La semaine du 29 janvier au 03 février 2018
Nouveau gouvernement à Bucarest
Daniela Budu, 03.02.2018, 13:31
Nouveau gouvernement à Bucarest
Le 3e gouvernement de la coalition formée du Parti social-démocrate (PSD) et de l’Alliance des Libéraux et des démocrates (ALDE) s’est installé lundi à Bucarest. Rappelons-le, en décembre 2016, le PSD remportait haut la main les élections parlementaires et prenait le pouvoir aux côtés de l’ALDE. 6 mois plus tard, il marquait une première historique en Roumanie : il renversait son propre cabinet par motion de censure. Le premier ministre Sorin Grindeanu fut alors remplacé par Mihai Tudose, qui vient de perdre lui aussi le soutien politique de son parti et a donc dû démissionner. Désormais c’est le tour d’une ancienne députée européenne et membre du PSD, Viorica Dancila, de diriger le cabinet de Bucarest. Elle devient ainsi la première femme première ministre de l’histoire de la Roumanie.
Les membres du nouvel Exécutif ont prêté serment d’investiture devant le président Klaus Iohannis qui a déclaré à cette occasion : « Vous avez une mission difficile. En partant avec un capital de confiance amoindri, causé premièrement par les erreurs politiques et administratives faites par les deux cabinets précédents, vous devrez gagner la confiance. Vous héritez donc, dès le départ, de la facture de l’échec des deux gouvernements antérieurs, proposés par cette majorité, et vous avez d’autant plus l’obligation de consentir tous les efforts pour que les choses reviennent à la normale. »
Investir dans l’infrastructure, continuer de faire croître les revenus de la population, démarrer la réforme administrative et réduire la bureaucratie – voilà les principales directions du programme de gouvernance de la première ministre Viorica Dancila. Elle promet également de ramener la Roumanie dans la première moitié du classement des économies les plus performantes de l’UE à l’horizon 2020.
La justice roumaine – dans le collimateur de Bruxelles
Le président Klaus Iohannis a discuté, mercredi, avec les responsables communautaires notamment du fonctionnement de l’Etat de droit, un thème qui préoccupe la classe politique et l’opinion publique roumaine. L’indépendance de la justice est intangible – a martelé le chef de l’Etat. A l’issue de sa rencontre avec le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, il a déclaré que les problèmes ayant trait aux lois de la justice et aux Codes pénaux devaient être résolus par la Roumanie, sans qu’elle attende des solutions de l’extérieur.
Klaus Iohannis: « Je suis décidé et convaincu que je réussirai à faire en sorte que ces discussions s’achèvent par des lois, qui seront dans leur variante la meilleure, des lois qui puissent être utilisées en pratique. Mon objectif le plus important reste le même : l’indépendance de la justice roumaine est intangible, c’est une question pour laquelle je m’investirai à fond et je ferai tout, absolument tout ce qu’un président peut faire pour maintenir les choses ainsi. »
A son tour, le chef de l’exécutif communautaire a estimé que le système judiciaire de Roumanie fonctionne et que l’on ne peut pas dire que Bucarest ignorerait l’Etat de droit tant que les décisions de la Cour constitutionnelle sont respectées. Mais il est inacceptable que la Roumanie fasse des pas en arrière dans cette voie, a mis en garde l’officiel européen. Et de répéter que la levée du Mécanisme de coopération et de vérification (MCV) par lequel Bruxelles suit les progrès et les arriérés en matière de justice dès l’admission de la Roumanie à l’UE en 2007 ainsi que l’acceptation à l’espace Schengen, que Bucarest s’est vu refuser par des chancelleries occidentales influentes, qui accusent justement la corruption persistante de l’administration roumaine, dépendent du respect de ces principes. Les Roumains ne méritent pas d’être traités comme des Européens de second rang. Pour moi, la Roumanie et les Roumains sont au centre de la vie européenne et je continuerai de faire tous les efforts pour atteindre ce but », a conclu M Juncker. Ses déclarations interviennent après que les ambassades de sept membres occidentaux de l’Union, tout comme la Commission elle-même, eurent exprimé leur préoccupation vis-à-vis de la modification des lois de la justice.
Décision inattendue dans le dossier de corruption « Microsoft »
Six ex-ministres roumains enquêtés dans le dossier appelé Microsoft échappent au bras de la Justice vu que les faits dont ils étaient accusés ont été prescrits. Les dignitaires, dont trois titulaires du portefeuille de l’Education et un des Finances, faisaient l’objet d’une investigation pour abus de fonctions dans une grande affaire de corruption portant sur la location illégale de logiciels Microsoft pour les écoles roumaines. Le préjudice causé a été estimé à près de 70 millions de dollars. Selon les procureurs anticorruption, entre 2003 et 2004, les 6 ministres avaient initié ou soutenu différents décrets gouvernementaux qui approuvaient la conclusion avec la société Fujitsu Siemens Computers d’un contrat de location de licences informatiques Microsoft destinés aux écoles. Par ailleurs, deux hommes d’affaires ont été traduits en justice dans le même dossier, sous accusation de blanchiment d’argent.
Fonds européens pour la Roumanie
En visite en Roumanie, la commissaire européenne à la Politique régionale, la Roumaine Corina Cretu, a invité ce pays à accélérer la mise en œuvre des projets financés de fonds européens. Elle affirme son mécontentement de ce que la finalisation des projets d’infrastructure, par exemple, soit en retard et qu’en général, les pouvoirs publics soient lents dans la mise en œuvre des projets. Malgré les progrès entrepris ces derniers mois, la Roumanie risque de perdre des fonds communautaires importants, a mis en garde Corina Creţu : « Le danger de perdre de l’argent existe toujours, et les efforts ne doivent pas être interrompus ; au contraire, il faut les amplifier. Je me félicite de ce qu’une série de mesures aient été proposées ; si appliquées, elles pourraient mener à des résultats immédiats. Cela éviterait la situation où la Roumanie perd des sommes fortes de l’argent européen par désengagement. »
Lors de sa rencontre avec la responsable de Bruxelles, le gouverneur de la Banque nationale, Mugur Isărescu, a parlé des avantages des fonds communautaires et a indiqué que ces dix dernières années, à savoir depuis que l’adhésion de la Roumanie à l’UE, le pays a bénéficié de 45 milliards d’euros de fonds européens. Si l’on prend en compte la contribution de la Roumanie au budget de l’UE, les entrées nettes de fonds européens s’élèvent à une trentaine de milliards d’euros, a précisé le gouverneur. Il a également souligné que les fonds européens constituent la chance de la Roumanie de se moderniser, notamment au niveau de l’infrastructure des transports, de l’éducation et de la santé. Il a averti que sans l’argent européen, la Roumanie serait dépourvue d’une source essentielle de capitaux. Plus encore, les retards des rentrées de fonds communautaires, ou la rentrée de sommes trop réduites, influencent l’équilibre sur le marché des devises et le taux de change, a encore expliqué le gouverneur de la Banque centrale de Roumanie, Mugur Isarescu. (Trad. Valentina Beleavski, Ligia Mihaiescu)