La pièce Visa de clown (Aliens with Extraordinary Skills) a été représentée en 2008 au Théâtre Julia Miles de New York. Le New York Times et d’autres publications américaines lui ont consacré des chroniques enthousiastes. La pièce raconte une histoire vraie: un Roumain et un Ukrainien ont emmené aux Etats-Unis plus de 800 immigrants illégaux avec de faux visas d’artistes de cirque.
Agée de 33 ans, Nicoleta Lefter est une des comédiennes les mieux cotées de sa génération. Elle participe à bien des festivals et pense que l’on a besoin d’organiser de tels événements dédiés surtout aux jeunes.
Nicoleta Lefter: « A mon avis, le plus grand pas en avant serait d’essayer de convaincre les jeunes de délaisser leurs ordinateurs et téléviseurs. Les convaincre de venir voir des gens vivants, sur scène, de tenter l’expérience d’émotions que l’on ne peut pas éprouver devant un écran, mais qui peuvent vous changer ou vous donner le goût des échanges humains. Je constate que l’on est de plus en plus enclins à la solitude et à l’isolement. Les gens ne communiquent plus, ne sont plus ouverts. Ils ne ressentent plus le bonheur des rencontres, des causeries, ni la curiosité de savoir comment se portent les autres. Or, c’est là la chose la plus importante, à mon sens. Et si les spectacles ont aussi un volet éducatif, c’est merveilleux ».
Vlad Cristache est un des metteurs en scène invités au Festival de théâtre de Piatra Neamţ (« Je plaide pour les jeunes»). Son spectacle, intitulé The History Boys. Histoires au parfum de lycée, d’après Alan Bennett et qui se joue au Théâtre Excelsior de Bucarest, a été nominé deux fois, dans les catégories « meilleur spectacle » et « meilleur metteur en scène ».
Voici l’opinion de Vlad Cristache sur la nécessité d’organiser des festivals dédiés aux jeunes artistes: « D’une part, je trouve génial le fait d’avoir un tel festival, car il met ensemble deux générations d’artistes ayant fait leur début sur scène ces dix dernières années et leurs productions. Cela permet de voir quelle est leur opinion sur la direction que devrait suivre le théâtre. D’autre part, je ne crois pas vraiment en cette distinction entre artistes jeunes et moins jeunes, car il se trouve que des moins jeunes montrent davantage de fraîcheur et de jeunesse d’esprit que les très jeunes. Bref, la jeunesse de l’acte artistique ne tient pas à l’âge biologique, mais à la personnalité de l’artiste ».(Trad. Ioana Stancescu, Mariana Tudose)