L’énergie verte, une industrie profitable?
Les ressources dénergie conventionnelles diminuent dannée en année. Les réserves de charbon et de pétrole sépuisent. Par ailleurs, leur exploitation génère des gaz à effets de serre, provoquant des changements climatiques.
Florin Orban, 26.12.2017, 13:30
La production d’énergie verte s’est beaucoup développée en Roumanie ces dernières années, et cela dans un rythme accéléré. Pour ce qui est de la place occupée par les sources d’énergie renouvelable dans la production et la consommation d’énergie en Roumanie, Catalina Dragomir, consultante dans le domaine de l’énergie, explique: « Il existe certains objectifs établis au niveau de l’Union européenne pour l’année 2020. La Roumanie a été, je dirais, assez agressive dans ce domaine, assumant un objectif de 24% d’énergie renouvelable de sa consommation énergétique. Il s’agit d’une cible déjà atteinte en 2015, 2016. Quant à la production, en avril 2017, près de 5300 mégawatts (MW) étaient produits par 791 opérateurs de sources renouvelables. De cela, c’est l’énergie éolienne qui rafle la mise avec 3025 mégawats, suivie par l’énergie solaire à 1350 MW, alors que pour la différence on dénombre la biomasse, le biogaz et les microcentrales. En 2015/2016, les sources régénérables représentaient ainsi 20,6% de la consommation totale d’énergie en Roumanie. Nous estimons que ce pourcentage augmentera modérément en 2017. Evidemment, la part d’énergie renouvelable dépend de certains facteurs externes qui influent directement sur la production, tels le nombre de jours ensoleillés, le vent, la capacité hydro, c’est-à-dire la quantité de précipitations. Le pourcentage de 20,6 n’est que la moyenne annuelle. En fonction des conditions climatiques et du nécessaire de consommation, il peut y a voir des jours où la production d’énergie renouvelable peut atteindre 30 voire 40 %, si les conditions sont extrêmement favorables, ou encore baisser à 7, 8 ou 10 %. »
Nous avons interrogé Cătălina Dragomir sur la part d’investissements étrangers dans la production de l’énergie renouvelable : « On observe que sur un total de près de 5300 mégawatts produits, près de la moitié, sinon plus, proviennent des fermes éoliennes détenues par des opérateurs internationaux, par des multinationales. Le calcul est donc vite fait. Je dirais qu’au moins trois quarts d’investissements consentis dans le secteur proviennent de l’étranger, que ce soit directement ou indirectement, via les multinationales. On devrait mentionner encore la part de financement en provenance des banques étrangères, financements déroulés en collaboration avec les banques ou les filiales locales… Grosso modo, les financements en provenance de sources internes, que ce soit le Fonds pour l’environnement, les fonds propres des investisseurs, les crédits ou les leasings, ne dépasseraient pas 10% du total des investissements consentis dans le domaine. Dix, au grand maximum 15%, de la valeur totale de l’investissement dans les capacités de production d’énergie renouvelable. »
Mais la production d’énergie en provenance de sources régénérables est-elle rentable? Cătălina Dragomir, consultante dans le domaine de l’énergie:« Certainement pas. Même dans le cas de grands producteurs, des compagnies multinationales qui investissent constamment dans l’innovation. Même dans leur cas, ils n’arrivent pas à récupérer l’investissement pendant la durée de vie de l’outil. Les analyses financières, réalisées dans le cas des cinq premiers joueurs sur le marché de l’énergie renouvelable, mettent en exergue une perte opérationnelle de près d’un milliard de lei, donc d’à peu près 200 millions d’euros. »
Le schéma financier de soutien, mis sur pied par l’Etat roumain pour encourager et promouvoir la production d’énergie de sources régénérables, s’est fondé sur les « certificats verts », émis par l’opérateur de transport. La valeur de ces certificats s’ajoute au prix de vente de l’énergie, prix déterminé par le marché. La législation a connu toutefois des modifications importantes ces dernières années. Cătălina Dragomir:« Au moment où ce premier schéma de support a été lancé ça a été un grand succès. Malheureusement, des modifications successives l’ont transformé plutôt en un frein. Il s’agit d’une formule qui peut suffoquer l’investisseur ou alors, pour des situations où la durée de vie de l’investissement s’élève à 20 ans, les délais d’amortissement pourraient être de 30 à 35 ans. C’est intenable d’un point de vue économique. De ce fait, les investisseurs sont devenus extrêmement réticents à faire appel à ces types d’aides publiques. Autant le degré de prédictibilité de ces mécanismes que leurs modalités d’implémentation constituent des risques pour un investisseur potentiel. »
Et dans ces conditions, quelles sont les perspectives de l’industrie ? Cătălina Dragomir, consultante dans le domaine de l’énergie, tire la sonnette d’alarme: « En l’absence d’un schéma efficace d’aides publiques et en l’absence de mécanismes facilitant la conclusion des contrats à long terme, qui puissent assurer l’amortissement de l’investissement, je ne pense pas que l’on assiste, à court terme, à l’accroissement des capacités de production d’énergies renouvelables. J’évalue le court terme dans ce cas à deux ou trois ans. D’autre part, dans la perspective de la date butoir de 2030, il est vrai que la Roumanie a presque déjà atteint ses objectifs. Nous avons atteint une part de 24 % d’énergie renouvelable du total de l’énergie consommée en Roumanie, alors que l’objectif assumé pour 2030 est de 27%. Il y a donc de la place pour de nouvelles opportunités. » (trad. Ionut Jugureanu)