Le marché des produits laitiers
Quel avenir pour le marché du lait roumain et européen?
Florin Orban, 07.06.2016, 14:13
La quantité de lait importé en Roumanie au premier trimestre 2016 a augmenté de 54% par rapport à la même période de l’année dernière, dépassant les 38.000 tonnes, fait savoir l’Institut National de la Statistique. En mars 2016, les importations de lait ont augmenté de 62% par rapport à mars de l’année dernière, se chiffrant à près de 13.000 tonnes. Au premier trimestre 2016, les laiteries roumaines ont collecté 220.000 tonnes de la production interne, soit 9% de plus par rapport à la même période de 2015. Le président de la Fédération des Eleveurs de Bovins, Claudiu Frânc, précise: «Vu le contexte européen après la suppression des quotas laitiers au 31 mars 2015, de nombreux fermiers des pays à tradition dans la production de lait – dont la Belgique, les Pays-Bas, la France, le Danemark – ont prévu des croissances importantes de leur production. Ce contexte et l’embargo imposé à la Russie ont généré une pression extraordinaire sur le marché du lait de l’UE, avec des conséquences indirectes sur les fermiers roumains, car il y a eu une surproduction qui devait être écoulée. Elle est allée en Roumanie et dans les pays avec un secteur laitier plus faible et plus désorganisé. Cela a entraîné la chute du prix du lait à la ferme.»
Quel avenir pour le marché du lait roumain et européen? Voici les prévisions de Claudiu Frânc : «Pour faire baisser la production de lait dans les Etats membres de l’Union on encouragera les fermiers à ne pas accroître leurs effectifs, au contraire, de les réduire. Voilà l’approche pour la réduction de la production interne des Etats membres. Une autre mesure concerne les stocks privés. On envisage même de doubler les quantités. En stockant le lait sous forme de lait en poudre écrémé, de beurre, de fromage etc., la pression du marché va sans doute diminuer. Par ce mécanisme nous espérons faire baisser la pression sur le marché roumain, y compris par la réduction des achats de lait – matière première intracommunautaire. Le prix va automatiquement augmenter dans les pays concernés, ce qui permettra aussi aux fermiers roumains de vendre leur lait à un prix plus proche des coûts de production. »
Claudiu Frânc explique comment ont évolué les prix du lait sur le marché roumain: « Si au printemps 2014, lorsque la TVA était de 24%, le prix moyen chez le producteur variait entre 27 et 33 centimes d’euro, en avril 2015 le prix était tombé à 22, voire 17 centimes d’euro le litre. Puis, au moment où la TVA sur les aliments a été réduite à 9%, en juin 2015, le prix d’un litre de lait dans les supermarchés coûtait toujours 1 euro. A présent, les grands producteurs vendent leur lait à des prix allant de 8 à 28 centimes d’euros le litre, et un tarif moyen national de 15 – 18 centimes d’euros. Le prix dans les supermarchés est resté le même : 1 euro. Sur l’ensemble de la chaîne laitière, quelqu’un gagne au détriment du fermier roumain. Ce n’est pas par hasard donc que l’effectif de vaches a baissé, en Roumanie, d’un tiers en 2015 et d’un autre tiers au cours des deux premiers mois de cette année. »
A son tour, le président de l’Association des éleveurs de taurillons « La nouvelle ferme », Cornel Costeliuc, a expliqué que les effectifs d’animaux ont diminué en raison de l’augmentation du prix des fourrages, mais aussi parce que le prix offert par les transformateurs est à la moitié du nécessaire pour atténuer les dépenses. En même temps, le lait et les produits laitiers importés sont moins chers. Malgré un soutien financier important pour les associations d’éleveurs, les petits fermiers sont toujours réticents et ne comprennent pas souvent la législation, constate également Cornel Costeliuc : « Les paysans n’ont pas accès aux conseils. C’est pourquoi nous souhaitons que la Direction Agricole s’y investisse davantage. Nous n’avons pas de Chambres Agricoles dans le milieu rural. Les paysans, les fermiers ont besoins de conseillers pour comprendre les avantages d’une association dans le cadre d’une coopérative. Or, voyez-vous, nous n’avons pas réussi à mettre sur pied une Chambre Agricole solide, qui puisse conseiller les paysans et les fermiers, leur apprendre ce qu’ils doivent faire à l’avenir. »
Pour leur part, les représentants du Ministère de l’Agriculture affirment qu’il faut trouver une solution avec l’Exécutif européen, pour subventionner la collecte du lait. « Il y a une crise européenne du marché laitier, mais la Roumanie la ressent encore plus fortement à cause de la différence de compétitivité entre les producteurs roumains et occidentaux. Le prix dans les supermarchés est un des plus élevés de l’UE, mais le lait chez les producteurs coûte très peu», affirment encore les représentants du ministère de l’Agriculture. (Trad. Valentina Beleavski)