Les risques économiques, sous la loupe de la Banque Nationale de Roumanie
Rapport sur la stabilité financière du pays.
Florin Orban, 31.01.2017, 14:16
Le rapport sur la stabilité financière du pays a récemment été présenté par le vice-gouverneur de la Banque nationale de Roumanie, Liviu Voinea. Selon celui-ci, le pays a connu une des croissances économiques les plus importantes d’Europe.
Liviu Voinea: « La Roumanie a une bonne situation macro-économique ; toutefois, les risques à l’adresse de sa stabilité financière, bien qu’ils soient à la baisse, sont significatifs. La croissance économique est soutenable, le risque d’une détérioration rapide de la confiance des investisseurs dans les économies émergentes est toujours élevé, enregistrant même une légère hausse depuis notre dernier rapport d’avril 2016, alors que les banques ont continué d’éliminer les crédits non performants ».
Selon le même rapport, le risque de l’instabilité législative dans le secteur financier et bancaire a diminué suite à la décision de la Cour constitutionnelle de Roumanie en ce qui concerne la loi des crédits hypothécaires, qui permet aux Roumains de rendre leur logement à la banque s’ils ne peuvent plus payer les mensualités. En octobre dernier, la Cour constitutionnelle a décidé que, pour les crédits hypothécaires contractés depuis 2011, c’était au tribunal de décider pour chaque cas individuel si la loi en question pouvait être appliquée ou non. Le risque associé à cette loi s’est donc estompé, tout comme celui associé à la conversion en lei des crédits en francs suisses, alors qu’en avril 2016 on estimait que ces deux lois présentaient des risques majeurs pour les banques roumaines, souligne le vice-gouverneur de la Banque centrale de Roumanie, Liviu Voinea.
Liviu Voinea: « Pour les banques, les pertes s’étaleront sur plusieurs années, suite à la décision de la Cour constitutionnelle. Tant que les décisions seront individuelles, on ne peut plus considérer ces deux lois comme pouvant causer des pertes, dans le sens des normes européennes visant les provisions ».
Pour sa part, le gouverneur de la Banque nationale de Roumanie, Mugur Isarescu, ajoute : « Nous avons été parmi les premiers à dire que nous avions une très bonne situation macroéconomique. Tout le long de ma carrière, la Roumanie n’a jamais connu de situation macroéconomique meilleure. Jamais, ces 26 dernières années. Mais c’est toujours pour la première fois ces 26 dernières années que l’on a tant de risques. Et ce ne sont pas de petits risques, ce sont de grands. Parce que, plus on est haut, plus c’est dangereux, n’est-ce pas ? Si on tombe de haut, le risque est assez grand, c’est ce que la société roumaine doit comprendre. Nous vivons donc un paradoxe. La situation macroéconomique est bonne, mais le risques et les tensions macroéconomiques sont énormes aussi ».
Sur cette toile de fond, il est essentiel de protéger les équilibres macroéconomiques et la stabilité du secteur financier, affirme Mugur Isarescu, parce que tout dérapage mène, tôt ou tard, à des corrections douloureuses. Il a souligné à nouveau l’importance des réformes structurelles, en vue de stimuler le potentiel de croissance économique de la Roumanie en tant qu’unique moyen viable pour assurer un développement soutenable du pays. Sur le plan mondial, la volatilité est le mot qui décrit le mieux la situation au niveau politique, économique et géopolitique, ont conclu les représentants de la Banque centrale roumaine. Les principaux défis auxquels se confronte l’Europe et non seulement l’Europe sont liés à la croissance trop rapide des crédits en Chine, au Brexit, aux élections de mai dans plusieurs pays européens et à la situation du système bancaire européen.
L’économiste en chef de la Banque Mondiale à Bucarest, Catalin Pauna, affirme que le risque que la Roumanie soit confrontée à une procédure de déficit excessif est notable, si la tendance actuelle en termes de politiques est maintenue.
Catalin Pauna : « Presque tous les pays ont promu ces derniers temps des politiques de réduction des déficits fiscaux. Les prévisions concernant la Roumanie vont dans une direction diamétralement opposée, dans le sens où la Commission européenne anticipe le risque d’un déficit supérieur à 3%, ce qui engendre automatiquement le déclenchement de la procédure de déficit excessif. Ce qui plus est, en 2017, notre déficit fiscal pourrait être supérieur à la moyenne de l’UE, ce qui ne s’est plus passé depuis longtemps. Donc dans les conditions des politiques actuelles, je dirais que ce risque de dépasser le seuil des 3% de déficit budgétaire est significatif. Ce que nous pouvons faire, c’est évidemment de corriger une série de politiques. »
Et pourtant, Catalin Pauna affirme que si le gouvernement applique les mesures à sa disposition – améliorer la collecte des taxes et des impôts, accroître l’efficacité des dépenses publiques et réorganiser les priorités budgétaires – la Roumanie pourrait facilement éviter un déficit budgétaire supérieur aux 3% du PIB. D’ailleurs, les représentants du nouveau gouvernement, dirigé par le social-démocrate Sorin Grindeanu, prévoient cette année un déficit budgétaire inférieur à 3%. (Trad. Valentina Beleavski, Alex Diaconescu)