La Roumanie et l’embargo russe
Bogdan Matei, 25.08.2014, 13:30
Le contentieux commercial ayant des ressorts politiques et géopolitiques et opposant l’Occident à la Russie s’annonce déjà une guerre sans gagnants. Suite à l’annexion purement stalinienne de la péninsule ukrainienne de Crimée par Moscou, l’UE et les Etats-Unis ont imposé des sanctions économiques à la Russie. Une fois devenue évidente l’implication des Russes dans la rébellion sécessionniste en cours dans l’est de l’Ukraine, les occidentaux ont décidé de durcir ces sanctions. En réplique, le Kremlin a décrété début août un embargo sur les importations de produits agricoles et alimentaires en provenance de l’Occident. Le résultat: en Russie, des étals et des rayons sont restés vides alors que les Européens ont perdu un débouché important pour leurs fruits et légumes.
Selon le commissaire européen à l’Agriculture, le Roumain Dacian Ciolos, parmi les Etats membres de l’UE, la Pologne est le pays le plus touché par la décision russe, vu que ses exportations sur ce marché se montaient à 800 millions d’euros par an. Viennent ensuite l’Allemagne, avec des exportations d’environ 600 millions, les Pays Bas, avec plus de 500 millions et les Pays Baltes, dont notamment la Lituanie, avec plusieurs centaines de millions.
Réticente depuis toujours à l’idée de lier son économie à une Russie qui a transformé ses relations commerciales en un instrument de ses ambitions expansionnistes, la Roumanie est frappée dans une moindre mesure par l’embargo russe. Son impact plutôt indirect sur les producteurs roumains est dû aux déséquilibres apparus sur les marchés d’autres Etats européens. Le ministre roumain de l’Agriculture, Daniel Constantin, a précisé que les ventes sur le marché russe dépassaient à peine les 40 millions d’euros, soit moins de 2,3% des exportations agroalimentaires de la Roumanie. Le manque à gagner du secteur agricole de Roumanie est déjà estimé à plus de dix millions d’euros, a précisé le responsable roumain. Pire encore, le marché roumain risque d’être envahi par les fruits et légumes destinés initialement à la Russie et donc de faire face à une concurrence agressive. Dans un entretien à Radio Roumanie Internationale, le commissaire européen à l’agriculture, Dacian Cioloş affirmait qu’une partie de la production locale pourrait être distribuée gratuitement, des fonds européens devant par la suite être alloués pour compenser les pertes. Bruxelles a déjà décidé d’octroyer 125 millions d’euros afin de maintenir ce que Cioloş appelle l’équilibre entre l’offre, d’une part, les prix et donc les revenus des agriculteurs, de l’autre.
Le responsable européen a par ailleurs souligné que tous les maraîchers, syndiqués ou non, qui ne peuvent plus exporter leurs produits vers la Russie sont éligibles aux mesures d’appui. Le ministre roumain de l’agriculture pense que le montant approuvé par la Commission européenne n’était pas suffisant et que les décideurs européens devaient prendre en compte aussi d’autres mesures de soutien. (trad. : Alexandra Pop, Mariana Tudose)