Estimations et résultats économiques
Grâce aux majorations salariales importantes et à la détente fiscale, la Roumanie doit enregistrer en 2016 un pic de croissance de 4,2%.
Florin Orban, 08.03.2016, 14:24
En 2017, la croissance économique du pays baissera légèrement jusqu’à 3,7% – selon les prévisions économiques d’hiver publiées récemment par la Commission européenne. L’exécutif communautaire revoyait ainsi à la hausse ses chiffres concernant la Roumanie – 4,1% pour 2016 et respectivement 3,6 % pour 2017.
L’analyste économique Aurelian Dochia rappelle les facteurs qui déterminent cette croissance en 2016 et 2017 : « Les facteurs sont assez bien connus et la Commission Européenne les souligne, elle aussi. Il s’agit de la baisse des taxes et des impôts et des majorations salariales. C’est ce qui a eu pour effet une augmentation du pouvoir d’achat en 2015 et en 2016 aussi. De ce fait, la demande a, elle aussi, augmenté, stimulant la production et faisant progresser le PIB. En effet, la Roumanie est le deuxième Etat de l’UE, après l’Irlande, à enregistrer une croissance économique importante en 2016. Pourtant il faut souligner que, aux yeux de la Commission européenne, cette croissance n’est pas soutenable. Aussi, en 2017, la croissance devrait-elle ralentir en Roumanie et se chiffrer à 3,7% contre 4,2% en 2016, rappelons-le. Cela signifie que la croissance a été stimulée de manière un peu artificielle, ce qui peut engendrer certains déséquilibres. Par exemple, le déficit budgétaire doit augmenter en 2016 et surtout en 2017, lorsqu’il devrait atteindre 3,8%, dépassant la cible de 3%, fixée par les normes européennes. La Roumanie court donc le risque de faire de nouveau l’objet d’une procédure pour déficit excessif. La dette publique augmentera, elle aussi. Ce pic prévu pour 2016 traduit en fait une croissance fondée plutôt sur l’endettement, pour ainsi dire. »
Récemment, l’Institut National de la Statistique a fait savoir qu’en 2015, la Roumanie a enregistré une croissance de 3,7%. L’analyste économique Aurelian Dochia explique: «Les mêmes facteurs pris en compte pour les prévisions de l’UE sont entrés en jeu en 2015, à savoir la réduction des taxes et des impôts et les majorations salariales. Car, rappelons-le, l’impact de ces facteurs a commencé à se faire sentir depuis un an déjà, depuis que le gouvernement a appliqué des mesures pour augmenter le salaire minimum et ramener les salaires diminués dans le secteur public à leur niveau antérieur. Plusieurs mesures ont été prises, qui ont augmenté les revenus de la population, ce qui a fait augmenter la consommation. Ce processus se poursuivra en 2016 aussi, pourtant, sur le long terme, la croissance ne semble pas soutenable et il faudra remplacer ce facteur de croissance par un autre. »
A son tour, l’économiste en chef de la Banque nationale de Roumanie, Valentin Lazea, estime que notre pays doit décider s’il se veut un exportateur compétitif ou un marché pour les étrangers. C’est en fonction de cette décision qu’il faudra choisir des politiques économiques adéquates, car il y a une différence significative entre une politique fiscale de réduction de la TVA, une politique monétaire d’appréciation de la monnaie nationale et une politique structurelle quasi stationnaire. Le principal objectif en est de stimuler la consommation. Comment ? D’abord en stimulant la production à l’aide d’une politique fiscale qui vise à réduire les contributions à la sécurité sociale. Ensuite, en soutenant les exportations par une politique monétaire qui table sur une légère dépréciation du taux de change.
Enfin, on peut opter pour une politique structurelle fondée sur la poursuite des réformes et visant à améliorer la capacité administrative, explique encore Valentin Lazea. Ecoutons-le: «Si la capacité de production interne ne peut pas couvrir la demande de consommation croissante, alors le déficit extérieur augmentera et il faudra le financer en augmentant la dette publique et privée. De même, stimuler un pays avec le niveau de développement économique actuel de la Roumanie, c’est courir le risque de faire plonger le pays dans le piège du revenu moyen. C’est un piège dans lequel tombent la plupart des pays qui atteignent les 10.000 dollars par habitant ; ils se disent : « allez, on peut s’arrêter, on a fait suffisamment d’efforts jusqu’ici ». Le 3e problème qui surgit de cette attitude consumériste, c’est qu’il faut faire la différence entre deux types de consommation. Explication : depuis 2009 jusqu’au 2e trimestre de cette année, nous devons stimuler la consommation dans un contexte où il y a un déficit de demande. Mais à partir du 3e trimestre 2016 on aura un excès de demande, ce qui favorisera la hausse de l’inflation et / ou des importations. »
L’économiste en chef de la Banque nationale de Roumanie précise aussi que les pays ayant misé sur les exportations pour se développer ont dépassé plus facilement la crise économique mondiale et ont réussi à éviter le piège du revenu moyen. Quant à la Roumanie, parmi ses atouts comptent une bonne intégration économique avec l’UE, une économie locale toujours dominée par le capital roumain, plus de la moitié des investissements étrangers directs sont dans des domaines d’activité avec un grand potentiel d’exportation et une partie importante des exportations est liée au domaine des hautes et moyennes technologies. (Trad : Dominique, Valentina Beleavski)