La controversée ordonnance 114, débattue par le Sénat
Bogdan Matei, 18.02.2019, 13:20
Après avoir été l’objet de vifs débats
publics, l’ordonnance d’urgence 114 sera débattue cette semaine par le Parlement
roumain. L’acte normatif en question introduit de nouvelles mesures fiscales et
budgétaires. Parmi elles, la très contestée « taxe sur la cupidité »,
qui prévoit la taxation supplémentaire des compagnies de télécommunications, énergétiques
et des institutions bancaires, qui obtiendraient, selon la majorité de gauche, des
profits inhabituellement et immoralement élevés. Les sénateurs de la commission
Budget-finances présenteront, mardi, un rapport final sur le décret en question.
Les parlementaires de l’opposition de droite demandent non pas la modification,
mais carrément le rejet du document, car, à leur avis, les mesures affecteraient
des secteurs essentiels, comme la sécurité énergétique, le secteur bancaire ou
l’industrie de télécommunications. Le leader du Parti national libéral, la
première voix de l’opposition, Ludovic Orban, averti que l’ordonnance aura également
un impact négatif sur les fonds privés de pensions : « L’ordonnance
114 requiert un capital social minimum 11 fois supérieur au capital souscrit
aujourd’hui. A ce jour, les gérants des fonds de pensions de retraite n’ont pas
récupéré intégralement leurs investissements initiaux. Suite à cette obligation
d’augmenter le capital social en fonction des actifs, les gérants mettront entre
35 et 50 ans pour récupérer leurs investissements. »
Le président du Sénat et le leader de l’Alliance
des libéraux et des démocrates, partenaire au gouvernement du Parti
Social-démocrate, Călin Popescu-Tăriceanu, n’exclue pas la possibilité de la
modification de l’ordonnance : « J’ai
déjà discuté avec la première ministre Viorica Dăncilă et je lui ai expliqué
que cette taxe de 2% pour les compagnies du secteur énergétique affectait gravement
leurs possibilités de développement futur. Madame la première ministre a
consenti que cette taxe était excessive, nous devons analyser les choses et il
est très probable que nous puissions renoncer à cette taxe de 2%. »
Le document de loi, décrit par certains, avec
pathos justicier ou bien avec sarcasme, comme « l’ordonnance de la
cupidité », doit être débattu et voté par le Sénat avant le 1er
mars. Il sera ensuite envoyé à la Chambre des députés, chambre décisionnelle en
la matière. En théorie, en dehors de la scène politique, mais, en pratique, de
plus en plus critique par rapport aux initiatives sur le plan économique de la
majorité, la Banque centrale n’a pas caché sa réticence en ce qui concerne les
mesures de l’ordonnance 114. L’économiste en chef de la Banque nationale
roumaine, Valentin Lazea, affirme que la taxe sur les actifs prévue par cette
ordonnance pourrait faire baisser la rentabilité du système bancaire roumain en
dessous de la moyenne européenne. Si cela arrivait, prévient-il, le retrait des
banques étrangères du marché roumain ne serait pas exclu. Valentin Lazea demande
aux hommes politiques de décider s’ils souhaitent avoir un système bancaire
fort, profitable, qui fournit du capital pour les investissements ou bien un
système asservit, qui alimente la consommation, mais pas le développement de la
Roumanie. (Trad. Elena Diaconu)