Défis du marché européen de l’emploi
Des changements de la relation de travail entre employeurs et salariés sont nécessaire pour stabiliser l'économie de l'Europe à long terme.
Florin Orban, 08.08.2017, 13:29
Léconomie européenne semble avoir enfin trouvé la sortie dune crise qui dure depuis trop longtemps. La relance est néanmoins fragile et les prévisions ne sont pas vraiment rassurantes. Les experts considèrent que les solutions pour stabiliser léconomie de lEurope à long terme devraient passer par des changements de la relation de travail entre employeurs et salariés. Or, pour cela, un dialogue social continu et constructif est essentiel et cest à quoi veille le Comité économique et social européen.
Dans une interview à Radio Roumanie Internationale, Jacek Krawczyk, président du Groupe des employeurs au CESE, a énuméré les défis actuels en matière de dialogue social européen : «Il est évident que, pour assurer un haut niveau de protection sociale et des systèmes de sécurité sociale efficaces, nous avons besoin dune économie compétitive. Et je crois que lidée dune économie compétitive, dentreprises compétitives, pour le bien de la société et des citoyens, gagne de plus en plus de terrain. On ne parle donc plus de lintérêt des uns ou des autres, on ne joue plus à « qui en est responsable » ; je pense que nous discutons toujours plus ouvertement de ce quil faudrait faire pour que léconomie européenne renoue avec le succès. La nouvelle réalité est celle dune économie compétitive dans lintérêt dune économie sociale, et cette réalité va au-delà du traditionnel conflit entre employeurs et salariés, centré sur des discussions interminables autour de salaires, temps de travail, hygiène et sécurité au travail… Je crois que nous avons, dans lUnion européenne, un niveau très élevé de protection sociale, de protection du travail, que nous avons un marché de lemploi très civilisé, le plus développé au monde, sans aucun doute. Nous voulons voir ce qui peut être amélioré, mais notre point de départ se situe déjà à un niveau très élevé, ce qui implique davantage de défis. »
Pour pouvoir faire face aux défis sociaux imposés par les nouvelles réalités économiques, la Commission européenne a lancé un débat sur ce quelle appelle le Socle européen des droits sociaux. Il sagit, en fait, de définir un certain nombre de principes et de droits fondamentaux en vue de garantir le bon fonctionnement des marchés du travail et des systèmes de protection sociale. Il indiquera la direction à suivre pour renouer avec la convergence vers de meilleures conditions de vie et de travail dans tous les États membres participants.
Le Comité économique et social européen sest fortement impliqué dans ce débat, affirme Jacek Krawczyk, président du Groupe des employeurs au CESE : «Nous venons de finaliser un document dont jai été un des trois rapporteurs. Je voudrais vous dire, tout dabord, que notre Comité, formé demployeurs, syndicats et ONG, a trouvé, en son sein, une position unanime, ce qui est un véritable exploit. Les défis auxquels nous sommes confrontés concernent lavenir du travail, à lépoque de la révolution numérique qui entraîne des changements des relations de travail et du marché de lemploi. Un grand nombre demplois disparaîtront, dautres seront créés, et la question que nous nous posons est de savoir comment lUE répondra à cette situation. Au lieu de nous contredire les uns les autres, suivant les conflits traditionnels, pour ainsi dire, nous avons décidé de regarder vers lavenir. Nous savons, bien sûr, quil va falloir aider les citoyens à acquérir de nouvelles compétences, opérer des changements dans les systèmes déducation, appuyer la mise en place dinfrastructures solides pour la recherche, le développement et linnovation. La révolution numérique est un défi majeur du marché communautaire de lemploi, même si certains de nos concitoyens ne le comprennent pas encore. Mais il faut être conscient du fait que cest un train à grande vitesse et que, si on ne bouge pas vite, on ne montera pas à bord ; alors, des pays comme les Etats-Unis ou la Corée prendront le devant dans les décennies à venir. »
Jacek Krawczyk, président du Groupe des employeurs au CESE, a ajouté plusieurs aspects concrets : « Il y a, bien sûr, le problème de lavenir de certains systèmes, tels ceux de retraites. Il faudra trouver une modalité de maintenir, dans toute responsabilité, les systèmes de santé, plusieurs services publics, les systèmes de retraites, et nous avons réussi à nous mette daccord sur une opinion commune. Les collègues syndicalistes ont dû diminuer leurs attentes, parce quau début, certains dentre eux voulaient un socle des droits sociaux qui établisse des normes, mais je crois que les discussions ont avancé. Il y aura des normes, cest sûr, mais dans un cadre plus large, dinstruments législatifs ou non, de bonnes pratiques, en utilisant, par exemple, le mécanisme du semestre européen. Le CESE considère que le socle doit avoir un vrai sens aux yeux des citoyens. On parle beaucoup aujourdhui de la faille qui sest creusée entre les institutions et les initiatives de lUE, dune part, et les citoyens européens, de lautre ; nombreux sont ceux qui pensent, comme moi, que cette faille est trop profonde… Si nous voulons la combler, nous devons faire en sorte que les citoyens continuent à sintéresser à lUE, et que lUnion elle-même leur offre de la sécurité, des opportunités de prospérité et, tout comme avant, de la paix, de la coopération… La sécurité et la prospérité des catégories les plus larges de la société sont les raisons de la mise en place du Socle des droits sociaux. »
Les attentes des européens restent, certes, élevées, malgré leuroscepticisme qui monte dans les sondages. Les élections prévues cette année dans des pays importants, tels la France et lAllemagne, pèseront dans la mise à jour du modèle social européen, avec des effets majeurs sur la réforme du marché européen du travail. (Trad. Ileana Taroi)