Traian Popovici, un juste parmi les nations
Steliu Lambru, 03.02.2018, 15:51
Connu
comme « Oskar Schindler de la Roumanie », l’avocat Traian Popovici,
maire de la ville de Cernăuţi, fait partie de ceux qui ont agi pour sauver
leurs semblables d’une mort sûre, la mort
préparée pour eux par le régime totalitaire nazi. On a reconnu à Popovici le
mérite de s’être opposé au plan d’élimination des Juifs de Bucovine, mis au
point par le maréchal Ion Antonescu, le dirigeant de la Roumanie entre 1940 et
1944. Popovici a réussi à entraver le plan de mettre à mort environ 20.000
Juifs, en leur délivrant des certificats à l’aide desquels ils ne pouvaient pas
être déportés.
Né en
1892 dans un village situé à l’époque dans le Duché de Bucovine qui appartenait
à l’Empire Austro-hongrois, Popovici a choisi de devenir avocat. Après la
Première Guerre mondiale, il a suivi les cours de l’Université de Cernăuţi. Au
début de la Grande guerre, en 1914, il a passé la frontière avec la Roumanie et
s’est enrôlé dans l’armée roumaine. Dans l’entre-deux-guerres, il a travaillé
comme avocat à Cernăuţi, et après l’occupation de la Bucovine de Nord, en juin
1940, Popovici s’est réfugié à Bucarest. Il est devenu le maire de Cernăuţi en
juillet 1941, nommé par le gouverneur militaire de la Bucovine. Pourtant, il
est vite entré en conflit avec le régime qui lui avait demandé de créer un
ghetto juif et il a refusé. En dépit de son opposition, le ghetto a été créé et
sa création a été décrite par Popovici dans son livre « Confession ».
En agissant contre les pouvoirs locaux, Popovici a usé de son influence et a
obtenu de Ion Antonescu un délai de dérogation pour la déportation de 20.000
Juifs, le reste de 30.000 Juifs étant déportés à l’automne de 1941.
Elisabeth Ungureanu de l’Institut pour l’étude de
l’Holocauste en Roumanie raconte comment Elie Wiesel, le lauréat du Prix Nobel
de la paix 1986, avait répondu à la question sur la motivation des actions
énergiques de Traian Popovici pour sauver les Juifs de Cernăuţi : « Traian
Popovici est la personne qui occupe une place unique dans notre mémoire, car il
ne s’est pas soumis aux ordres du maréchal Antonescu, voilà une chose très
importante à retenir. Il s’est opposé fortement à la création d’un ghetto et,
ultérieurement, à la déportation des Juifs de Cernăuţi. Il a agi pour les
sauver, par solidarité. Comme on peut lire dans les lignes qu’il a écrites dans
un de ses volumes, rester passif signifiait, pratiquement, accepter la
complicité à un crime abominable. Il a préféré à agir par devoir moral, je
pense que c’était été la seule chose qui l’a motivé. Agir par devoir moral,
tenir compte du fait que, nonobstant l’ethnie, la race, la couleur de la peau,
on est tous des êtres humains et qu’il ne faut pas se moquer d’autrui parce
qu’il est différent. »
Traian Popovici est mort en 1946,
mais ses actes charitables sont resté dans la mémoire de ceux qui ont survécu
et ils ont reçu leur reconnaissance bien méritée. Le Mémorial Yad Vashem lui a
conféré le titre de « Juste parmi les nations », en signe de
reconnaissance pour sa grande qualité d’avoir été un homme, un vrai, avant
toute autre chose. (Trad. Nadine Vladescu)