Le système bancaire de Roumanie
Il redeviendra profitable à compter de cette année, même si à un niveau moindre que celui de la majorité des pays dEurope centrale, révèle une étude menée par le cabinet conseil Deloitte.
Florin Orban, 02.06.2015, 14:30
Le document anticipe que les banques de Roumanie vont s’axer sur la maximisation du bénéfice net et mettront encore davantage l’accent sur la gestion efficace des actifs non performants. A noter qu’en 2014 le secteur bancaire roumain avait enregistré un manque à gagner de près d’un milliard d’euros. Le bilan de quatre des 6 dernières années a été négatif, seulement deux années ayant clôturé positivement.
« Les pertes en euros se chiffrent à 1,6 milliards. S’il n’y avait pas eu les efforts permanents des institutions bancaires, ce manque à gagner aurait affaibli le secteur. Heureusement, le contrôle que la Direction de surveillance de la Banque centrale de Roumanie a exercé sans discontinuer et les actionnaires, qui ont dû supporter ces pertes, ont finalement contribué avec des capitaux irréversibles », a précisé le premier vice-gouverneur de la Banque centrale, Florin Georgescu.
Selon lui, cette contribution, qui s’est élevée à 1,8 milliards d’euros ces 4 – 5 dernières années, excède la perte nette enregistrée en début de crise. A ce montant s’ajoutent des crédits totalisant plus de 400 millions d’euros, remboursables sur plus de deux ans. « Si le système est solide à présent, c’est grâce aux efforts considérables consentis par les banques et les propriétaires, dans le but de maintenir la qualité du secteur à un niveau approprié. Ces coûts ont été assumés par les actionnaires», a encore souligné Florin Georgescu.
Par ailleurs, de l’avis du gouverneur de la Banque centrale de Roumanie, Mugur Isărescu, les trois tendances du secteur sont la hausse modérée des prêts, la qualité du crédit et l’importance accrue des sources de financement locales. Il convient de mentionner que dans la première décade du mois de mai, la Banque centrale a décidé de réduire son taux directeur, le ramenant de 2% à un nouveau plus bas historique, soit 1,75%.
Mugur Isărescu a conseillé aux institutions bancaires de faire preuve de prudence en ce qui concerne la diminution des taux d’intérêt sur les dépôts, car elles auront besoin d’argent, au fur et à mesure que le crédit sera relancé: « A mon avis, certaines banques ont abaissé le taux d’intérêt de l’épargne plus qu’il n’aurait fallu, mais d’autre part, celles-ci ont un excédent de liquidités. Toutefois, la prudence est de mise, puisque cet excédent ne s’inscrit pas dans la durée. Il finira par être absorbé, au fur et à mesure de l’augmentation des prêts en monnaie nationale, le leu. Plus prudentes, certaines banques ont maintenu leurs taux d’intérêt à plus de 2%, faisant preuve ainsi d’un sens de la perspective. »
Sur les 40 institutions bancaires de Roumanie, seulement 4, de petite taille, opèrent toujours avec des taux d’intérêt sur les dépôts supérieurs ou égaux à 3%. En dehors d’abaisser son taux directeur, la Banque centrale a également décidé de diminuer de 10% à 8% les réserves minimales obligatoires, a fait savoir l’analyste économique Radu Crăciun: « Les deux mesures relèvent de la relaxation de la politique monétaire. L’idée en est, d’une part, de rendre les lei moins chers, et de l’autre, d’en faire augmenter le nombre. La réduction du ratio de réserves obligatoires des banques injectera près de 3 milliards de lei (soit environ 675 millions d’euros) de liquidité dans le marché interbancaire et les banques devront trouver des solutions pour mettre cet argent à profit.»
Le système bancaire a contribué à la croissance de l’économie roumaine, mais son impact sur le PIB a été limité en raison de l’indiscipline budgétaire des compagnies et des erreurs commises dans l’octroi de fonds au niveau des banques, est-il souligné dans l’étude élaborée par Deloitte pour le Conseil des patronats bancaires en Roumanie. La fragilité du secteur et de l’économie dans son ensemble est à l’origine de la faible performance de l’activité de prêt, laquelle a été rendue possible par la contribution financière des actionnaires. Selon l’étude mentionnée, en 2015, le prêt aux entreprises ira croissant, au bout de trois années consécutives de baisse.
Daniel Dăianu, professeur des universités et membre du Conseil d’administration de la Banque nationale de Roumanie, affirme que le pays a connu des progressions économiques proches de son potentiel actuel, qui est de 3%, et ce grâce à l’excédent de liquidité existant sur le marché après la période de récession: « A la sortie de la récession profonde en Amérique Latine, en Asie ou en Europe, la reprise économique n’a pas nécessité d’activité de prêt exceptionnelle. Pourquoi? Parce qu’il existe des liquidités, lesquelles, valorisées comme il faut, peuvent faire tourner la roue de l’économie. En outre, ce qui particularise la Roumanie au sein des pays d’Europe centrale et de l’Est, c’est le fait d’enregistrer une croissance économique même dans les conditions d’un exercice budgétaire très serré. »
Daniel Dăianu ne manque pas pour autant de mettre en garde contre le fait que, sur le moyen et le long terme, la Roumanie ne saurait séparer la croissance économique du financement bancaire car, insuffisamment développé, son marché de capitaux ne peut pas accomplir son rôle d’alternative aux crédits bancaires. (trad.Mariana Tudose)