Le médecin Carol Davila
Vers le milieu du 19e siècle, à l’époque où les principautés de Valachie et de Moldavie entamaient leur modernisation, la majorité des institutions spécifiques des sociétés modernes, nées en Europe Occidentale, manquait cruellement. Le système de soins de santé en est un exemple. La situation allait changer lorsque Barbu Stirbey, prince régnant de Valachie entre 1849 – 1853 et entre 1854 – 1856, a fait appel au médecin Carol Davila. Bien que de nationalité française, Carlo Antonio Francesco d’Avila était né à Parme, en Italie, en 1828 ou 1830; sa date de naissance n’est pas vraiment connue, tout comme inconnu était le nom de son père.
Christine Leșcu, 30.09.2015, 16:33
Vers le milieu du 19e siècle, à l’époque où les principautés de Valachie et de Moldavie entamaient leur modernisation, la majorité des institutions spécifiques des sociétés modernes, nées en Europe Occidentale, manquait cruellement. Le système de soins de santé en est un exemple. La situation allait changer lorsque Barbu Stirbey, prince régnant de Valachie entre 1849 – 1853 et entre 1854 – 1856, a fait appel au médecin Carol Davila. Bien que de nationalité française, Carlo Antonio Francesco d’Avila était né à Parme, en Italie, en 1828 ou 1830; sa date de naissance n’est pas vraiment connue, tout comme inconnu était le nom de son père.
Selon une légende, assumée par le médecin lui-même, ses parents auraient été la comtesse Marie d’Agoult et le musicien Franz Liszt. La comtesse a en effet eu trois enfants avec le célèbre pianiste et compositeur, l’une d’entre elle, Cosima allant devenir l’épouse de Richard Wagner. Carol, le fils de la comtesse d’Agoult qui contribuera à l’émancipation d’un petit Etat de l’Europe de l’Est, n’aura pas besoin d’un patronyme célèbre pour être lui-même vénéré. Malgré ses origines incertaines, une fois établi dans la principauté de Valachie, il a entrepris des actions très appréciées.
L’historien Ion Bulei continue la biographie du docteur Carol Davila: « A cette époque de naissance de la modernité roumaine, nombreux sont les Roumains qui se forment dans les écoles de l’Occident de l’Europe. Lui, au contraire, est un étranger qui fait la route en sens inverse, il s’installe ici ou il reste aussi grâce à sa seconde épouse Ana Racovita, dont il fait la connaissance en 1861. Elle est apparentée à la famille des boyards érudits Golescu et reconnue comme une des grandes beautés de son temps. Davila était tellement amoureux d’elle, que certains historiens considèrent que c’était une des raisons de sa décision de s’établir dans les Principautés roumaines. Pour Davila, les institutions étaient essentielles pour le développement d’un Etat et il s’est impliqué dans la fondation de quelques-unes d’entre elles – l’Ecole nationale de chirurgie en 1855, la Faculté de médecine en 1869. C’est toujours lui qui a mis en place l’enseignement de pharmacie et de médecine vétérinaire, des sociétés et des revues médicales et le service d’ambulance; il a donné des cours et fait des démonstrations pratiques; il a introduit les consultations médicales gratuites, a ouvert des asiles pour les orphelins et pour les sourds-muets. A la fin de leurs études à Bucarest, les étudiants de Carol Davila vont se perfectionner dans les grandes capitales de l’étranger, Paris, Rome, Berlin, Vienne. Le médecin est pratiquement présent partout. Ce personnage a été particulièrement actif et conscient du fait que seulement en créant ces institutions la Roumanie pouvait se doter d’un système de soins de santé. »
Sa contribution essentielle au développement de la médecine roumaine a été aussi appréciée par les successeurs de Barbu Stirbey : le prince Alexandru Ioan Cuza et le roi Carol I. D’ailleurs, toute la famille du docteur Davila a laissé son empreinte sur différents domaines de la vie culturelle et sociale de Roumanie. Personnalité très active et pleine d’énergie, Carol Davila est mort autour de l’âge de 56 ans, à la fin du mois d’août 1884, après une vie marquée par une santé plutôt précaire.
L’historien Ion Bulei revient au micro : « Il souffrait de rhumatisme, il avait contracté le typhus et il était torturé par la sciatique. Sur ce plan, il a été bien malheureux. Mais sur un autre, c’était quelqu’un d’accompli, avec une famille modèle. Il a eu deux fils et deux filles; l’un de ses garçons a été le dramaturge Alexandru Davila, le directeur du Théâtre National de Bucarest au début du 20e siècle. L’une de ses filles, Elena Petricari-Davila, était l’épouse du général Petricari et dame d’honneur de la reine Elisabeth de Roumanie. Elle était très cultivée et informée de ce qui se passait dans le monde ; ses mémoires, écrites en français et gardées aux archives de l’Académie roumaine, parlent de la vie à la Cour royale roumaine et de la situation du pays, en général. Le texte a une évidente qualité littéraire et le contenu, avec ses détails du quotidien de l’époque, est fascinant. »
Le médecin Carol Davila est aujourd’hui encore apprécié et honoré par les Roumains. L’Université de médecine de Bucarest porte son nom et une statue grandeur nature du docteur se hisse dans le jardin devant l’entrée. Un buste de Carol Davila, sculpté par Constantin Brancusi, peut être admiré dans la cour de l’Hôpital militaire de la capitale. (trad. Ileana Taroi)