Le nouveau paquet de lois portant attribution des marchés publics
Un paquet fondé sur un meilleur usage des deniers publics, similaire à l'utilisation des fonds propres pour trouver un rapport qualité-prix optimal, selon les spécialistes.
Florin Orban, 24.05.2016, 13:09
Le nouveau paquet de lois visant l’attribution des marchés publics de Roumanie a été récemment adopté par la Chambre des députés en tant qu’assemblée décisionnelle, avec un retard de près d’un mois par rapport à la date-butoir fixée par la Commission européenne. Cette dernière a d’ailleurs critiqué notre pays pour en avoir tergiversé l’adoption.
La commissaire européenne aux Politiques régionales, Corina Creţu, a déclaré: « Je salue le fait que le Parlement de la Roumanie se soit mobilisé et qu’il ait adopté ce paquet relatif aux marchés publics. Le délai pour mettre en œuvre les normes européennes en la matière était déjà échu au mois d’avril. C’était donc une urgence et j’étais très inquiète parce que la législation manquante sur les marchés publics bloquait pratiquement tous les programmes opérationnels. »
Sur le nouveau paquet relatif aux marchés publics, voici l’opinion de l’analyste économique Valentin Ionescu : « Ce que le Parlement a approuvé est en fait le résultat de deux directives européennes entrées en vigueur début 2015. Ces documents préservent en quelque sorte l’esprit des directives antérieures, mais, en effet, certains mécanismes ont été introduits pour les rendre plus souples. Premièrement, par exemple, pour fragmenter de grands contrats, afin que plus de compagnies puissent y accéder, y compris pour les travaux. D’autre part, le fait que le barème à partir duquel l’appel d’offres est organisé est une mauvaise chose. Parce que cela ne peut pas contribuer à réduire la corruption. Au contraire, cela peut l’alimenter, par la création de réseaux clientélistes, si des attributions sont faites en dessous de ce barème, où il n’est pas nécessaire qu’un appel d’offres soit organisé. »
Le président de l’Agence nationale pour les marchés publics, Bogdan Puşcaş, a déclaré que le nouveau paquet de lois se fonde sur un meilleur usage des deniers publics, similaire à l’utilisation des fonds propres pour trouver un rapport qualité-prix optimal. Il a opiné que pour déterminer l’offre la plus avantageuse économiquement, par le nouveau paquet, les critères d’attribution suivants sont observés : le prix le plus bas, le coût le plus bas, le meilleur rapport qualité-prix, le meilleur rapport qualité-coût. En plus, Bogdan Puşcaş a précisé que, pour faciliter l’accès des PMEs, par les nouvelles lois, des règles de partage en lots du marché public seront utilisées.
Quant au président du Conseil de la concurrence, Bogdan Chiriţoiu, il a estimé que : « A coup sûr, il est très important d’adapter notre législation au nouveau paquet de directives. Plusieurs directives de l’Union européenne ont été reprises dans notre législation. Qu’est-ce que ces nouvelles lois devraient-elles permettre, en principe ? Une flexibilité accrue, parce qu’il y a eu beaucoup de plaintes. Je sais que les marchés publics étaient trop rigides, on s’obstinait à choisir le prix le plus bas, ce qui n’entraînait pas nécessairement le meilleur rapport qualité-prix. Ce qui compte beaucoup, c’est de savoir comment ces lois seront appliquées. Pour le Conseil, pour l’autorité en matière de concurrence, ce qui est le plus important, ce sont les normes secondaires et surtout la base de données dans laquelle les marchés publics seront enregistrés. La base, qui est bonne, c’est le Système électronique de marchés publics, bien meilleur que dans d’autres Etats de l’Union, mais nous voudrions pourtant le perfectionner pour pouvoir identifier facilement des comportements suspects. Nous souhaitons donc qu’il soit possible de traiter les données de manière statistique et voir certains modèles de comportements qui pourraient éveiller les soupçons à l’égard d’ententes, de cartels dans le cas des marchés publics que nous pourrions enquêter et sanctionner. »
Bogdan Chiriţoiu s’est également exprimé au sujet des cas de marchés publics examinés par le Conseil de la concurrence : « Suite aux discussions avec la Commission européenne, qui a eu toute une série de questions sur le déroulement des marchés publics en Roumanie, nous examinons effectivement les marchés en matière de TIC et ceux d’équipements médicaux. Il y a des zones où nous constatons que peu de compagnies gagnent les appels d’offres, et ce sont des sociétés qui ont des relations de longue durée avec l’autorité contractante. Des vices à la concurrence apparaissent donc, et ce sont des phénomènes que nous ne pouvons pas nous expliquer par le comportement normal du marché. Je pense que nous disposons de bons instruments. En tout cas, du point de vue des instruments légaux, nous sommes au même niveau que tout autre Etat de l’Union européenne. Qu’est-ce que nous cherchons ? Notre champ de spécialisation, notre zone d’expertise et dans laquelle nous avons des capacités légales, est celle des ententes entre les sociétés participantes à l’appel d’offres. Si vous avez donné des pots-de-vin à la direction de l’autorité contractante, vous n’avez plus besoin de vous entendre avec les autres participants à l’appel d’offres parce que l’autorité contractante prendra soin d’éliminer les concurrents, vous et votre compagnie n’avez plus à vous en occuper. C’est pourquoi beaucoup des problèmes dans les appels d’offres en Roumanie ont leur source dans la corruption, plutôt que dans les cartels. »
L’analyste économique Valentin Ionescu pense, lui, qu’il faut du temps pour que la nouvelle législation soit mise en œuvre de manière efficace : « La mise en œuvre de toute législation aussi vaste que celle à laquelle nous faisons référence présuppose une intégration dans chaque organisation publique. Donc tout le corps de fonctionnaires et de salariés du secteur public doit suivre une formation, processus qui s’inscrit dans la durée. De mon point de vue, cela prendra au moins une année et demie. Cela ne veut pas dire que la législation en matière de marchés publics ne sera pas appliquée, mais un temps de formation est nécessaire pour qu’elle soit mise en œuvre de manière efficace. »
Un effort sera nécessaire pour que chaque autorité publique organise, par le programme de renforcement de la capacité institutionnelle, des cours intensifs qui ne concernent pas seulement l’administration publique centrale, mais aussi les pouvoirs locaux, de manière à ce que ces directives transposées dans la législation interne soient appliquées correctement. (Trad. Ligia Mihaiescu)