Le patromoine de la famille Chrissoveloni
C’est dans la rue marchande « Lipscani », du vieux centre-ville de Bucarest, que se trouvait le quartier financier de la capitale roumaine : une sorte de City ou de Wall Street bucarestois. C’est ici que se trouve de nos jours encore le siège de la Banque centrale roumaine, qui, il y a plus d’un siècle, était entouré des bâtiments des banques commerciales ayant marqué l’histoire économique de la Roumanie. Parmi eux, figurait aussi le siège de la Banque Chrissoveloni, d’une beauté à part, une construction qui prouve que certains banquiers roumains avaient vraiment du bon goût.
Steliu Lambru, 27.09.2016, 13:38
C’est dans la rue marchande « Lipscani », du vieux centre-ville de Bucarest, que se trouvait le quartier financier de la capitale roumaine : une sorte de City ou de Wall Street bucarestois. C’est ici que se trouve de nos jours encore le siège de la Banque centrale roumaine, qui, il y a plus d’un siècle, était entouré des bâtiments des banques commerciales ayant marqué l’histoire économique de la Roumanie. Parmi eux, figurait aussi le siège de la Banque Chrissoveloni, d’une beauté à part, une construction qui prouve que certains banquiers roumains avaient vraiment du bon goût.
D’origine grecque, la famille Chrissoveloni s’est établie dans les principautés roumaines après la Révolution de 1848 pour y ouvrir une banque et une société d’exportations à Galati, sur le bord du Danube, dans l’est la Roumanie actuelle. Après l’ouverture d’une succursale dans la ville voisine de Braila, les affaires de la famille ont commencé à se développer et, vers la fin du 19e siècle, la famille ouvre une succursale à Bucarest, la capitale du Royaume de Roumanie. Parallèlement, les Chrissoveloni investissent aussi dans l’immobilier, l’industrie et l’agriculture. Mais le « boom » des affaires de la famille a eu lieu notamment après la Première guerre mondiale. L’historienne de l’art Oana Marinache a étudié les bâtiments ayant appartenu à la famille Chrissoveloni, pour les présenter ensuite dans un album qui suit leur destin à travers les siècles.
Oana Marinahce : « La proposition de réaliser cet album est venue de la part de la famille. L’actuel héritier du patrimoine fait partie de la cinquième génération des Chrissoveloni. Il est le successeur d’une vieille famille grecque qui par le biais de Zaniis Chrissoveloni, est arrivée en 1848 à avoir des relations commerciales avec les ports danubiens de Braila et de Galati. Le succès dans le domaine commercial produit la nécessité de fonder une institution bancaire. En 1881, à Bucarest, dans le vieux centre-ville cette institution bancaire voit le jour sur la rue Lipscani, et connait l’apogée entre les deux guerres mondiales. De 1920 à 1948, le réseau bancaire de la famille était vraiment impressionnant, avec des filiales à Londres et Paris. La banque Chriossoveloni collaborait aussi avec des banques étrangères et là où elle n’était pas présente directement, elle avait certainement un partenaire d’affaires digne de sa réputation. »
C’est également de cette période que date le siège de la rue Lipscani de la Banque Chrissoveloni, un bâtiment qui suscite l’intérêt des passionnés d’architecture et d’art de Bucarest. Inauguré en 1928, le siège de la banque Chrissoveloni rappelle un sobre et imposant « palazzo » florentin, avec ces décorations en pierre et autres ornements en forme de paons, lions et sphinx. Conçu par les architectes GM Cantacuzino et August Schmiedingen, le bâtiment a été racheté par la Banque nationale en 1930, lorsque la banque Chrissoveloni était confronté à des ennuis financiers. C’est également dans la rue Lipscani, à quelques dizaines de mètres plus loin, qu’il y a un autre immeuble ayant appartenu à la famille Chrissoveloni. Bâti en 1904, par l’ingénieur Cutarida pour accueillir différents magasins et bureaux, l’édifice dit « du Carrousel » a été restauré il y a juste quelques années pour accueillir une librairie et une galerie d’art. La librairie Carturesti-Carrousel est actuellement un point important sur la carte touristique de la capitale roumaine, un site à ne pas rater.
Mais ce n’est pas uniquement à Bucarest que la famille Chrissoveloni a érigé des bâtiments d’une grande valeur architecturale. Parmi eux, le manoir de Ghidigeni, près de la capitale, construit sur un domaine ayant appartenu à cette famille à compter de 1879. A Braila, par exemple, on peut toujours admirer l’ancien siège de la Banque Chrissoveloni, un imposant bâtiment art-déco, imaginé par l’architecte Georges Cristinel, qui accueille de ne jours le siège d’une banque commerciale contemporaine. Toutes ces constructions et bien d’autres sont présentes dans l’ouvrage « Le patrimoine immobilier de la famille Chrissoveloni à travers les siècles ».
Oana Marinache : « C’est une recherche de plus d’une année. J’ai rencontré un des actuels héritiers lors de mes recherches sur l’architecte Edmond Van Saanen-Algi. Cet architecte roumain d’origine néerlandaise a réalisé une extension du manoir familial de Ghidigeni. C’est également lui qui a réalisé la crypte de la famille Chrissoveloni, qui se trouve elle aussi sur le domaine de Ghigideni. La réalisation de cet album a été possible aussi grâce aux archives personnelles des héritiers qui ont mis à ma disposition des photos de famille très valeureuses. »
Nationalisé en 1948 par le régime communiste roumain, le patrimoine de la famille Chrissoveloni a été récupéré par ses descendants qui envisagent de restaurer ces immeubles, inclus désormais partie au patrimoine architectural de la Roumanie.