Le 10 août, 5 ans après
Ce fut le 10 août 2018 que les représentants des Roumains qui vivent à l’étranger ont organisé à Bucarest un grand rassemblement contre le gouvernement de gauche de l’époque. Il était accusé dès son installation en janvier 2017, de mener une tentative de détournement de la réforme dans la Justice pour que le leader social-démocrate de l’époque Liviu Dragnea et ses proches s’échappent aux dossiers de corruption qui les visaient. La manifestation qui a réuni des dizaines de milliers de personnes s’est achevée par l’intervention en force, jugée disproportionnée et en bonne mesure injustifiée des forces de l’ordre. En 2018, les procureurs antimafia et antiterrorisme ont ouvert un dossier qui a été classé deux ans plus tard et rouvert au printemps de l’année dernière à la suite de la contestation d’un seul et unique protestataire.
Ştefan Stoica, 09.08.2023, 11:16
Désormais, le Parquet général a annoncé que les chefs de la gendarmerie de l’époque, mais aussi d’autres cadres de l’institution seraient jugés pour des faits tels abus de fonction, faux intellectuel et comportement abusif. Selon les procureurs, le 10 août 2018, à l’occasion de la protestation qui a eu lieu à Bucarest, devant le siège du Gouvernement, le commandant de l’action policière et ses coordinateurs, tous colonels de la gendarmerie, ont rempli leurs attributions d’une manière déficitaire et ont ordonné à leurs subordonnés d’intervenir en force en vue de disperser d’une manière illégale toute la masse de protestataires qui y étaient présents. Selon les procureurs, les actions des inculpés ont eu comme conséquence la limitation du droit à la liberté de réunion et à l’intégrité physique et psychique des protestataires. Plus de 400 personnes ont eu à souffrir physiquement et ont eu besoin d’une cinquantaine de jours de soins médicaux.
Suite à l’enquête, l’intervention en force des gendarmes a été jugée contraire aux principes de la nécessité, de la gradualité et de la proportionnalité, des principes consacrés par les réglementations légales en la matière et reflétées dans la jurisprudence de la Cour européenne des Droits de l’Homme. Les gendarmes auraient agi non seulement contre les personnes qui protestaient d’une manière violente en vue de les isoler et d’appliquer ainsi des mesures légales, mais aussi contre des personnes qui protestaient pacifiquement, soit la vaste majorité des protestataires. Les militaires de la gendarmerie ont jeté à cette occasion des grenades à effet acoustique, irritant, et lacrymogène et pulvérisé du gaz irritant à partir de cartouches de grande capacité. Selon le Parquet, sur la totalité des personnes blessées, quelque 300 se sont constituées partie civile dans l’affaire.
La communauté Declic, une plate-forme de pétitions, d’appels à l’action et d’activisme en ligne, créée exclusivement en Roumanie a demandé au Tribunal militaire de Bucarest de traiter d’urgence le dossier du 10 août puisque trois ans nous séparent seulement de la prescription des faits et les personnes coupables pourraient ainsi s’échapper à la Justice. Les membres de la communauté Declic se rendront sur la Place de la Victoire ce 10 août pour demander que la Justice soit rendue aux victimes des abus commis par les gendarmes en 2018.