La semaine du 19 au 24 février 2018
Le ministre de la Justice demande la révocation de la cheffe du Parquet anticorruption
Corina Cristea, 24.02.2018, 13:29
Le ministre roumain de la Justice Tudorel Toader a déclenché la procédure de révocation de la procureure en chef de la Direction nationale anticorruption Laura Codruţa Kövesi, une décision qui a suscité de nouvelles protestations de rue à travers la Roumanie. Une décision reposant sur des faits et des actes intolérables dans un Etat de droit, aux dires du ministre, des faits qu’il a réunis dans un rapport présenté devant la presse. La cheffe de la DNA aurait excédé ses attributions et exercé une pression sur le gouvernement et sur le bon fonctionnement des institutions, accuse le ministre de la Justice. Tergiversation des solutions de différents dossiers, manque de réaction dans la vérification de certains procureurs, déclarations publiques inadéquates – autant de reproches formulés également par le ministre à l’adresse de Mme Kövesi.
Tudorel Toader: «La Direction nationale anticorruption (DNA) ne s’identifie plus à son procureure en chef, dont les actions, cette dernière année, ont prouvé être à même de mettre en danger l’institution même qu’elle dirige, par son excès d’autorité, par son comportement discrétionnaire, son non-respect de l’autorité du Parlement et du rôle et des compétences du gouvernement, par ses contestations des décisions de la Cour Constitutionnelle et de son autorité.»
Juste après l’annonce faite par Tudorel Toader, le chef de l’Etat, le seul en mesure de révoquer la procureure en chef de la DNA, a précisé dans un communiqué de presse maintenir son point de vue positif sur l’activité de l’institution. Estimant que le rapport sur l’activité du Parquet anticorruption manquait de clarté, le président, qui cohabite difficilement d’ailleurs avec le gouvernement, a promis que le document serait analysé dans les moindres détails par les départements de l’Administration présidentielle. Le chef de l’Etat se servira de toutes ses prérogatives constitutionnelles pour assurer le fonctionnement d’une justice indépendante et pour renforcer l’Etat de droit, lit-on dans le même communiqué.
A son tour, le procureur général de la Roumanie, Augustin Lazăr, a estimé que, de son point de vue, il n’y avait pas de raison légale de révoquer Mme Kovesi.
Les réactions de la classe politique de Bucarest n’ont pas tardé. Le Parti Social Démocrate (PSD), principale formation politique de la coalition au pouvoir, estime que cette demande de révocation est fondée, car basée sur un rapport très bien argumenté. Pour sa part le Parti National Libéral (PNL), d’opposition, ne partage pas cette opinion. Bien au contraire, il pointe de doigt une décision prise par le ministre Tudorel Toader, sous la pression des politiciens ayant des démêlés avec la Justice.
La première ministre roumaine en visite officielle à Bruxelles
La première ministre roumaine Viorica Dancila a effectué cette semaine sa première visite officielle à Bruxelles. L’occasion de discuter avec les responsables européens de la présidence tournante de l’UE que la Roumanie assumera au premier semestre de 2019, des perspectives financières de la Roumanie ainsi que de l’adhésion du pays à l’espace Schengen.
Pour sa part le président de la Commission Européenne, Jean-Claude Juncker, a affirmé qu’il n’y avait plus de raisons pour la Roumanie de ne pas faire partie de l’espace de libre circulation. Il a exprimé en même temps sa conviction que le gouvernement de Bucarest déposerait tous les efforts pour que le système judiciaire fonctionne bien. De l’avis de M Junker, le MCV visant la Bulgarie et la Roumanie devrait être levé avant la fin du mandat de cette Commission.
Toujours à Bruxelles, la première ministre roumaine s’est entretenue avec le président du Conseil Européen Donald Tusk et avec le président du parlement européen Antonio Tajani. Ce denier a demandé au gouvernement de Bucarest de poursuivre la lutte contre la corruption et de renforcer l’Etat de droit.
Viorica Dancila : « Je crois qu’une bonne coopération est au bénéfice tant de l’Europe que de la Roumanie. Je m’exprimerai dans le parlement européen de l’avenir de l’Europe, auquel la Roumanie doit participer activement, doit s’impliquer, vu qu’elle assumera la présidence du Conseil et les défis qui découlent de ce mandat. »
L’absorption déficitaire des fonds européens a été un autre sujet évoqué par la cheffe du cabinet de Bucarest dans le cadre d’une rencontre avec la commissaire européenne au développement régional, Corina Cretu. La responsable européenne a exhorté les autorités de Bucarest à simplifier les procédures pour l’utilisation des fonds européens.
Motion simple à l’encontre de la ministre du Travail.
La motion simple à l’encontre de la ministre sociale-démocrate du Travail, Lia Olguta Vasilescu a été rejetée mercredi par le plénum de la Chambre des Députés. Les signataires de la motion, une soixantaine de députés libéraux ont accusé la coalition gouvernementale d’avoir bouleversé le système fiscal et social et créé une profonde inégalité entre le secteur public et celui privé, suite au transfert intégral des contributions sociales à la charge de l’employé à partir du 1er janvier 2018. Ces mesures ont provoqué la baisse des revenus d’environ deux millions de Roumains. Au cours des débats au sein de la Chambre des Députés, la ministre Olguta Vasilescu a déclaré que les salaires ne baisseraient pas si les employeurs décident de ne plus privilégier leur profit et de transférer tout le cout salarial dans le revenu brut de l’employé.