« Ana Simon- les étranges rencontres »
Cela fait plus de cinquante ans qu’Ana Simon a quitté la Roumanie pour s’établir d’abord, en Espagne et ensuite en Suisse, à Genève. Ecrivaine, réalisatrice de films et traductrice, Ana Simon est née à Domasnea, dans le pays de Caras Severin. Pourtant, cette grande personnalité culturelle passe presque pour inaperçue en Roumanie ce qui explique la démarche de trois écrivains de lui consacrer un volume. Ana Simon – les étranges rencontres signé Alina Mazilu, Vasile Bogdan et Cornel Ungureanu vient de paraître fin septembre aux Maisons d’Editions Diacritic de Timisoara.
Luana Pleşea, 20.10.2018, 13:08
Cela fait plus de cinquante ans qu’Ana Simon a quitté la Roumanie pour s’établir d’abord, en Espagne et ensuite en Suisse, à Genève. Ecrivaine, réalisatrice de films et traductrice, Ana Simon est née à Domasnea, dans le pays de Caras Severin. Pourtant, cette grande personnalité culturelle passe presque pour inaperçue en Roumanie ce qui explique la démarche de trois écrivains de lui consacrer un volume. Ana Simon – les étranges rencontres signé Alina Mazilu, Vasile Bogdan et Cornel Ungureanu vient de paraître fin septembre aux Maisons d’Editions Diacritic de Timisoara.
Des détails avec Alina Mazilu qui précise: Personnellement, j’aime bien considérer ce volume comme une sorte de début puisqu’on sait très peu de choses sur cette femme et c’est bien dommage. Attention, je ne saurais dire que c’est injuste, car elle non plus, n’a pas souhaité se faire connaître. Seulement voilà, on ne sait pas grand chose sur Ana Simon et on devrait en savoir davantage. C’est pourquoi je parle de ce volume comme d’un début, un bouquin qui propose une série d’interviews sur et avec Ana. Qu’est ce qu’il surprend? Hé bien, je pense qu’il arrive à surprendre sa personnalité complexe, sa vocation de l’amitié, sa générosité. Qu’est -ce -que nous, on s’est proposé par ce bouquin? On a voulu surtout ne pas tout dévoiler. On a voulu préserver le mystère. On a donc essayé d’inviter le public à découvrir l’univers d’Ana Simon, tout en lui laissant le plaisir de s’imaginer le non dit.
Mais qui est Ana Simon? C’est l’épouse du comédien suisse, François Simon, connu pour son expressivité et sensibilité particulière et belle-fille du célébrissime Michel Simon. Mais, en même temps, elle est celle ayant traduit les œuvres de Mircea Eliade, de Marin Sorescu ou encore de Miguel de Unamuno et celle ayant signé de nombreux recueils de poésie ou encore des scénarios de film. Dans le volume qu’on lui a consacré, on a publié certains de ses poèmes et une série de photos censées aider le public à s’imaginer des brins de son existence. Alina Mazilu: Il y a plusieurs photos dont une aux côtés de Mario Vargas Llosa prise à Lima des années avant que Llosa devienne célèbre. Il y a par la suite des lettres envoyées par Ion Negoitescu, un proche d’Ana Simon ou encore par Emil Cioran. Le public aura la chance de découvrir aussi un portrait réalisé par Margarethe Krieger, artiste peintre d’origine allemande et grande amie d’Ana. Sur la première couverture du livre il y a un portrait fait par le peintre chilien Jose Venturelli, un proche du poète Pablo Neruda, qui surprend à merveille Ana Simon dans toute sa simplicité. Et puis, il y a aussi une série de photos avec son grand amour, François Simon ou encore avec des personnalités roumaines, telles Ion Vianu.
Toute l’œuvre d’Ana Simon, que l’on parle de ses chroniques littéraires, de ses interviews, de ses poèmes ou ses traductions, est traversée par le même fil conducteur qui est l’admiration note Alina Mazilu dans son volume. Une vérité qu’Ana Simon, présente sur place le jour du lancement du livre, consent dans une déclaration en exclusivité sur RRI: Tout ce que j’ai fait, je l’ai fait par admiration. Il est vrai que ma formation littéraire a joué pour beaucoup, puisque j’ai étudié la littérature universelle et comparée ce qui a alimenté mon intérêt dans cette direction. Les artistes viennent de quelque part et ils nous dévoilent le plus possible de leur univers. Moi aussi, j’ai essayé de faire de même, en partageant mon admiration pour eux à travers un film.
A feuilleter le volume Ana Simon. Les étranges rencontres, vous aurez l’occasion d’admirer la couverture d’un livre qu’elle a consacré à Michel et François Simon. Alina Mazilu affirme que Ce n’est là qu’un petit échantillon de l’immense travail qu’Ana Simon a mené afin de récupérer l’image des deux Simon- père et fils. Après la mort de François, Ana a construit toute son existence sur un effort censé renforcer le rôle que les deux Simon ont joué dans la cinématographie européenne. Elle leur a consacré des livres, des poèmes, elle a lutté pour que son mari, François, reste dans la mémoire collective comme l’un des comédiens de langue française les plus expressifs, dont le nom se rattache à la création du Théâtre de Carouge qui existe de nos jours encore, à Genève. Elle a mené un véritable parcours de combattant pour préserver vivante la mémoire de François et de Michel Simon.
Voyageuse passionnée, faisant souvent la route entre Genève, Paris et Barcelone, Ana Simon visite régulièrement son Banat natal. Est-ce que vous avez un chez vous, Mme Simon? Et elle de préciser: Chez moi…hm, je dirais comme Camus: mon pays fut mon père et donc mon chez moi que j’ai perdu depuis tant d’années. Sinon, j’ai eu des maisons provisoires, car comme François avait des tournages partout, je le suivais. Ensemble, on a beaucoup voyagé et du coup, je me sentais chez moi là où il y avait François, surtout depuis que mes parents étaient disparus. Camus disait que son pays lui servait de père. Et puis, un jour, il est resté orphelin. Moi, je l’ai gardé ce père, car j’ai préservé la langue roumaine et je sens que si un jour quelque chose de mal arrivait à la Roumanie, je serais prête à me battre pour la défendre. Je critique toujours les autres avant de me prendre à mon pays. Je reste fidèle à ce pays qui m’a vu naître et me former. Je ne suis ni Française, ni Suisse.
Ana Simon. Les étranges rencontres est un livre qui incite ses lecteurs à vouloir apprendre davantage sur la vie et la personnalité de cette femme au destin particulier. Alina Mazilu conclut: Chacun de nous trois a fait sa propre rencontre d’Ana Simon. Chacun de nous trois s’est laissé influencé par la façon dont cette personnalité culturelle est entrée, la première fois, dans sa vie, surtout que chacune de nos rencontres a été parsemée d’éléments surréalistes. Et du coup, chacun de nous trois, a choisi d’en parler à sa manière. Ce n’est pas une lecture aride. Tout au contraire. C’est un livre qui se lit facilement, car il est très bien écrit. Du moins, je l’espère. (trad. Ioana Stancescu)