Les moteurs de la justice sont emballés
Ces deux dernières années , la Direction Nationale Anticorruption (DNA) — fer de lance dans la lutte contre le fléau qui mine encore les fondations de l’administration roumaine — a réussi à récupérer, non pas seulement au chapitre image, le terrain perdu. A travers la pluie de dossiers ouverts dont beaucoup ont été finalisés par des condamnations fermes d’emprisonnement, DNA a modelé la certitude que personne, quelle que soit sa notoriété, la fonction occupée, la couleur politique ou l’influence n’est pas en dessus de la loi. Argument supplémentaire, en première dans l’histoire judiciaire de la Roumanie post-communiste, un dossier pénal a été ouvert à l’encontre d’un procureur-chef en fonction.
Florentin Căpitănescu, 21.11.2014, 13:28
La chef de la Direction d’Investigation des Infractions de Criminalité Organisée et Terrorisme(DIICOT) — par ailleurs une structure bien appréciée- Alina Bica, a été retenue dans un dossier où la DNA l’accuse d’abus de fonction. Cette infraction aurait été commise tandis que la chef de la DIICOT était sous-secrétaire d’Etat au Ministère de la Justice et membre d’une commission chargée de restituer des terrains. On lui impute qu’en 2011 avec deux collègues de la même commission, enquêtés à leur tour, elle aurait facilité le payement d’un dédommagement sur-évalué pour un terrain de 13 hectares en banlieue de la capitale. Le préjudice pour l’Etat serait de plus de 62 millions d’euros.
Par ailleurs, le même jeudi, la Cour Suprême a accepté la demande des procureurs anti-corruption de retenir à titre préventif pour 30 jours le député du Parti Social Démocrate( au gouvernement), Ioan Adam qui est impliqué dans un dossier de rétrocessions illégales de terrains qui aurait fait perdre quelques 300 millions d’euros à l’Etat. La Cour Suprême a aussi décidé que le député du Parti Conservateur( au gouvernement), Ion Dinità, soit enquêté en liberté sous contrôle judiciaire. Dinità est soupçonné d’avoir bénéficié de contrats financés par le denier publique dans le département de Brasov(au centre) par violation des normes légales. Dans ce cas, le préjudice estimé par la DNA s’élèverait à plus de sept millions d’euros.
Les deux décisions de la Cour Suprême ne sont pas définitives mais ces trois dossiers ne représentent pourtant rien de nouveau dans l’actuel paysage juridique roumain car ces trois sujets d’enquête, membres du corps de l’administration centrale et les techniques utilisées pour siphonner le denier publique — transaction financière sur-évaluée, rétrocession illégale et contrat dédié — forment des cas de corruption devenues déjà classiques. La situation ne saurait être différente du moment où DNA instruit actuellement non moins de 4800 dossiers, chiffre confirmé par la procureur chef de l’institution elle même, Laura Codruta Kövesi. Le message de la chef de la DNA pour les corrompus, en dépit de leurs méthodes au jour le jour plus ingénieuses, est : « ils ne sont pas plus habiles que nous » (trad. Costin Grigore)