Anonimul, le festival du film indépendant
Chaque été, le cinéma indépendant est mis à l’honneur en Roumanie, dans le cadre du Festival international de film indépendant Anonimul, qui se tient à Sfantu Gheorghe, là où le Danube se jette dans la mer Noire. Nous passons en revue les nouveautés de cette 21e édition d’un festival pas comme les autres.
Corina Sabău, 21.09.2024, 10:06
Un festival au bord de la mer
La XXIème édition du Festival international du film indépendant « Anonimul » s’est tenue cet été, comme d’habitude, dans la commune de Sfântu Gheorghe, à l’embouchure du bras homonyme du Danube qui s’y jette dans la mer Noire.
La structure du festival n’avait pas changé : deux compétitions pour les courts-métrages nationaux et internationaux respectivement, une troisième compétition pour les longs-métrages, des projections de productions hors-compétition, des rencontres – débats entre les professionnels et le public. Le palmarès a inclus le film « (În) Cerc »/« (Dans) Le Cercle » de la réalisatrice Andreea Parfenov récompensé du prix du meilleur court-métrage roumain. La Fondation Anonimul a attribué le prix « Ovidiu Bose Paştină » à « WTF Luci!? », le court-métrage du réalisateur Paul Radu.
Une comédie noire
Cette comédie noire, « WTF Luci!? », exercice de création de l’équipe de « 111 FILM & Entertainment », avait eu sa première projection au Festival international du film Transilvania TIFF de cette année. Elle avait aussi été projetée dans le cadre de la section Compétition du Festival de théâtre et du film « Șerban Ionescu » ainsi qu’aux Soirées du cinéma roumain de Iași. « WTF Luci » raconte l’histoire débordant d’humour noir d’un jeune homme, appelé Luci et interprété par l’acteur Theo Costache, qui reçoit, un soir, une vieille malle remplie de fripes, envoyée par des membres de sa famille. Il se met ensuite à avaler quelques champignons hallucinogènes et la nuit prend une direction inattendue, plusieurs événements surprenants transformant la comédie en un film d’horreur. Outre Theo Costache, le générique contient aussi les noms de Lavinia Pele dans le rôle Dea, et de Costel Cașcaval dans le rôle Unchiu’ (l’Oncle).
Dans une interview à RRI, le réalisateur Paul Radu a parlé de l’accueil réservé à son film (son deuxième court-métrage après « OPT » sorti en 2022) et de son intention de réaliser un film expérimental, en mélangeant les genres horreur et comique :
« Pour moi, ça a été avant tout un test, car j’attendais la réaction du public. Personnellement, j’étais satisfait du résultat, mais j’avais besoin, pour ainsi dire, de quelques confirmations. La réaction du public m’intéressait donc beaucoup et j’avoue que j’en suis très content. Les gens ont aimé le film et m’ont adressé de nombreuses questions. Comme je l’ai déjà dit, quand j’ai commencé à travailler à ce film, mon intention était de jouer un peu avec les genres cinématographiques. J’ai écrit l’histoire, un premier brouillon du scénario, qui n’avait que deux pages et demie. Je voulais expérimenter plutôt sur des images que sur le dialogue, qui est d’ailleurs assez peu présent dans le film. Bien-sûr, j’ai eu la chance de travailler avec une équipe extraordinaire, de vrais professionnels qui m’ont soutenu et ont cru en cette folie. Ce fut un véritable défi, surtout par le mélange des genres avec lesquels j’ai choisi de jouer et qui m’aurait facilement fait tomber dans le ridicule. Moi-même et mon équipe avons souhaité réussir à raconter l’histoire de Luci en employant un langage cinématographique. »
Un court métrage émouvant
Le court-métrage « (În) Cerc »/« (Dans) Le Cercle », réalisé par Andreea Parfenov, a remporté le prix accordé par le public au meilleur court-métrage roumain projeté au Festival international du film indépendant Anonimul, mais il a aussi été projeté dans le cadre des Soirées du film roumain à Iași, au Festival de théâtre et du film « ȘI » (Șerban Ionescu), ainsi qu’au « FEST (New Directors New Films Festival) », au Portugal. Avec une distribution rassemblant les actrices Ana Dumitrașcu, Ioana Flora, Ana Maria Pop, Ecaterina-Elena Lupu, cette production s’est construite autour du personnage Laura, qui fait un voyage nocturne, essayant, pour une énième fois, de sortir d’une relation toxique.
Andreea Parfenov parle de la naissance de l’histoire racontée dans son film:
« Cette étape de l’écriture a été bien longue, le scénario ayant subi de nombreux changements. J’ai moi-même vécu une expérience similaire et le plus difficile a été de trouver une formule de transformer mon histoire en une fiction, car tout ce qui se passe en réalité n’est pas cinématographique et ne mérite pas d’être raconté d’une façon audio-visuelle. C’était ça le défi pour moi. J’avais vécu les deux situations des personnages – celle du personnage qui doit partir et qui est joué par Ana Dumitrașcu, mais également celle des amis qui veulent l’aider, selon leurs moyens, tout en continuant à vivre leur vie. Moi, j’ai compris les deux points de vue et il m’a semblé important de raconter cette histoire, car je trouve que nous devons être attentifs aux gens qui nous entourent, les comprendre et les soutenir selon nos possibilités. Il faut faire preuve de beaucoup de patience et de gentillesse envers les gens autour de nous quand ils traversent de telles situations, parce qu’en fait il est très difficile de rompre un cercle vicieux. En disant ça, je ne pense pas uniquement à la vie de couple, mais aussi à toutes les situations qui peuvent survenir dans nos vies et que nous ne maîtrisons pas, pour des tas de raisons. Alors, je trouve qu’il est important d’être plus présents et plus conscients de ce qui arrive aux gens que nous aimons. »
Une rétrospective à Bucarest
La Rétrospective de la XXIème édition du Festival international du film indépendant ANONIMUL, organisée à Bucarest, a offert au public une projection en avant-première du film « Trois kilomètres jusqu’à la fin du monde », du réalisateur roumain Emanuel Pârvu, récompensé de la Palme Queer à Cannes cette année. La même production a récemment été distinguée au Festival du film de Sarajevo, où le jury lui a attribué le trophée du meilleur film et le prix Cineuropa. (Trad. Ileana Ţăroi)