Des lois vivement contestées
Installé au pouvoir en novembre dernier, après avoir destitué par motion de censure le cabinet social-démocrate, le gouvernement libéral de Ludovic Orban est en fait très fragile. Et pour cause. Les libéraux ne comptent que pour 20% du total des parlementaires de Bucarest et souvent les votes de leurs alliés de l’Union Sauvez la Roumanie (USR) et du Parti du Mouvement Populaire (PMP) ne leur suffisent pas pour faire passer leurs projets. Et comme au sein du Législatif de Bucarest les alliances sont éphémères et se tissent en fonction d’intérêts ponctuels, le gouvernement a préféré, à plusieurs reprises, engager sa responsabilité pour opérer plus vite des modifications législatives.
Bogdan Matei, 30.01.2020, 14:34
Installé au pouvoir en novembre dernier, après avoir destitué par motion de censure le cabinet social-démocrate, le gouvernement libéral de Ludovic Orban est en fait très fragile. Et pour cause. Les libéraux ne comptent que pour 20% du total des parlementaires de Bucarest et souvent les votes de leurs alliés de l’Union Sauvez la Roumanie (USR) et du Parti du Mouvement Populaire (PMP) ne leur suffisent pas pour faire passer leurs projets. Et comme au sein du Législatif de Bucarest les alliances sont éphémères et se tissent en fonction d’intérêts ponctuels, le gouvernement a préféré, à plusieurs reprises, engager sa responsabilité pour opérer plus vite des modifications législatives.
La plus récente porte sur l’élection des maires en deux tours de scrutin, au lieu d’un seul, comme c’est le cas actuellement. Une décision qui agite de nombreux esprits au sein de la classe politique roumaine. Pour sa part le premier ministre Ludovic Orban, aux côtés des partisans politiques de ce changement et des voix de la société civile, estime que ce passage à deux tours de scrutin conférera davantage de légitimité aux élus. Leur objectif est de limiter les situations similaires à celle de Galati (ville port sur le Danube, sud-est) où le maire actuel a été voté par seulement 9% des électeurs. Craignant de perdre ses postes de maires, le Parti Social-Démocrate (PSD), désormais dans l’opposition mais toujours majoritaires au sein du Législatif, a bloqué le projet de loi dans la commission parlementaire spécialisée et a fait savoir qu’il déposerait une motion de censure si la loi est changée. La motion bénéficiera aussi du soutien de l’Union Démocrate-Magyare de Roumanie (UDMR), qui souhaite conserver le monopole politique détenu dans de nombreuses villes transylvaines à forte population d’ethnie magyare.
Le leader par intérim des sociaux – démocrates, Marcel Ciolacu, met en évidence le fait que la Cour constitutionnelle a déjà décidé que le gouvernement ne peut pas engager sa responsabilité sur des textes normatifs se trouvant en débat au Parlement. Si la motion de censure ne passe pas, le PSD en saisira la Cour Constitutionnelle, a encore précisé Marcel Ciolacu. Les sociaux-démocrates ont aussi déposé une plainte auprès de la Commission de Venise, par l’intermédiaire de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. Toutefois, le PE a rejeté la demande du PSD de débattre le problème au plénum de Strasbourg.
Mais ce n’est pas la seule lutte politique qui se mène ces jours-ci à Bucarest. La suppression des régimes spéciaux des pensions de retraite suscite autant de controverses. Cette fois-ci, ce sont les magistrats qui contestent la décision du gouvernement. Mardi, la Chambre des Députés a adopté, par 247 voix pour et aucune voix contre, la loi qui abroge les retraites dites spéciales des parlementaires, des juges, des procureurs et des personnels auxiliaires spécialisés des tribunaux et des parquets. S’y ajoutent les fonctionnaires publics ayant un statut spécial, les membres du corps diplomatique et consulaire, ceux de la Cour Constitutionnelle et le personnel aéronautique. Toutes ces catégories de salariés du budget de l’Etat bénéficiaient de pensions de retraite qui ne suivaient pas le principe de la contribution, si bien que certaines sommes étaient 15 fois plus élevées qu’une pension normale. Vivement mécontents de se voir supprimer ces droits, les juges de la Haute cour de cassation et de justice et ceux du Conseil supérieur de la magistrature en ont saisi la Cour Constitutionnelle. A leur avis, la loi qui supprime les régimes spéciaux des pensions de retraite est non conforme à la Constitution et transgresse « brutalement » les principes de l’indépendance et de l’inamovibilité des juges. Affaire à suivre.