Scandale politique à Bucarest
« Cela met la Roumanie dans une situation impossible » – a déclaré le président Klaus Iohannis après que la DNA a annoncé le lancement d’une poursuite pénale contre le premier ministre et président du PSD Victor Ponta. « J’appelle le premier ministre à présenter sa démission », a conclu le chef de l’Etat, dans une déclaration publique à l’issue d’un bref entretien, avec le chef du gouvernement, ce vendredi après-midi.
Bogdan Matei, 05.06.2015, 18:09
« Cela met la Roumanie dans une situation impossible » – a déclaré le président Klaus Iohannis après que la DNA a annoncé le lancement d’une poursuite pénale contre le premier ministre et président du PSD Victor Ponta. « J’appelle le premier ministre à présenter sa démission », a conclu le chef de l’Etat, dans une déclaration publique à l’issue d’un bref entretien, avec le chef du gouvernement, ce vendredi après-midi.
Afin de rendre la situation effectivement impossible, celui-ci a écrit sur les réseaux sociaux que, seul, le Parlement, qui l’avait nommé à ces fonctions, était en mesure de le démettre. « Je crois que le respect des principes constitutionnels est essentiel pour notre société et en aucun cas je ne peux accepter qu’un procureur de la DNA se place au-dessus du Parlement, du gouvernement et des citoyens de ce pays ! », a répondu le premier ministre à l’annonce faite par les procureurs anti-corruption.
M. Ponta est soupçonné de faux en écriture sous seing privé, complicité d’évasion fiscale de façon continue et blanchiment d’argent, du temps où il était avocat, dans une affaire de corruption liée à la signature de contrats d’assistance juridique aux compagnies énergétiques Turceni et Rovinari (sud-ouest). Dans cette affaire, la poursuite pénale porte également sur trois conflits d’intérêts dans l’exercice des fonctions de premier ministre.
Tous ces faits seraient liés à un autre personnage politique, le sénateur social-démocrate Dan Şova qui se retrouvait cette semaine à la Une des quotidiens de Bucarest. Mardi, les sénateurs sociaux-démocrates avaient à nouveau fait barrage devant lui, rejetant pour la deuxième fois en trois mois la demande des procureurs anti-corruption visant l’arrestation de Dan Şova, accusé de complicité d’abus de fonction, dans la même affaire Turceni-Rovinari. Il aurait empoché plusieurs centaines de milliers d’euros suite à des achats effectués par les deux compagnies énergétiques, ce qui avait porté à l’Etat un préjudice de plus de 16 millions d’euros. Depuis des semaines déjà, la presse roumaine avait affirmé qu’une partie de cet argent était arrivé dans les comptes de Victor Ponta lui-même, le passage éphémère de Dan Şova au poste de ministre des Transports n’étant, en fait, qu’un geste de remerciement du premier ministre, selon les journalistes roumains.
Après le refus du chef du Cabinet de quitter son poste, les analystes s’abstiennent plutôt d’envisager des scénarios d’issue. Aux côtés de ses partenaires de l’Union nationale pour le progrès de la Roumanie, le Parti conservateur et le Parti libéral-réformateur, le Parti social-démocrate dispose d’une majorité confortable au Parlement, ce qui réduit, voire épuise, les chances de la motion de censure déposée vendredi par le Parti national libéral, principal pilier de l’opposition, au sujet du vote par correspondance pour la diaspora.
La solution de cette crise dépend exclusivement des sociaux-démocrates, de leur disponibilité à sauver leur image, déjà sérieusement entachée par les nombreuses accusations de corruption visant nombre d’entre eux. Le prix à payer est maintenant le sacrifice du chef qui les avait à nouveau portés au pouvoir, il y a trois ans, selon les commentateurs roumains. (trad.: Ileana Ţăroi, Andrei Popov)