L’adoption de l’euro en Roumanie
70% des crédits accordés aux Roumains sont en euros.
Florin Orban, 07.10.2014, 14:42
En dépit du fait que l’euro n’a pas encore été adopté en Roumanie, la monnaie unique européenne est déjà une réalité de la vie quotidienne des Roumains car 70% des emprunts accordés par le système bancaire sont en euros. C’est toujours en euros qu’on calcule les prix, à partir de la téléphonie mobile et des meubles jusqu’aux voitures et logements, de sorte que les transactions en matière de voitures, terrains et maisons se font en rapport direct à la monnaie unique européenne.
A partir du mois de mai de cette année, la Roumanie s’est fixé comme cible d’adopter l’euro le 1er janvier 2019 . Cette annonce a été faite à Bruxelles par l’ex-ministre délégué au budget, Liviu Voinea, lors d’une réunion des ministres des finances et de l’économie des 28 Etats communautaires après avoir acquis le consensus entre le président roumain et le gouvernement. A son tour, le gouverneur de la Banque Nationale roumaine, Mugur Isàrescu, dit que notre pays a besoin d’un nouveau projet national en ce sens , semblable à celui concernant l’adhésion à l’Union Européenne :
« Un projet national ambitieux et une cible sont nécessaires, nous avons besoin d’un ancre et d’un catalyseur des réformes. Pourtant, ce projet ne doit pas demeurer une simple circulaire ni ne doit être un consensus politique verbal comme à présent mais doit se concrétiser en un véritable programme de développement économique de la Roumanie discuté au Parlement ou sous forme d’un programme comme fut le programme de 2001 pour intégrer l’UE. » Le gouverneur affirme qu’actuellement la Roumanie remplit les cinq critères de convergence nominale nécessaires à l’adoption de l’euro ou les critères établis dans la Traité de Maastricht.
La dette publique est inférieure à 60% du PIB et le déficit budgétaire est inférieur à 3% du PIB. La Roumanie remplit, également, la condition concernant les taux d’intérêt auxquels elle emprunte à long terme et celle visant l’inflation qui ne doit pas dépasser 1,5% de la moyenne des pays les plus performants de la zone euro. La condition concernant la fluctuation de la devise nationale par rapport à l’euro est, également, remplie. Le gouverneur Isàrescu dit qu’à partir du 1-er janvier 2017 la devise nationale roumaine doit intégrer, deux années durant, le Mécanisme Européen des taux de Change, ERM II , au sein duquel le leu ne doit fluctuer que dans un intervalle de +/- 15% vis-à-vis de l’euro. L‘analyste économique Constantin Rudnitzky exprime ses opinions à l’égard de l’adoption de l’euro par la Roumanie :
« La Roumanie s’est fixé comme cible 2019. Il est pour moi difficile d’anticiper si cet objectif sera atteint ou non. Des arguments existent, pro et contre. Les pro viennent du fait que l’intégration de ce groupe relativement select des pays utilisant la monnaie européenne mènerait, sans doute, à un plus de compétitivité pour l’économie roumaine. La grande question demeure si l’économie roumaine est préparée pour le faire. Là , aussi, il y a des arguments pro et contre. Si on compte les pro, on voit que l’économie roumaine est dominée par les grands joueurs internationaux, surtout européens, et, de ce point de vue, elle est préparée. L’économie roumaine compte quelques 70% d’exportations vers l’Union Européenne , échanges intracommunautaires, ce qui veut dire qu’elle est préparée. Il y a des signes d’interrogation, pourtant, à l’égard du train de vie. Nous constatons que des décalages ont été récupérés mais il y en a encore à récupérer, depuis le niveau des salaires qui se trouve quelque part à la moitié de celui européen, jusqu’au niveau des retraites ou l’ensemble de la structure sociale, s’agissant ici de l’éducation, de la santé, qui, à ce que nous pouvons constater, sont assez loin des normes les plus élevés de l’Union Européenne. Dans ce cas, donc, les craintes viennent de ce zones qui signifient la convergence réelle, niveau de vie et système social pas encore adapté aux normes supérieures de l’Union Européenne. »
A son tour, l’économiste en chef de la Banque Nationale roumaine, Valentin Lazea, apprécie que pour être acceptée dans la zone euro ; notre pays doit attendre un niveau minimum de 60% de la moyenne européenne en matière de PIB par habitant :
« Pour parvenir à 60% de la moyenne de l’Union Européenne en matière de PIB par habitant ajusté au pouvoir d’achat , la Roumanie devrait croître pendant 9 ou 10 ans de 2% plus vite que la moyenne de l’Union Européenne. Ce serait la cadence. Par exemple, lorsque l’Union Européenne se reprendra et va marquer une croissance de 1,5%, la Roumanie devra se développer de 3,5% par an. Sommes-nous actuellement sur la position de garantir une croissance de 3,5% ? Non ! Le PIB potentiel se trouve quelque part vers 2% par an. »
Quant à l’adhésion de la Roumanie à la zone euro, le président du conseil Fiscal, Ionut Dumitru, estime que le chois de 2019 comme moment pour attendre cet objectif impose des mesures capables d’implémenter de manière plus accentuée les réformes structurelles, indispensables pour une plus rapide absorption des fonds européens, pour rendre plus efficaces l’activité des compagnies d’Etat et pour accroître la compétitivité et l’assainissement des finances publiques :
« Si nous regardons la situation du point de vue strictement économique, 2019 semble une cible non-réaliste. Si nous y ajoutons les raisons politiques et stratégiques , peut-être bien qu’il faudrait avoir une cible très ambitieuse. Ce n’est pas impossible mais la Roumanie doit faire preuve d’une très rapide convergence dans les années, peu nombreuses, qui sont encore à notre disposition. » Ionut Dumitru précise encore que pour récupérer rapidement les décalages qui nous séparent des pays développés il conviendrait des rythmes de croissance de 4% à 5% chaque année dans la période suivante. (aut :Stefan Baciu, Cristian Mihu, trad. Costin Grigore)