Les régimes spéciaux de retraite, supprimés ou pas?
En ce début d’année électorale, marquée par des élections municipales et législatives, la classe politique roumaine ne cesse de proposer des initiatives que le public pourrait apprécier. Mardi, la Chambre des Députés de Bucarest a adopté dans le cadre d’une réunion extraordinaire un projet de loi sur l’abrogation des soi-disant retraites « spéciales ».
Bogdan Matei, 29.01.2020, 13:30
En ce début d’année électorale, marquée par des élections municipales et législatives, la classe politique roumaine ne cesse de proposer des initiatives que le public pourrait apprécier. Mardi, la Chambre des Députés de Bucarest a adopté dans le cadre d’une réunion extraordinaire un projet de loi sur l’abrogation des soi-disant retraites « spéciales ».
Malgré un score décisif – soit 247 voix pour, aucune voix contre et 21 abstentions – les débats ont été acharnés. L’actuel pouvoir politique, tout comme l’ancien, c’est-à-dire le Parti national libéral et respectivement le Parti Social-Démocrate, se sont accusés l’un l’autre d’avoir été les premiers à privilégier par le passé certaines catégories professionnelles. L’Union démocrate magyare de Roumanie et l’Alliance des libéraux et des démocrates ont demandé l’ajournement des débats, alors que l’Union Sauvez la Roumanie a demandé, entre autres, le plafonnement des retraites des magistrats.
En fin de compte, les élus nationaux ont éliminé les régimes spéciaux des pensions de retraite dans le cas de plusieurs catégories de fonctionnaires, à savoir : sénateurs et députés, juges et procureurs, personnel auxiliaire des tribunaux et des parquets, fonctionnaires publics au statut spécial, membres du corps diplomatique et consulaire et de la Cour Constitutionnelle ainsi que pilotes et personnels aéronautiques. Jusqu’ici, ceux-ci recevaient tous des pensions de retraite qui ne respectaient pas le principe de la contribution, étant fréquemment qualifiées d’injustes, d’inéquitables et de véritable défi à l’adresse de millions de retraités pauvres. Les seuls à en être épargnés sont les anciens militaires, policiers et officiers des renseignements.
Les amendements portant sur la suppression des rentes viagères accordées aux sportifs et des indemnisations que reçoivent les artistes, les scientifiques et les membres des unions de créateurs ont également été exclus du projet de loi. Le leader des députés libéraux, Florin Roman a déclaré que par l’élimination des retraites « spéciales », les autorités trouveront, du moins partiellement, les ressources financières nécessaires pour majorer, comme prévu, toutes les retraites et les allocations familiales.
Le président de l’Union Sauvez la Roumanie, Dan Barna, a souligné à son tour que le document législatif contenait des éléments qui pourraient être contestés à la Cour Constitutionnelle. Il a proposé, pourtant sans succès, que le régime spécial des retraites des magistrats soit gardé, mais avec un certain plafonnement. Le leader des députés sociaux-démocrates, Alfred Somonis, affirme que si le texte législatif s’avère inconstitutionnel, il sera sans doute modifié par le Parlement. Pour sa part, Alina Corbu, présidente de la Haute Cour de Cassation et de Justice a déjà averti que la loi contrevenait à une décision antérieure de la Cour Constitutionnelle. Juste après le vote du plénum de la Chambre des Députés, elle affirmait que les pensions des magistrats faisaient partie de toute une série de garanties qui assuraient effectivement l’indépendance et l’impartialité de l’autorité judiciaire.
L’inspection judiciaire et les associations des magistrats avaient, à leur tour, déclaré que l’élimination des régimes spéciaux des retraites transgressait « brutalement », les principes de l’indépendance et de l’inamovibilité des juges, tout comme des articles de la Constitution et des décisions de la Cour européenne des Droits de l’Homme. (Alexandru Diaconescu)