Femmes et maternité dans la préhistoire
Le discours de l'exposition s'articule autour d'objets archéologiques exceptionnels issus de la collection du musée, des statues de femmes miniatures, des vases et des sculptures vieilles de plus de 6000 ans.
Ion Puican, 30.03.2024, 12:13
A la découverte des représentations de la féminité dans l’art préhistorique
Le mois de mars célèbre le printemps et rend hommage à la féminité – deux symboles mondialement reconnus et associés à ce mois du calendrier. Le Musée national d’histoire de Roumanie (MNIR), situé dans le vieux centre de la capitale, a décidé à cette occasion d’organiser une exposition tout à fait originale, et dont nous parle Andreea Bîrzu, archéologue et muséographe :
« Au mois de mars, le Musée national d’histoire de Roumanie accueillait l’exposition temporaire « Femmes et maternité dans la préhistoire. Représentations plastiques anthropomorphes neo-eneolitiques ». Une exposition qui, pour nous, rend hommage à toutes les femmes de tous les âges. »
Quel est le concept de cette exposition proposé par le MNIR ? Andreea Bîrzu nous répond :
« Le projet offre au public la possibilité extraordinaire de découvrir des artéfactes spectaculaires de cette période de notre histoire. Le discours de l’exposition s’articule autour d’objets archéologiques exceptionnels issus de la collection du musée, des statues de femmes miniatures, des vases et des sculptures vieilles de plus de 6000 ans. Expressives, dotées d’une grande charge émotionnelle et symbolique, nombre de ces représentations plastiques anthropomorphes sont de véritables chefs-d’œuvre de l’art préhistorique. »
L’art de la simplicité et des détails
Andreea Bîrzu nous a donné davantage de détails sur ces objets préhistoriques qui constituent la pièce maîtresse de l’exposition du MNIR :
« Ces statuettes et vases représentent des figures de femmes dans leur plus grande diversité. La plus impressionnante, celle qui peut-être fera le lus réfléchir nos visiteurs, est celle représentant la maternité. Une maternité suggérée par certains détails anatomiques soigneusement choisis et modelés par les artisans de l’époque. On distingue les seins et le pubis, la poitrine saillante… Très souvent, ces pièces s’inscrivent dans un décors élaboré, orné de motifs géométriques ou en spirale, incrustés à la surface du corps et qui évoquent probablement des vêtements, des coiffures ou encore des tatouages. C’est très fort, très expressif et très chargé émotionnellement et symboliquement aussi. Beaucoup de ces représentations sont de véritables chefs d’œuvres de l’art préhistorique. »
Qu’est-ce qui saute aux yeux des visiteurs de l’exposition « Femmes et maternité dans la préhistoire »? Andreea Bîrzu nous répond :
« La pièce la plus impressionnante représentant une silhouette féminine est celle de la maternité, suggérée par des détails anatomiques très subtiles et soigneusement modelés. La figure de la mère et son enfant, découverte à Rast, dans le département de Dolj, dans le sud-ouest de la Roumanie, est pour moi l’une des plus parlantes. »
Que cela nous apprend-t-il sur nos ancêtres ?
Que représentait ce type d’artéfacte pour les hommes et les femmes de l’époque ? Andreea Bîrzu nous explique :
« Ces artefacts nous fournissent des informations particulièrement précieuses sur le développement de la communauté, sur les croyances, les préoccupations et les idéaux des peuples d’un passé lointain. Ils illustrent des canons esthétiques et religieux spécifiques au monde néo-énéolithique, perçus comme expressions de la réalité, d’aspects de la vie quotidienne, de l’identité des femmes, ou comme représentations de divinités, de fécondité et de fertilité, ou encore comme des objets de culte. L’existence de ces artefacts est étroitement liée à la vie spirituelle des sociétés préhistoriques, représentant à travers des images symboliques les valeurs et le principe de la féminité. La féminité et la maternité étaient certainement sources de significations complexes pour l’homme préhistorique, significations qui restent ancrées dans la conscience collective de l’homme moderne.»
Comment le public a-t-il accueilli cette exposition du MNIR ? Andreea Bîrzu nous raconte :
« La réaction des visiteurs face à ces objets, que certains voient pour la toute première fois, est très intéressante. La plupart m’ont dit qu’ils étaient enchantés par l’expressivité de ces pièces, par leur capacité à attirer et à retenir leur regard comme un aimant. Certains se sont également dit émerveillés par l’extraordinaire pouvoir d’abstraction des artisans préhistoriques, capables de restituer avec des moyens simples et rudimentaires l’essence de la féminité qu’ils transposaient dans ces figurines d’argile et d’os. »
Un voyage dans le temps pour mieux comprendre notre rapport au monde d’aujourd’hui et notre imaginaire collectif autour de la figure de la féminité. L’occasion aussi d’en apprendre davantage sur nos ancêtres, ou tout simplement de passer un bon moment artistique.