Le retrait des troupes russes de Transnistrie, à nouveau en débat
Bogdan Matei, 12.09.2019, 13:49
Forcée à expérimenter une cohabitation pas toujours
facile entre le président socialiste pro-russe Igor Dodon et le gouvernement pro-occidental
dirigé par Maia Sandu, la République de Moldova voisine tente de conserver ses bonnes
relations avec Bruxelles et Bucarest et, en même temps, de normaliser ses contacts
avec Moscou. A cet effet, « le retrait des troupes russes du pays est une
des priorités de Chişinău », a réitéré, mercredi, à Moscou, le chef de la
diplomatie moldave, Nicu Popescu. Lors de sa première visite en tant que ministre
dans la capitale russe, celui-ci a rencontré son homologue Sergueï Lavrov et a
salué le fait que Moscou affirme une fois de plus sa disponibilité d’évacuer et
de neutraliser la munition qu’elle garde depuis une vingtaine d’années dans la
région séparatiste de Transnistrie. Selon le correspondant sur place de Radio
Roumanie, le chef de la diplomatie russe a précisé que, sur un total de 20.000
tonnes de munitions, la moitié environ avait une date de dépôt expirée. En même
temps, les préparatifs pour une telle évacuation pourraient s’étaler sur plus d’une
année, nécessitant plusieurs contacts entre les ministères de la Défense russe
et moldave, a encore souligné Sergueï Lavrov. Antérieurement, le ministre russe
de la Défense, Serguei Choïgou, avait lui aussi annoncé à Chişinău,
que Moscou avait l’intention d’évacuer et de neutraliser sa munition de Transnistrie.
Pour leur part, les commentateurs regardent ces
engagements avec prudence, estimant que cette mesure a plutôt un rôle palliatif,
(c’est à dire avec un effet à court terme et qui ne résout pas toutes les tensions
qui existent entre les deux pays). Par ailleurs, l’année dernière, l’Assemblée
générale de l’ONU avait adopté à une large majorité le projet de résolution proposé
par la République de Moldova, qui demandait le départ des troupes russes de Transnistrie.
Un projet qui compte une dizaine de co-auteurs, dont la Roumanie et l’Ukraine,
voisines de la République de Moldova, les trois Pays baltes, qui ont connu l’occupation
soviétique pendant un demi-siècle, et des membres importants de l’UE et de l’OTAN,
tels la Grande Bretagne et la Pologne. Défenseur permanent de l’indépendance et
de l’intégrité de l’Etat voisin, Bucarest n’a pas tardé à saluer d’adoption de cette
résolution, avec 64 votes pour, 15 contre et 83 abstentions. A noter que des
acteurs importants sur la scène politique internationale, tels les Etats-Unis,
la France, l’Allemagne, le Canada, la Turquie et le Japon ont voté en faveur du
retrait des troupes russes. Par contre, les alliés fidèles de Moscou, tels l’Arménie
et le Belarus, ou encore les représentants des régimes dictatoriaux comme la
Corée du Nord, la Syrie ou Cuba ont voté contre cette démarche.
Pour vous donner un contexte, sachez que la Transnistrie
est une petite région russophone et russophile située à l’est la République de
Moldova, le long de la frontière avec l’Ukraine. En 1992, elle sortait de facto
du contrôle de Chisinau, à l’issue d’un conflit armé qui a fait des centaines
de morts et qui a été tranché par l’intervention des troupes russes en faveur
des séparatistes. En 1999, lors du sommet de l’OSCE d’Istanbul, la Russie de
Boris Eltsine s’engageait déjà à retirer ses troupes et son arsenal de cette région.
5 ans plus tard, le processus a été définitivement arrêté. La situation est sans
solution depuis. Ce qui a malheureusement donné naissance à une boutade amère
qui dit que la République de Moldova est l’Etat le plus long au monde, car cela
fait deux décennies déjà que les Russes s’en retirent. (Trad. Valentina Beleavski)