Motos roumaines
Le motocyclisme, tout comme dautres sports, est plus quun hobby. Il est un véritable mode de vie pour les motards, facilement reconnaissables daprès leur équipement spécifique: casque, combinaison en cuir, bottes, lunettes, genouillères et coudières. Membre dun groupe identitaire, le motard est attaché à la motorisation des deux roues.
Steliu Lambru, 14.12.2014, 13:54
Le motocyclisme, tout comme dautres sports, est plus quun hobby. Il est un véritable mode de vie pour les motards, facilement reconnaissables daprès leur équipement spécifique: casque, combinaison en cuir, bottes, lunettes, genouillères et coudières. Membre dun groupe identitaire, le motard est attaché à la motorisation des deux roues.
Lhistoire de la moto de fabrication roumaine remonte aux années davant la Deuxième Guerre Mondiale. Fondées en 1938 à Zărneşti, au centre de la Roumanie, les usines Tohan, partie composante du groupe Malaxa, étaient spécialisées dans la production de motos et de vélos. Les produits sortis de ces usines allaient se faire connaître notamment pendant la seconde conflagration mondiale, lorsquelles fabriquaient des munitions, des éléments pyrotechniques et des missiles pour larmée roumaine. Après 1948, année de la nationalisation, les usines Tohan ont repris la fabrication de motos. Avant 1945, on pouvait voir rouler des motos de fabrication allemande ou française. Dans les années de la guerre, les fameuses Zündapp étaient de loin les favorites des Roumains.
Au lendemain de la guerre, le marché roumain est envahi de motos fabriquées par les Soviétiques, dont beaucoup copiaient des modèles occidentaux. Ainsi sexplique lapparition des Minsk, des IMZ-Oural, ou des célèbres “IJ, produites depuis 1939 sous licence allemande BMW. Il y avait aussi des marques tchèques, telles Java et CZ et celle de lAllemagne de lest, MZ.
Pourtant, cest Mobra 50 qui a pris la vedette. Sa production en série a démarré en 1971 aux usines de Tohan, qui disposaient de lignes dassemblage, car, vers la fin des années 1960, on y avait fabriqué une autre moto à succès, appelée Carpaţi, Carpates. Le moteur de la Mobra dune cylindrée de 50 centimètres cubes provenait des usines Metrom Braşov, situées non loin de Tohan Zărneşti. Lappellation “Mobra est le résultat de la combinaison des deux premières syllabes des mots “Motos et “Braşov. Mobra développait une puissance de 4 chevaux. Elle était munie dune boîte à 4 vitesses et pouvait atteindre la vitesse maximale de 70 km/h. Elle ne consommait que 2,7 litres aux 100 km et son réservoir avait une autonomie de 450 km. La Mobra, qui était conçue pour transporter deux personnes, coûtait en 1971 léquivalent de 530 dollars américains.
La Mobra, au design plutôt austère et aux performances techniques modestes, a été déclinée en deux modèles Mobra 50 Super et Mini-Mobra. Le fort bruit de son moteur na pas découragé les férus de motocyclisme. La très populaire Mobra a également alimenté de nombreuses blagues, autant de piques en direction du système économique de lépoque, qui nencourageait pas la qualité.
Hoinar (Vagabond) cest le nom dune autre moto roumaine, fabriquée à Tohan à compter de 1976. En 1994, sa production a dû sarrêter en raison de lusure morale du produit et notamment du processus de restructuration de lentreprise. Les caractéristiques techniques étaient presque identiques à celles de la Mobra: moteur deux temps avec refroidissement à air, cylindrée de 49 centimètres cubes, boîte à 5 vitesses, vitesse maximale de plus de 70 km/h, autonomie de 450 km.
La Mobra a également participé à des compétition sportives. Octavian Vrăjitoru qui a piloté une telle moto a engrangé 19 titres de champion national et a remporté le premier prix des Championnats des Balkans de motocyclisme. Lors des motocross, on a également pu admirer un hybride, à savoir une CZ, fabriquée en Tchécoslovaquie, équipée dun moteur Mobra.
Les seules compétitions auxquelles a participé la moto roumaine Mobra ont été celle dans la catégorie des 50 centimètres cubes, les usines Metrom Braşov nayant jamais sorti de moteurs de cylindrée supérieure à celle-ci. De nos jours, la Mobra serait assimilée plutôt à un scooter, nétant pas une moto proprement-dite.
Une autre histoire, moins connue, est celle de la moto construite par lingénieur Sorin Tulea, détenu politique, incarcéré dans la prison communiste dAiud. Il a fait partie, aux côtés de lingénieur Adrian Stambuleanu et du commandeur Costel Nicolau, de léquipe qui a reçu lordre de concevoir un nouveau modèle de motocyclette. Une tâche quils ont menée à bien. Préservée comme par miracle, cette moto est exposée aujourdhui au Mémorial des victimes du communisme de Sighet.
Comme certains autres produits de lindustrie roumaine du temps du socialisme, Mobra ne manque pas dadmirateurs nostalgiques. Cest vrai que les possesseurs de cette vieille marque de moto roumaine sont peu nombreux. Ceux qui lutilisent toujours le sont encore moins. Mobra a partagé le même sort que la Trabant, lautomobile la plus connue en ces temps-là. La fuite inexorable du temps confère de la valeur à nimporte quel objet. (trad. Mariana Tudose)