La démission du ministre de la Justice
Le 31 janvier dernier, tard dans la soirée, le gouvernement roumain adoptait le déjà célèbre décret d’urgence qui opérait des modifications discutables aux Codes pénal et de procédure pénale. Depuis, leur initiateur, le ministre de la Justice du moment, Florin Iordache, s’est transformé en la cible favorite des critiques et des ironies mordantes lancées par les manifestants antigouvernementaux. Au côté, inévitablement, du chef de son parti, le leader du Parti social-démocrate (PSD) Liviu Dragnea, considéré comme le principal bénéficiaire de la dépénalisation de certains faits opérée par le décret d’urgence tant décrié.
Ştefan Stoica, 10.02.2017, 12:55
Le 31 janvier dernier, tard dans la soirée, le gouvernement roumain adoptait le déjà célèbre décret d’urgence qui opérait des modifications discutables aux Codes pénal et de procédure pénale. Depuis, leur initiateur, le ministre de la Justice du moment, Florin Iordache, s’est transformé en la cible favorite des critiques et des ironies mordantes lancées par les manifestants antigouvernementaux. Au côté, inévitablement, du chef de son parti, le leader du Parti social-démocrate (PSD) Liviu Dragnea, considéré comme le principal bénéficiaire de la dépénalisation de certains faits opérée par le décret d’urgence tant décrié.
L’acte normatif a d’ailleurs été abrogé dimanche dernier, lorsqu’un demi-million de personnes ont protesté dans la rue, à Bucarest et en province, des gens unis par leur volonté de dénoncer le contenu douteux du décret en question et son adoption en catimini. Florin Iordache a survécu quatre jours à son œuvre, confirmant ainsi les propos du président Klaus Iohannis, de l’avis duquel il fallait s’attendre à une démission ou bien à une destitution pénible. C’est jeudi que Florin Iordache a démissionné, même s’il n’avait rien à se reprocher : « Toutes les initiatives assumées sont légales et constitutionnelles. Les projets proposés, ou qui font déjà l’objet d’un débat public mis en œuvre par le ministère de la justice, sont actuellement débattus au Parlement ; l’opinion publique a pourtant jugé que ce n’était pas suffisant et j’ai donc décidé de présenter ma démission des fonctions de ministre de la justice. »
Florin Iordache n’a que partiellement raison. En effet, ses initiatives sont légales, la Cour constitutionnelle l’a dit, en rejetant les saisines déposées par le Conseil supérieur de la magistrature et par le président de la République au sujet de conflits institutionnels qui auraient pu se produire pendant le processus d’adoption du décret. Dans le même temps, les juges constitutionnels n’ont pas décidé de la constitutionalité de ces initiatives, rejetant la saisine sur le fond déposée par le défenseur des droits pour la simple raison que le décret abrogé n’existe pratiquement plus. Certains commentateurs affirment qu’une analyse du contenu aurait dû avoir lieu.
La classe politique est partagée sur la démission de Florin Iordache. Pour les principaux partis de l’opposition parlementaire, le Parti national libéral (PNL) et l’Union sauvez la Roumanie (USR), c’est un geste qui ne fournit aucune garantie contre d’autres abus probables du gouvernement ou de la majorité Parti social-démocrate (PSD) – Alliance des libéraux et des démocrates (ALDE). Pour le PNL et l’USR, qui sont d’accord avec la rue, le fait de sacrifier celui qu’ils appellent un exécutant du patron des sociaux-démocrates, Liviu Dragnea, est insuffisant ; de l’avis des deux partis politiques, M. Dragnea lui-même et le premier ministre, Sorin Grindeanu, devraient aussi démissionner, en assumant l’erreur de façon solidaire.
Par contre, le leader des sénateurs sociaux-démocrates, Şerban Nicolae, n’est pas d’accord avec la démission de Florin Iordache de ses fonctions à la tête du ministère de la justice. Toutefois, il y a eu des voix au sein du PSD qui ont déploré le préjudice d’image causé par le décret de Iordache, à un moment où l’euphorie de la victoire incontestable au scrutin du 11 décembre ne s’était pas encore dissipée.